10.000 semi-remorques…C’est le volume d’huiles alimentaires usagées jeté chaque année par les ménages français. À peine 5 % seraient revalorisés sous forme de biocarburant selon les fondateurs de la Baraque à Huile. Alors, comment changer les comportements ? Lancée en avril 2017, cette initiative regroupe 1r Design et C+B Lefevbre, deux agences d’ecodesign et le collecteur de déchets Trialp, tous originaires de l’Isère et de la Savoie. Après six mois d’expérimentation, les trois partenaires ont déployé leur méthode de collecte innovante auprès de 20 déchetteries de l’ex-région Rhône-Alpes.
Quel est le concept de la Baraque à Huile ?
Deux facteurs expliquent cette démobilisation des ménages. D’abord, le manque d’information. Trop de gens ignorent encore les conséquences néfastes du rejet d’huiles alimentaires usagées dans les canalisations. Et surtout, un système de collecte peu incitatif voire décourageant.
Des collectes d’huiles ménagères en hausse de 40 %
La Baraque à Huile a donc eu l’idée de distribuer gratuitement aux usagers des déchetteries l’Olibox : un seau de 3 litres conçu à la fois pour faciliter la récupération des huiles ménagères et sensibiliser aux enjeux de leur revalorisation. Environ 20.000 Olibox ont été écoulés depuis le lancement du projet. Après remplissage, les ménages qui acceptent de jouer le jeu n’ont plus qu’à le déposer au prochain passage sur une étagère aux couleurs de la Baraque à Huile pour repartir avec un seau propre et vide.
Jusque là, ces déchetteries se contentaient de mettre à disposition des cuves de 300 ou 600 litres ou des récupérateurs d’eau de pluie. « Les gens venaient avec leurs propres contenants et vidaient leur friteuse dans une bouteille d’Evian ce qui n’est pas forcément facile », remarque Sylvain Denat, fondateur de l’agence 1r Design, partenaire du projet. Plus pratique, la méthode semble faire ses preuves : sur les sites pilotes, la hausse du volume d’huiles alimentaires collectées se chiffre à 40 %(1).
35 % d’huiles végétales polluées par des déchets de vidange
La solution se veut aussi qualitative. Le système de seaux tournants optimise une phase de tri indispensable.
Petite piqûre de rappel
Seules les huiles de cuisson ou de consommation se recyclent en biocarburant, contrairement aux huiles de moteur ou de vidange.
Oui mais voilà ! Beaucoup de particuliers de bonne volonté confondent les deux catégories. Résultat : des volumes importants d’huiles végétales se retrouvent mélangés par mégarde avec ces huiles noires. « Il suffit d’un petit pourcentage dans 1.000 litres pour que l’ensemble ne soit pas revalorisable en biocarburant. C’est toute la chaîne qui est cassée. Sur la totalité collectée, on estime qu’entre 30 et 35 % de l’huile collectée a été polluée », déplore Sylvain Denat.
Comment réduire ces pertes considérables ?
À chaque collecte, l’entreprise Trialp vérifie chacun des seaux pour détecter la présence éventuelle d’huiles de moteur et le jeter le cas échéant. Elle repart ainsi avec un volume d’huiles 100 % recyclables. Reste à le filtrer avant une phase de décantation pour obtenir la matière première expédiée ensuite dans une bioraffinerie.
Des bornes de collecte bientôt au pied des immeubles ?
Les dirigeants ne comptent pas en rester là. D’ici deux ans, les partenaires espèrent déployer la marque au niveau national dans 400 déchetteries. « Nous sommes aussi en train de travailler sur des bornes de collecte hors déchetteries comme pour les vêtements ou le verre. Par exemple au pied des immeubles où c’est une vraie problématique », annonce Sylvain Denat.