4 ans après Fukushima, le Japon relance le nucléaire pour de bon

Rédigé par Eddy Samony, le 4 Sep 2015, à 10 h 03 min
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A la suite du redémarrage du réacteur Sendai 1 le mardi 11 août dernier à l’extrême sud-ouest de l’Archipel, à Satsumasendai, l’exploitant Kyushu Electric Power devrait poursuivre dans les semaines à venir la relance de l’activité nucléaire au Japon. Le réacteur 2, validé lui aussi par l’Autorité de régulation nucléaire, pourrait produire de l’électricité d’ici la fin du mois de septembre, concrétisant une nouvelle fois les espoirs du gouvernement de Shinzo Abe, en proie à de grandes difficultés économiques et à des records d’émissions de CO2 depuis l’arrêt du parc nucléaire national.  

Depuis Fukushima : une balance commerciale en berne

Fortement fragilisée depuis 2011 et les événements de Fukushima, l’économie japonaise a souffert pendant ces quatre dernières années d’une balance commerciale largement déficitaire en raison d’une augmentation significative de ses importations d’hydrocarbures.

Le Japon produisait avant 2011 près de 29 % de son électricité à partir de l’énergie nucléaire, avec 46,8 gigawatts de capacités installées, ce qui en faisait la troisième puissance nucléaire civile mondiale derrière les Etats-Unis et la France. Disposant de peu de ressources naturelles, l’Archipel a depuis fait tourner ses centrales thermiques à plein régime suite à l’arrêt en 2013 de l’ensemble de son parc nucléaire, augmentant du même coup considérablement ses importations de pétrole et de gaz naturel liquéfié.

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Le déficit commercial du Japon s’élevait à hauteur de 24 milliards d’euros pour 2011, et a atteint un record de 97 milliards d’euros pour l’année 2014, malgré la baisse des prix du pétrole. Une situation intenable sur le long terme pour le Premier ministre japonais Shinzo Abe, fervent partisan de l’énergie nucléaire, malgré les réticences encore vives de l’opinion publique. Pour lui, seul un retour progressif du nucléaire est en mesure aujourd’hui de stopper l’hémorragie des dépenses énergétiques.

Un bilan carbone catastrophique

Le Japon a présenté ces dernières années un bilan carbone catastrophique avec plus de 1,408 milliard de tonnes d’équivalent CO2 en 2014, soit presque le record d’émissions du pays de 2007, à 1,412 milliard de tonnes, et en grande partie dû à la production thermique d’électricité.

Le retour de l’énergie nucléaire fait donc également partie intégrante du nouveau plan japonais de réduction des émissions de gaz à effet de serre, présenté le vendredi 17 juillet dernier à l’Organisation des Nations Unies en prévision de la Conférence mondiale sur le changement climatique de Paris organisée en décembre prochain.

Le Japon s’est formellement engagé à réduire ses émissions de GES de 26 % d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2013. Cette diminution correspondrait à un niveau d’émissions d’environ 1,04 milliard de tonnes d’équivalent CO2 en 2030. Des objectifs qui collent aux prévisions annoncées à la fin du mois d’avril dernier par le gouvernement et qui déçoivent une nouvelle fois la communauté internationale. Pour rappel, le Japon s’était déjà retiré du Protocole de Kyoto pour la période 2013-2020, reléguant ainsi clairement la lutte contre réchauffement climatique au second plan de ses priorités.

Accompagner le développement des énergies renouvelables

Le redémarrage de Sendai 1 n’est donc qu’un début pour le gouvernement nippon qui entend bien poursuivre dans cette voie et multiplier les remises en service d’ici l’année prochaine.

Si le calendrier de relance du nucléaire japonais reste encore incertain, le réacteur Sendai 2 pourrait redémarrer en septembre, et trois autres réacteurs pourraient suivre d’ici la fin de l’année. Au total, une vingtaine de réacteurs pourraient être reconnectés au réseau tandis que les tranches les plus anciennes, celles ayant commencé à produire dans les années 1970 et 1980, resteraient à l’arrêt.

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Le premier ministre Shinzo Abe milite depuis plusieurs années maintenant pour une relance de l’ensemble des centrales nucléaires japonaises validées par l’autorité de régulation et un retour du nucléaire à hauteur de 20 à 22 % du mix énergétique d’ici à 2030. Cette proportion permettrait de réduire les importations de pétrole et de gaz naturel liquéfié, de diminuer les prix de l’électricité pour les consommateurs, en hausse de 20 % ces dernières années, et d’accompagner progressivement le développement des énergies renouvelables.

Pour respecter ses engagements climatiques, le Japon devra développer ses énergies renouvelables, en faisant grimper la part du solaire, de l’éolien ou de l’hydroélectricité de 10 % actuellement à plus 22-24 % de la production électrique à l’horizon 2030.

Fukushima : le durcissement des règles de sûreté nucléaire

Si ces préoccupations économiques et environnementales justifient pour le gouvernement le retour à l’énergie nucléaire, rien n’aurait été possible sans l’adaptation de cette installation aux réglementations de sûreté nucléaire instaurées par la nouvelle Autorité nationale de régulation nucléaire (NRA). Plus puissante et plus indépendante que la précédente, cette institution contrôle désormais tout le processus de vérification et a effectué de nombreux tests de sécurité préalables avant de valider le redémarrage de la centrale de Sendai.

Selon ces nouveaux critères d’exploitation mis en place en juillet 2013, chaque réacteur doit subir une série d’examens poussés et d’importants travaux de mise aux normes financés par les exploitants. Ces nouveaux standards imposent notamment la construction d’équipements de sécurité pour faire face aux catastrophes naturelles et éviter ainsi un second Fukushima.

Un effet international

La résonance de la catastrophe japonaise de 2011 ne s’est d’ailleurs pas arrêtée aux frontières de l’archipel et aura eu une incidence significative sur l’ensemble de l’industrie nucléaire mondiale. En France par exemple, EDF a mis en place suite à la demande de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) des moyens provisoires de secours sur ses différents sites nucléaires : implantation de moteurs diesel destinés à pallier à une éventuelle rupture de l’alimentation électrique, création de FARN, la Force d’action rapide nucléaire…

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Elle entend d’ici 2020 ajouter des moyens supplémentaires en eau et électricité et renforcer les dispositifs de sécurité actuels via l’installation de systèmes de refroidissement ultime des générateurs de vapeur.

EDF a prévu de consacrer plus de 10 milliards d’euros à l’installation de l’ensemble des équipements post-Fukushima, soit environ un cinquième du budget consacré aux opérations du « grand carénage », programme de modernisation du parc nucléaire français entrepris par l’électricien dans l’espoir de prolonger sa durée d’exploitation.

Une relance perturbée

Le réacteur japonais a finalement délivré ses premiers kilowattheures le vendredi 14 août et devait produire à pleine puissance en septembre, selon un communiqué publié par l’exploitant Kyushu Electric Power. C’était toutefois sans compter sur le nouvel arrêt du réacteur le vendredi 21 août dernier suite à un problème dans une pompe du système de refroidissement secondaire de l’usine. Experts et régulateurs avaient en effet prévenu que le redémarrage, lancé après quatre ans d’arrêt, pourrait se heurter à des difficultés.

Selon les ingénieurs de Kyushu Electric, le problème aurait été provoqué par une infiltration d’eau de mer dans l’une des pompes du circuit de refroidissement secondaire, où la vapeur qui entraîne les turbines et produit de l’électricité est refroidie. Une difficulté qui ne devrait pas remettre en cause le redémarrage à long terme du réacteur mais qui ne rassurera pas, c’est certain, une opinion publique déjà très réticente à la reprise de l’activité nucléaire sur le territoire national.

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2 commentaires Donnez votre avis
  1. Qu’est ce qu’on peut dire ?:( . L’humain dans toute sa splendeur …c’est navrant .

  2. Très mauvais article :

    – ce n’est pas « Le Japon » qui voudrait relancer le nucléaire mais le pouvoir politique japonais

    – il n’y a aucune « relance du nucléaire », encore moins « pour de bon » : il y a juste la tentative de relancer un seul réacteur, et ça se passe très mal ! (opérations stoppées en urgence 6 jours après le début, cf :
    http://www.lesechos.fr/monde/asie-pacifique/021273865527-le-japon-suspend-le-redemarrage-de-sa-centrale-nucleaire-1146734.php )

    – se renseigner avant d’écrire : il apparait que ce sont au maximum 7 réacteurs qui pourraient éventuellement refonctionner (et encore, vu les pépins à Sendai, et les procédures citoyennes en justice ça semble improbable)
    cf http://www.actualites-news-environnement.com/34879-energie-nucleaire-Japon.html

    – du coup, le nucléaire pourra au mieux revenir à 3 ou 4% de l’électricité japonais (et non du « mix énergétique », erreur de débutant : 5% de l’électricité correspond environ à 1% du mix énergétique)

    Pas facile de faire de la propagande pronucléaire sans écrire n’importe quoi…

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