Flambant neuve, l’installation a été inaugurée en juin à l’Ambassade, en présence de la Ministre de l’Environnement du Salvador : elle est composée de 19 panneaux, qui couvrent la quasi-totalité des besoins de l’Ambassade de France, et permettent même de réinjecter des surplus dans le réseau.
À la clé, une réduction de la facture énergétique de l’État français, mais surtout, une valeur exemplaire, répondant au plan « Ambassades vertes », lancé dès 2015 : tri des déchets, économies d’énergie, d’eau… Les projets sont nombreux et variés, en fonction des conditions locales, parmi les 160 Ambassades présentes à l’étranger, mais aussi les 89 consulats, 133 sections consulaires et 16 représentations.
Un prix « Ambassade Verte » a même été créé pour récompenser les plus novateurs et originaux.
La France a une ambassade verte au Salvador – Entretien avec David Izzo
« C’est véritablement l’imagination qui se met au service de l’action environnementale », se félicite David Izzo, Ambassadeur au Salvador. Il nous explique comment la France accompagne l’avancée du solaire dans ce pays, prédisposé, par ces conditions climatiques, à briller en ce domaine !
ConsoGlobe – Au Salvador, les panneaux photovoltaïques sont encore rares… comment est née l’idée d’en installer sur le toit de la résidence ?
David Izzo : Le déclic s’est opéré avec l’arrivée d’une entreprise française, NEOEN, dont nous avons facilité l’installation. Aujourd’hui, elle est devenue le principal acteur du secteur des énergies renouvelables du pays, après avoir remporté plusieurs appels d’offres pour construire et gérer des centrales photovoltaïques au Salvador, de véritables « fermes solaires » de grande capacité.
La première, de 101 MGWp, a été inaugurée en 2017 et la seconde, de 140 MGWp environ, sera raccordée au réseau en 2019. L’investissement représente plus de 320 millions d’euros, le plus important pour une entreprise française en Amérique Centrale.
Ayant accompagné ce « champion français » dans son développement, il nous a paru tout naturel de profiter de sa présence pour montrer l’exemple… et illustrer, concrètement, les efforts de la France pour faire adopter au niveau mondial des mesures fortes et ambitieuses, en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique.
ConsoGlobe – Cela a-t-il été facile à mettre en oeuvre ?
David Izzo : Les études préalables ont demandé un peu de temps. Il s’agissait de trouver la meilleure configuration pour nos besoins. Sur le plan technique, la pose des panneaux solaires n’a pas été compliquée.
Sur les recommandations du service de l’Immobilier du Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères à Paris, qui nous a apporté son expertise, nous avons légèrement modifié les plans initiaux, afin que la structure ne repose pas directement sur le toit mais sur les piliers porteurs de la maison : en effet, nous sommes dans un pays très exposé aux ouragans, et où le risque sismique est permanent. Il était donc impératif de ne pas fragiliser le bâtiment, et de s’assurer que les panneaux ne puissent en aucun cas s’envoler !
ConsoGlobe – Quel rendement peut-on en attendre ?
David Izzo : Presque chaque jour, je vais jeter un coup d’oeil au compteur… et celui-ci oscille, bien sûr, en fonction du degré d’ensoleillement : nous produisons entre 25 et 42 KWj quotidiens et déjà 4 MGW en cumulé.
Pour l’instant, je n’ai pas souhaité mettre en place un système de batteries, capable de stocker notre production afin que nous puissions la réutiliser, la nuit par exemple ; mais l’installation pourra évoluer d’ici quelques années, lorsque les progrès technologiques permettront ce type d’installation sur des maisons individuelles, avec des conditions de maintenance et d’entretien le plus simples possibles ; ce n’est pas encore le cas au Salvador.
ConsoGlobe – Est-ce un investissement rentable sur le plan financier ?
David Izzo : Il est immédiatement rentable, pour l’État français, grâce au mécénat. En effet, le coût d’installation a été entièrement pris en charge par l’entreprise NEOEN. La durée de vie des panneaux étant d’au moins vingt ans, l’investissement sera forcément positif sur le long terme.
Mais surtout, il permet d’économiser le « coût carbone » et de produire une énergie renouvelable, apportant ainsi notre modeste contribution à la lutte contre le réchauffement climatique. C’est un projet qui s’inscrit dans le plan « Ambassade Verte » de la France de manière concrète, et à ma connaissance il n’en existe pas d’autres de ce type sur le continent américain.
Mais mon objectif initial était plus large : il s’agissait surtout de positionner notre pays, notre diplomatie, comme leader sur le terrain des énergies renouvelables, dans un pays où le changement climatique a des effets particulièrement sévères et dévastateurs. Dans la continuité de l’Accord de Paris de 2015 et du One Planet Summit de 2017, nous devons montrer qu’au-delà des grandes installations industrielles, des initiatives individuelles, plus simples à mettre en oeuvre peuvent être efficaces !
Enfin, le projet a une portée symbolique : le fait d’être posés sur le toit d’une Ambassade donne aux panneaux une plus grande visibilité !
ConsoGlobe – Avez-vous d’autres projets dans ce domaine ?
David Izzo : Oui, toute notre équipe, tant du côté français que salvadorien, est mobilisée pour développer de nouvelles initiatives écologiques. À partir de janvier 2019, nous bannirons l’usage de produits en plastique à usage unique : cela n’a pas été trop difficile à adopter car des alternatives simples existent ; les difficultés apparaissent lorsque le plus évident a été fait et qu’il faut changer ses habitudes, modifier certains comportements…
Par la suite, je souhaite mettre en place un système de captation et de stockage des eaux de pluies : le Salvador connait une longue saison des pluies, suivie par plusieurs mois sans aucune précipitation ; récupérer l’eau permettrait donc d’exploiter au mieux cette ressource abondamment et gratuitement disponible ! Cela nous sera d’autant plus facile qu’une part importante de notre coopération bilatérale au développement du Salvador est justement axée sur l’accès à l’eau pour tous, notamment au travers d’un programme baptisé « Techo y Agua » : nous fournissons des systèmes de captation d’eau de pluie à plusieurs centaines d’écoles, qui n’ont pas d’accès aux sources d’eau potable.
Vous savez, nous sommes dans la région du monde où la culture maya s’est développée, à l’époque précolombienne : elle a encore à nous apprendre en matière d’écologie ! Ainsi, les Mayas avaient développé des techniques sophistiquées pour conserver l’eau de pluie et la réutiliser à la saison sèche, en construisant de grands bassins de rétention. Pour eux c’était un enjeu vital, existentiel… La pratique s’est ensuite perdue, nous aimerions au moins la ressusciter à l’Ambassade : ce sera notre petite contribution à la réduction du stress hydrique que connaît le pays, et qui, malheureusement, commence à devenir préoccupant.