La réticence des autorités à réguler la pollution
La pollution de l’air est un sujet majeur pour l’avenir du pays. Pékin a connu pas moins de 179 jours de pollution en 2015, dont 46 de forte pollution non conforme aux normes nationales. En décembre 2015, Pékin a même franchi le palier rouge de la pollution atmosphérique pour la première fois depuis l’introduction dans la capitale d’une gradation à quatre couleurs du niveau d’alerte il y a deux ans. Cet instrument de mesure permet aux autorités de réagir et de mettre à l’abri les habitants.
Le palier rouge a provoqué la fermeture des écoles, la circulation alternée et le retrait de 30 % des véhicules officiels sur les routes ainsi que la mise à l’arrêt des usines polluantes et des chantiers. L’épais brouillard, le smog, ne risque pas de ralentir sa course sur l’ensemble du pays, causant d’importants problèmes de santé, notamment dans les zones densément peuplées avec des concentrations élevées de particules.
Un documentaire réalisé par une ancienne présentatrice de la télévision nationale, Chai Jing, a amené l’opinion chinoise à s’interroger sur les dangers de cette pollution, mais a également mis en évidence les conflits d’intérêts au sein des compagnies d’État du secteur énergétique, bloquant toute mesure efficace.
La ratification des Accords de Paris : un premier pas dans la lutte contre la pollution ?
Conscient qu’il est temps d’agir, le gouvernement chinois a fait un geste symbolique fort en ratifiant l’Accord de Paris. Ainsi, le premier pollueur de la planète s’engage à faire des efforts considérables, alors qu’il tire 70 % de son électricité du charbon et produit 24 % des émissions mondiales de CO2.
Quelques avancées ont déjà été constatées : une loi de janvier 2015 appelle les citoyens à participer au contrôle des entreprises polluantes, encourage les ONG à initier des procès d’intérêt public et augmente les amendes contre les entreprises polluantes. Depuis le 1er janvier 2013, le gouvernement central impose aux grandes villes du pays de publier heure par heure leurs relevés de concentration de particules fines dans l’air.
Des gouvernements locaux réticents
Mais des difficultés persistent dans la mise en oeuvre d’une réelle politique environnementale. Si les gestes symboliques augmentent au niveau national, les gouvernements locaux demeurent des freins au développement d’une politique environnementale durable. Les gouvernements locaux n’endossent pas leur responsabilité vis-à-vis de l’environnement.
On constate une réticence des autorités à imposer des mesures drastiques, car elles ont un coût social et économique élevé dans une ville comptant plus de cinq millions d’automobilistes tel que Pékin. Dans beaucoup de villes, l’économie est fortement dépendante des usines métallurgiques et des centrales thermiques dont les hauts fourneaux carburent au charbon, comme dans les communes de la province du Hebei qui encercle Pékin.
Promouvoir l’écologie apparaît comme un risque économique pour les dirigeants. Par ailleurs, la nature même du régime, en particulier en raison du manque de transparence, ne permet de définir de règles claires de participation citoyenne et d’engagement ferme des gouvernements locaux. Chloé Froissart, directrice du Centre franco-chinois de l’université Tsinghua à Pékin et chercheuse rattachée au Centre d’études français sur la Chine contemporaine, considère dans une interview à Novethic qu’« il n’y aura pas de contrôle effectif de la pollution sans une forme minimum de démocratie à travers la participation citoyenne, un accroissement de la liberté de reportage des médias et un vrai effort d’infirmation et de transparence ».
Alors si Pékin commence à intégrer la notion d’écologie dans ses politiques publiques, d’importants progrès restent à faire, notamment auprès des gouvernements locaux. La pression médiatique de l’opinion publique internationale dans un monde globalisé peut faire espérer une implication plus forte des acteurs chinois vers un développement durable. La Chine fait figure d’exemple pour le monde asiatique et peut devenir un modèle pour les dragons qui la suivent de près et pour l’Inde, dont les conséquences de la pollution se font de plus en plus sentir.
Bonjour
Merci pour cette info claire et documentée, qui ne fait malheureusement que confirmer ce qui se dit depuis des années et que les gouvernements européens et bien d’autres évitent régulièrement d’aborder pour ne pas fâcher le client.
Une parole européenne unie serait la seule solution, mais ce n’est pas pour demain.