Les responsabilités de l’Environmental Protection Agengy (EPA) sont en effet, dans le collimateur des Républicains. C’est cette agence environnementale américaine qui est chargée d’appliquer les normes antipollution de l’industrie automobile, elle aussi qui récemment, a soulevé le scandale du Dieselgate, et elle encore qui s’occupe de mettre en oeuvre le plan des énergies propres (Clean Power Plan) voulu par Obama, et combattu par Scott Pruitt.
Même avec Scott Pruitt à l’EPA, le charbon ne fera pas son come-back
Mais, la nomination de ce dernier, procureur républicain de l’État d’Oklahoma, grand producteur de pétrole et de gaz de schiste, et adversaire ardent des politiques environnementales conduites par le président Obama, intervient à un moment où l’économie américaine a déjà commencé à prendre ses distances avec les énergies fossiles. Plus sous l’impulsion des investisseurs et des agents économiques, que contrainte par la réglementation et la pression politique.
Ainsi, il est peut-être trop tard pour revenir en arrière et annuler toutes les avancées de l’administration Obama en matière climatique, les forces du marché rendant probablement vaines les promesses de Donald Trump de créer un demi-million d’emplois dans l’industrie du charbon et du pétrole de schiste.
Repères : la production mondiale de charbon a commencé à décliner en 2013 et la baisse s’est accentuée en 2014 et 2015. La Chine reste de loin le premier producteur de charbon au monde. La combustion du charbon émet 35 % de CO2 de plus que le pétrole, 72 % de plus que le gaz naturel.
- La consommation américaine de charbon a baissé de 11 % en 2015.
- La part du charbon dans la production électrique américaine est passée de 50 % il y a 10 ans à 35 % en 2015.
- 200 des 1.200 centrales thermiques à charbon américaines doivent fermer à brève échéance.
Examinez les chiffres de la production et de la consommation de charbon dans le monde sur le Planetoscope.
À court terme, des dégâts environnementaux réels
Pourtant, si les velléités du nouveau dirigeant américain ont peu de chances de se matérialiser en termes d’emploi, il reste que sa nouvelle orientation risque d’avoir un impact réel sur le climat lui-même. Car, de l’avis de la plupart des experts, sans une impulsion politique continue, le virage actuel, entamé par le privé vers une économie moins carbonée, ne se fera pas assez rapidement pour compenser les effets négatifs d’une atmosphère qui se réchauffe, de la montée des eaux des océans, de la multiplication des orages et des ouragans, ainsi que d’inondations et de sécheresses toujours plus ravageuses.
Robert Stavins, qui dirige le programme d’économie climatique à l’université de Harvard, estime toutefois que « la bonne nouvelle c’est que l’économie américaine est devenue moins carbonée d’elle-même et que cette tendance de fond va se poursuivre quoi qu’il arrive ». La mauvaise nouvelle, tempère-t-il, c’est que de lui-même ce mouvement ne pourra pas compenser suffisamment les effets les plus négatifs du réchauffement climatique et de l’excès d’émissions de gaz à effet de serre.
Scott Pruitt à l’EPA, une nomination qui va à contre courant
Le plan « Énergie Propre » de Barack Obama était déjà jugé insuffisant pour atteindre les objectifs fixés par l’accord de la COP 21 de Paris dans le cadre d’un plan global dans lequel chaque pays est engagé à s’attaquer à son niveau aux causes humaines du réchauffement.
Cela n’a pas empêché la nomination de Scott Pruitt à la tête de l’agence climatique américaine, une nomination annoncée sur Facebook comme la promesse de millions d’emplois dans le secteur énergétique : « Scott Pruitt sera très actif dans la mise en oeuvre du plan énergie du nouveau président, qui mènera l’Amérique vers l’indépendance énergétique, créera des millions d’emplois et préservera la qualité de l’air et de l’eau », selon le communiqué accompagnant sa désignation. Celui-ci ajoute qu’« il contribuera à préserver nos habitats et réserves naturelles, nos ressources tout en libérant les forces d’une révolution énergétique qui apporteront notre patrie une immense richesse ».
Cette réallocation de priorités devrait selon le président-élu « créer au moins un demi-million d’emplois et l’équivalent de 30 milliards de dollars sous forme de hauts salaires ». Vue de l’esprit : malgré tout son zèle à vouloir supprimer les efforts d’Obama pour diminuer le poids des centrales thermiques au charbon dans la production énergétique américaine, Scott Pruit va se heurter à une réalité déjà en marche.
Le sens de l’Histoire : moins de charbon, plus d’énergies propres
En effet la plupart des grands groupes énergétiques ont commencé à fermer leurs plus grandes et plus vieilles centrales à charbon. Quand ils ne l’ont pas déjà fait, il y a peu de chances qu’ils remettent en cause leur projet de le faire un jour ou l’autre. La plupart d’entre eux considèrent que sortir du charbon et des énergies fossiles est inéluctable et peu sont prêts à se mettre en travers du cours de l’Histoire pour complaire à un nouveau président au mandat de quatre ans. La plupart ont commencé à investir massivement dans des fermes solaires et éoliennes.
Même les patrons de l’industrie du charbon reconnaissent que Scott Pruitt ne pourra pas faire grand-chose pour inverser la tendance. Néanmoins selon le PDG de la Murray Corporation, un énergéticien charbonnier de l’Ohio, « Scott Pruitt va faire ce qu’il faut à la tête de l’agence pour le climat, c’est-à-dire virer tous les fonctionnaires qui ont passé leur temps à rédiger des réglementations et les renvoyer chez tous les écologistes radicaux qui les inspirent ». Il ajoute, à regret : « mais il est vrai que le charbon ne pourra pas retrouver sa place d’antan ».
La chute continue du coût de l’énergie solaire et éolienne, renforcée par la politique fiscale fédérale, a accéléré l’abandon des centrales à charbon par les grands groupes énergéticiens, ceux-là mêmes qui à la fois tiraient à boulets rouges sur la politique pro-climat d’Obama tout en réorientant discrètement leurs investissements de long terme vers des énergies bas carbone.
Nikolas Akins, le patron d’une autre société produisant de l’énergie à base de charbon dans 11 États américains a expliqué le lendemain de l’élection présidentielle, qu’il planifiait ses investissements à un horizon de 20, 30 ou 40 années. Donc, même si, Donald Trump met à bas le plan « Énergie Propre » de Barack Obama, il n’y a quasiment aucune chance à court terme que sa politique de désengagement des énergies fossiles soit remise en question. Elle sera tout au plus ralentie.
Lire page suivante : l’urgence d’accélérer la sortie du charbon