Présenté comme un projet qui pourrait rapporter gros à la plus grande puissance économique sud-américaine, il inquiète les défenseurs de l’environnement qui voient dans ce forage pétrolier une menace pour les paysages et l’écosystème brésiliens, réputés dans le monde entier.
Le pétrole : la richesse contre l’écosystème
Petrobras se voit comme un atout pour le Brésil
Découvert dans les gisements sous-marins profonds sous d’épaisses couches de sel en 1961, le pétrole présalifère brésilien fut vite exploité. Une affaire qui fit le bonheur de l’État brésilien et des entreprises pétrochimiques, dont l’entreprise Petrobras, la plus grande entreprise pétrolière du pays. Ça n’est pas par hasard si Petrobras est la première capitalisation boursière brésilienne.
Le secteur pétrolier est soutenu par l’État brésilien et sa présidente, Dilma Rousseff. Dilma Rousseff est aussi présidente honoraire du conseil d’administration de Petrobras, qui affirme haut et fort que Petrobras est plus un atout majeur pour le Brésil. D’ailleurs Petrobras finance des programmes de lutte contre la pauvreté via plusieurs fonds d’investissements(2). Les dirigeants de Petrobras estiment en effet que, somme toute, la vraie pollution, c’est la pauvreté. Il serait donc nécessaire pour un pays en développement comme le Brésil d’exploiter ses ressources fossiles pour en venir à bout. Petrobras ne manque pas de rappeler que les États-Unis ont eux aussi fondé leur développement sur l’exploitation du pétrole dans le Golfe du Mexique.
Et Petrobras est prêt à prendre des risques : les gisements se trouvent à plus de 300 km du large et à 2000 m de profondeur. Les hélicoptères n’ont pas accès aux plates-formes pétrolières et l’océan s’avère parfois capricieux.
L’exploitation du pétrole, une catastrophe pour l’environnement ?
Pour les écologistes du pays, tous ces efforts ne servent qu’à amorcer une bombe à réchauffement climatique qui gît sous leurs pieds. Selon les dernières estimations, 50 milliards de barils de pétrole gisent dans les eaux brésiliennes. De plus, la couche de sel très flexible qui recouvre les poches d’hydrocarbures laisserait passer de grandes quantités de gaz toxiques. Tout ça grâce à la somme astronomique de plus de 300 millions de dollars investis.
Les habitants ont d’ailleurs pu voir le paysage se transformer au fil des années depuis l’installation de la première raffinerie Petrobras en 1961 dans la baie de Guanabara, non loin de Rio de Janeiro. Guilherme de Oliveira Estrella, géologue retraité de l’entreprise Petrobras, avouera au journal britannique The Guardian que l’endroit était un paradis avant l’installation de cette raffinerie et que cette dernière a sonné le début de la destruction de la baie, « détruite par ce qu’on appelle le progrès ». La baie a d’ailleurs été jugée impropre à la baignade et pourtant, il n’est pas rare de voir des personnes s’y baigner malgré le danger encouru(1).
Des écologistes sous pression
Face à ce désastre écologique, des habitants de la baie se sont révoltés contre la destruction de leur environnement naturel. Toujours dans le journal britannique The Guardian, Alexandre Anderson, ancien pêcheur de la Baie de Guanabara a affirmé avoir été plusieurs fois la cible de tirs. Il affirme également que des membres de son syndicat de pêcheurs ont été tués par des personnes engagées par Petrobras. Accusations que nient la compagnie pétrolière nationale.
Aujourd’hui, Alexandre Anderson est placé sous protection policière et continue encore de contrôler et constater les déversements de pétrole et constructions illégales dans la baie. Selon lui, l’écosystème est le premier exposé aux forages pétroliers, et est donc la première victime des ces exploitations.
Une entreprise nationale qui perd de son aura
Un contexte économique difficile…
La situation pourrait très bien s’améliorer dans les années à venir avec le ralentissement des exploitations d’hydrocarbures, jugées de moins en moins rentables par les investisseurs, dans un contexte de cours du pétrole exceptionnellement bas. En plus de devoir forer au prix fort, Petrobras doit aussi séparer le pétrole du gaz et de l’eau sur de petites raffineries flottantes au large de la baie, ce qui accroît les coûts. Or Petrobras est déjà l’une des entreprises les plus endettée du monde.
Ces contraintes financières qui ne font qu’empirer les conditions de traitement des puits de forage. Des incendies et des explosions à répétition sont à déplorer sur les sites gérés par l’entreprise brésilienne. Ces accidents menacent non seulement la côte brésilienne et ses habitants, mais aussi les propres travailleurs de Petrobras. D’autant plus que l’entreprise offre des primes « zéro accident » à ses cadres, qui préfèrent alors minimiser les accidents afin de toucher l’argent.
… et des affaires de corruption
Le tableau est noirci par les affaires de corruption de l’entreprise. Il y a un an, le Brésil découvrit que près de deux milliards de dollars d’aides financières de Petrobras accordées pour les programmes sociaux avaient été détournés pour des cadres et politiciens dont certains du Parti des travailleurs, le Parti de Dilma Rousseff. Suite à ces problèmes, l’action du groupe a fondu en 2014(3). Petrobras avait dû se séparer de plus de 10.000 employés. Enfin, le groupe a avoué que certains de ces investissements pétroliers devront être ralentis voire abandonnés.
Ainsi le pétrole devrait être moins exploité au Brésil dans les années à venir, non pas pour des raisons sociales ou bien environnementales mais bien pour des raisons économiques.