Après plus d’un siècle marqué par un alarmant déclin, la population de tigres sauvages semble être en hausse. Selon un communiqué du WWF, on trouverait aujourd’hui dans la nature, au moins 3 890 spécimens, une augmentation considérable par rapport au dernier comptage de 2010, lors duquel près de 3 200 tigres avaient été recensés.
La population de tigres sauvages a augmenté principalement en Russie, au Bhoutan, au Népal et en Inde, des pays qui ont participé à la mise en place, lors du « Sommet International du Tigre » de Saint-Pétersbourg en Russie, d’un programme global de sauvegarde. Son objectif est de doubler les populations pour 2022, qui marque la prochaine année du tigre dans le calendrier lunaire asiatique. Le programme a été adopté en novembre 2010, par les gouvernements des 13 pays où se retrouve l’habitat naturel du tigre.
C’est la première fois dans l’histoire que des États se mobilisent pour la sauvegarde d’une espèce. Le programme, à l’initiative du WWF, porte sur le développement de stratégies nationales et régionales dans le but de protéger l’habitat du tigre, d’améliorer le recensement des individus et de créer des aires protégées.
La population de tigres évaluée à 100 000 dans les années 1900
Le phénomène de disparition des tigres a empiré ces dernières années, tout comme la perte de leur habitat naturel. En effet, les experts estiment qu’environ 100 000 tigres vivaient dans la nature au début du siècle dernier. Ces félins étaient répandus dans 13 pays, en Asie et sur des zones comprises entre la Turquie et la côte est de la Russie.
De nos jours, ils ont disparu d’Asie Centrale et du Sud-Ouest ainsi que de Java et Bali en Indonésie. Sur les 13 pays, plus que huit (Bangladesh, Bhoutan, Inde, Indonésie, Malaisie, Népal, Thaïlande et Russie) accueillent toujours des tigres à l’état sauvage : selon les estimations de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), il ne reste que 6 % de leur habitat naturel aux tigres.
D’autre part, à cause principalement de l’action humaine, trois des neuf sous-espèces ont disparu : le tigre de Java (Panthera tigris sondaica), le tigre de Bali (Panthera tigris balica) et le tigre de la Caspienne (Panthera tigris virgata). Et les six sous-espèces qui ont survécu, sont en danger critique selon la liste rouge de l’IUCN, notamment le tigre de l’Amour.
Selon la vice-présidente du WWF, Ginette Hemley, les derniers chiffres en hausse seront « un événement marquant dans la préservation de l’une des espèces menacées les plus iconiques ». Mais il faut prendre ces informations optimistes avec précaution, car il reste encore beaucoup de travail à accomplir pour atteindre 6 000 spécimens en 2022.
Pourquoi les tigres sont-ils en danger ?
Comprendre les menaces qui pèsent sur les tigres est essentiel pour améliorer leurs conditions de vie et empêcher leur disparition. Selon l’IUCN(1), le braconnage et la destruction de l’habitat naturel sont les principales raisons de la diminution des populations.
En effet, le tigre est très prisé sur le marché noir, où chaque partie de l’animal peut être vendue. Cette activité criminelle brasse des milliards de dollars, surtout dans le sud-est de l’Asie. Malgré les démentis et les actions internationales, les « remèdes traditionnels » de pseudo-médecins asiatiques continuent à stimuler le braconnage des tigres.
En Chine et dans le sud-est asiatique notamment en Malaisie et au Vietnam, on attribue par exemple, des propriétés anti-inflammatoires aux os de tigre et ils servent à élaborer une potion appelée « vin d’os de tigre ». Malgré l’interdiction pour tous les pays d’utiliser et d’élaborer des produits dérivés du tigre, la production illégale de « médicaments » se poursuit.
Une autre alarme est dès lors tirée, cette fois concernant les plus de 6 000 tigres retenus en captivité en Chine. Certains groupes puissants exercent des pressions pour que les gouvernements légalisent les « fermes » d’élevage afin de pouvoir faire commerce des peaux, des dents, des griffes, des yeux, et de tous les organes internes des animaux arrivés à maturité. Même si une convention de commerce international établit que « les tigres ne doivent pas être élevés pour le commerce de ses parties et dérivés », chaque année ce sont autour de 150 tigres braconnés qui sont confisqués. Ce qui ne représente qu’une petite fraction du marché noir.
D’autre part, les imitations de produits à base de tigre sont légales, ce qui contribue aussi à soutenir une certaine demande sur le marché.
Au braconnage, il faut ajouter la déforestation qui a détruit une grande partie de l’habitat naturel des félins. Pour aller chercher de quoi se nourrir, les prédateurs se rapprochent de plus en plus des villages et des communautés locales. En représailles, ils sont généralement capturés ou tués, puis vendus sur le marché noir. De même, le changement climatique cause la montée des eaux et menace les populations de tigres habitant les mangroves.
Pour lutter contre ces risques, le WWF a proposé de créer des aires surveillées et contrôlées. Cette mesure porte ses fruits en Inde, où trois nouvelles réserves ont été créées en 2015, encouragées par un rapport faisant état de l’accroissement de la population de tigres dans le pays.
Les chiffres annoncés par le WWF sur la hausse de la population de tigres montrent que les efforts internationaux ont des effets positifs qui méritent d’être encouragés, mais il reste encore de nombreux défis à relever pour les gouvernements, les ONG et les communautés afin d’éliminer le braconnage et le commerce du tigre en Asie.
Toutefois, si la tendance se poursuit à ce rythme et les efforts des pays continuent, l’objectif des 6 000 tigres pour 2022 pourrait bien être atteint.
*