« Jamais la condition animale n’a occupé une place aussi importante dans le débat public. C’est devenu un vrai enjeu de société, une préoccupation croissante des Français » a confié la Présidente de la Fondation 30 millions au magazine Sciences et Avenir. Émanant d’une demande de plus en plus forte de l’opinion publique et des associations, le Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Didier Guillaume, a présenté le 28 janvier dernier, ses mesures pour la protection et l’amélioration du bien-être animal.
Le gouvernement veut agir en faveur du bien-être animal
Les mesures présentées mardi matin par Didier Guillaume viennent « compléter et renforcer l’arsenal juridique déjà en vigueur » votées dans la loi agriculture et alimentation en 2018 (ou loi EGALIM), telles que l’extension du délit de maltraitance à certaines activités, l’interdiction de mise en production de tout nouveau bâtiment d’élevage de poules pondeuses en cages ou l’expérimentation de la vidéosurveillance dans les abattoirs volontaires qui a fait couler beaucoup d’encre.
Parmi les principales mesures du plan gouvernemental, on retrouve :
- l’interdiction de la castration à vif des porcelets dès la fin 2021 et au broyage des poussins mâles, pour moins de pratiques douloureuses dans les élevages.
- La consolidation dans l’enseignement agricole dès septembre 2020, et la nomination d’un référent en charge du bien-être animal pour les élevages de volailles et de porcs dès le 1er janvier 2022.
- Le renforcement des conditions de transport des animaux vivants avec une augmentation des contrôles au chargement notamment, en habilitant des vétérinaires privés dès 2020. Parallèlement, les sanctions en cas de non-respect de la réglementation européenne seront renforcées.
- Le renforcement de l’action gouvernemental contre les abandons d’animaux de compagnie, notamment en prévenant les achats impulsifs dès 2020.
La France entend également mener ce combat au niveau européen que ce soit pour l’information des consommateurs avec la mise en place d’un étiquetage relatif aux modes d’élevage et au bien-être animal ou, au niveau de la PAC pour les bâtiments d’élevage « favorisant l’expression naturelle des comportements des animaux d’élevage ».
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Bien-être animal : mesures insuffisantes, selon les défenseurs des animaux
Bien que les associations saluent la volonté de progresser en faveur du bien-être animal (c’est la première fois qu’un Ministre présente des mesures visant à améliorer le bien-être animal), elles restent déçues par ces « effets d’annonces » n’apportant aucune nouveauté. Elles dénoncent des mesures « insuffisantes » et « peu ambitieuses » en faveur de la condition animale.
L214 déplore l’absence d’inscription dans la loi de l’interdiction du broyage des poussins, le vide juridique concernant les conditions d’abattage des animaux ou encore la suppression des conditions d’abattages reconnues comme douloureuses.
Pour Anissa Putois chez PETA, « ces mesures sont très insuffisantes et n’épargnerons pas aux animaux élevés pour la consommation les souffrances quotidiennes et la mise à mort violente qui leur sont réservées. Durant une année encore, des porcelets seront douloureusement castrés sans antidouleurs et des poussins mâles de l’industrie de l’oeuf seront broyés vivants. Et ce ne sont pas les seules souffrances subies par les animaux dans les élevages et abattoirs : des bébés sont arrachés à leurs mères – celles-ci inséminées de force et à répétition – des milliers d’individus vivent parqués dans des conditions insalubres et aucun ‘bâtiment’ ne peut leur donner une vie méritant d’être vécue, ni leur éviter la fin terrifiante et sanglante qu’ils subissent. Ces animaux ressentent, comme nous, la douleur, la joie, la peur. Nous nous devons de les traiter comme les êtres sensibles qu’ils sont et non comme des marchandises, à élever et à tuer pour le profit ».
Quid des animaux de compagnie ?
Conscient de l’impact du bien-être animal sur l’électorat – le Parti animiste a recueilli 2,2 % des voix aux élections européennes de 2016 -, le Premier Ministre a confié au Député Loic Dombreval, vétérinaire de formation, une mission de 6 mois pour mener une réflexion sur le thème des animaux de compagnie.
Pour des mesures plus concrètes afin d’endiguer la vague d’abandons de milliers de chiens, chats et autres animaux dans l’Hexagone, principalement due à l’achat en animalerie, en ligne, et auprès d’éleveurs peu scrupuleux, il faudra attendre : un texte réglementaire devrait permettre de sanctionner l’absence d’identification des chiens et chats. La vente « dans les véhicules » serait interdite, et celle dans les foires et expositions uniquement possible en présence d’un vétérinaire. On est encore loin de la Californie, où les animaleries ne peuvent proposer que des animaux issus des refuges…
Pour démontrer qu’on a « du coeur et de l’émotion », faut-il suivre le conseil du Ministre Gérald Darmanin ? Selon le Canard enchainé, il aurait proposé en Conseil des Ministres à la mi-janvier : « plutôt que de mettre des choses compliquées sur vos comptes Twitter ou Instagram, mettez des photos de chats et de chiens et vous verrez ça ira mieux ! »
Toute personne souhaitant réellement mettre fin à la souffrance animale ne devrait-elle pas plutôt s’engager et inciter son entourage, à ne jamais acheter un animal et de privilégier l’adoption en refuge ? Voire encore agir à travers ses choix de tous les jours, en laissant les produits issu de l’exploitation des animaux hors de son assiette ?
Illustration bannière : Jeune enfant dans un champ – © Margo Sokolovskaya