Blue Bees est née, fin 2012, de l’imagination fertile de Maxime de Rostolan, fondateur également de l’association des Fermes d’Avenir. qui a pour but de semer des micro-fermes partout en France. Il décide ensuite d’aider les petits entrepreneurs en Afrique à financer leur entreprise, les PME là-bas n’ayant pas accès au crédit bancaire. Au départ, Blue Bees finance de petites PME agricoles, par exemple produisant du soja bio au Cameroun ou travaillant dans l’agroforesterie au Brésil, et cherche à combler l’absence de financement entre le microcrédit et les financements gigantesques de la Banque Mondiale. Depuis, BlueBees est devenue la plateforme sur laquelle les citoyens peuvent investir dans l’agriculture de demain.
consoGlobe.com – Pourquoi ce nom de Blue Bees ?
Emmanuelle Paillat – Blue Bees s’est toujours donné pour mission d’aider la biodiversité, que les abeilles symbolisent, et l’écologie, au départ avec une vocation particulière pour les pays du sud.
Nous avons été la première plateforme à proposer du prêt rémunéré en France : on prête de l’argent et on récolte les intérêts (attention, il existe néanmoins un risque de non-remboursement). Blue en référence à la blue economy de Gunter Pauli.
Quand j’ai rencontré Maxime en 2014, il recherchait une directrice opérationnelle. C’est aussi le moment où le monopole bancaire saute, et les entreprises de crowdfunding ont eu le droit de faire du prêt rémunéré. Blue Bees s’est ainsi ouvert à la France, et de fil en aiguille, au don aussi, en étant spécialisé sur l’agriculture. François Lemarchand, fondateur de Nature & Découvertes a alors investi dans Blue Bees.
consoGlobe.com – Où en est Blue Bees aujourd’hui ?
Emmanuelle Paillat – À ce jour, depuis janvier 2015, 2 millions d’euros ont été levés qui ont permis d’aider 120 projets. À 70 %, en nombre de projets, c’est du prêt, à 30 % c’est du don. Un projet moyen, en don, s’élève à 9.000 euros. En prêt, la moyenne est 30.000 euros. La locomotive, c’est donc le prêt.
Les projets se remboursent, les participants réinvestissent, donc la roue tourne ! C’est l’effet de levier du crowdlending : l’argent investi par nos actionnaires (200.000 euros) ont ainsi permis 2 millions d’euros de prêts ! D’où l’intérêt de prêter plutôt que donner. C’est un effet de levier énorme : on peut financer l’économie réelle par la foule. Aujourd’hui Blue Bees a 15.000 membres, des personnes soucieuses de l’environnement, sensibilisées au développement durable.
consoGlobe.com – Pouvez-vous me citer quelques projets emblématiques de l’action de Blue Bees ?
Emmanuelle Paillat – On en a plein ! L’agriculteur avec sa micro-ferme en Bretagne, ou en permaculture, le berger pour lequel la banque ne veut pas prêter parce qu’il est en redressement judiciaire, des brasseurs qui veulent changer d’échelle… On aide des gens à s’installer, on recrée de l’économie, du lien social dans les territoires.
En termes de biodiversité, Blue Bees a aidé beaucoup d’apiculteurs. Notre impact est aussi visible en termes de solidarité, parce qu’il y a beaucoup de projets sans contrepartie, par exemple pour soutenir des maraîchers victimes du changement climatique, comme ce maraîcher qui a avait perdu 80 % de sa récolte après une inondation et pour lequel on a récolté 14.000 euros. Personne ne s’assure parce c’est trop cher.
consoGlobe.com – Est-ce que les Français comprennent mieux aujourd’hui le crowdlending ?
Emmanuelle Paillat – Ça avance doucement, nos contributions progressent, mais 15.000 Français sur 65 millions, c’est encore peu, Ça reste une niche.
Les agriculteurs sont surendettés, se suicident, vendent à bas prix, sont malheureux. Ça ne va pas. L’agriculture détruit les sols, la biodiversité, on court à la catastrophe. Certes, des néoruraux s’installent, lisent des livres, ont envie de récréer un lien avec la nature, respectueux de celle-ci, avec l’envie de créer des fermes diversifiées, autonomes, résilientes. C’est l’inverse de la mono-culture intensive.
Aujourd’hui, des gens ont besoin de créer du lien social, beaucoup veulent développer des fermes pédagogiques, où ils associent maraîchage, poules, arbres fruitiers et pédagogie, avec en plus la yourte qui permet d’accueillir quelques touristes qui partagent la vie à la ferme. Ils ne gagnent pas des milles et des cents, mais ils sont heureux. Ils ont aussi moins de charges, donc moins de pression pour augmenter leur revenus.
Les gens viennent nous voir parce qu’ils n’ont pas accès au crédit bancaire, ou pour avoir des fonds propres pour ensuite avoir accès au crédit bancaire, et d’autres viennent nous voir par idéologie, parce qu’ils en ont marre des banques. Et puis, les banques préfèrent financer des projets conventionnels. Acheter un tracteur, elles comprennent, elles peuvent revendre. Mais faire des pâtes fraîches pour un céréalier, ce n’est pas évident pour elles, alors que les agriculteurs comprennent qu’ils doivent se diversifier.
consoGlobe.com – Comment êtes-vous perçus dans le monde agricole ?
Emmanuelle Paillat – Nous sommes perçus comme une plateforme engagée, très marquée par le désir de changer l’agriculture actuelle. Nous sommes évidemment plus proches des petites fermes biologiques, des paysans que des gros agriculteurs en mono-culture.
Plus d’informations sur le site de Blue Bees