La France est depuis longtemps le pays de la révolution démocratique et des attentes insatisfaites en la matière. Dès son origine, la démocratie fait face à des interrogations et complications. Ainsi, en septembre 1789 voit-on se multiplier les protestations contre les « aristocrates de la représentation ».
Mais aujourd’hui cette défiance augmente. Il y a un peu moins d’un an, les Français disaient à 32 % qu’ils n’estimaient plus la démocratie à même de répondre à leurs besoins, une progression spectaculaire par rapport à 2016. Cette année, le 9e baromètre annuel de la confiance politique en France révélait que seuls 64 % des jeunes Français (18-24 ans) estiment que la démocratie est « quand même mieux que n’importe quelle autre forme de gouvernement ». Mais alors, que veulent les Français, la dictature ?
Les Français, démocrates frustrés
On apprend maintenant que la France est une démocratie plus que jamais imparfaite : poids trop important du Président dans les institutions, culture civique et participation citoyenne insuffisante, lois menaçantes pour la liberté de la presse, polarisation de la société… le verdict du Democracy Index 2017 est sévère pour la France, qui glisse de la 24e à la 29e place des démocraties dans le monde, loin du top 5 % des « démocraties accomplies ».
Il n’y a là aucune fatalité. La France peut se ressaisir, et les Français en sont demandeurs. Certes, ils sont déçus, mais en attente de mieux de démocratie, pas moins. À cet égard, ils rejoignent leurs voisins, même si le diagnostic et les attentes varient d’un pays à l’autre. Dans une autre étude parue récemment, la Fondation pour l’Innovation Politique montrait que la France, comme d’autres pays méditerranéens et d’Europe de l’est, est pessimiste sur la démocratie.(1)
Mais là où les Français se distinguent, c’est que quand on leur donne le choix entre un gouvernement technocratique, autoritaire ou plus participatif, les Français choisissent à leur très grande majorité (67 %) la participation.(2)
- Un gouvernement « technocratique », sans élus ni hommes politiques, par lequel des « experts » mettraient en oeuvre une politique « dictée par les citoyens » ;
- Un gouvernement « autoritaire », où « un chef élu par le peuple » prendrait « toutes les décisions avec une équipe restreinte », « rapidement et sans intermédiaires » ; et
- Un gouvernement « participatif », où des « groupes de citoyens » décideraient de programmes politiques dont ils vérifieraient a posteriori l’application.
Les Français sont à cet égard beaucoup plus optimistes et volontaires que leurs voisins, notamment d’Europe de l’Est. En effet, en Europe centrale et orientale, 46 % des citoyens souhaitent voir leur pays dirigé par un « homme fort ».
On en retiendra que les Français croient encore en la démocratie et sont en attente d’implication, et que l’on ferait bien de ne pas ignorer les analyses telles que celle du Democracy Index soulignant les progrès à faire en France en la matière, car il y a fort à parier que si l’attente de participation n’est pas entendue, l’alternative qui sera attendue sera celle du gouvernement autoritaire aussi chez nous.
À cet égard, les débats au sein de l’Assemblée Nationale pour la réforme de la Constitution, la volonté d’associer les citoyens au débat européen et d’autres consultations sont des signaux intéressants, mais qui seront insuffisants s’ils n’impliquent pas réellement les citoyens dans la décision, selon des protocoles méthodologiques rigoureux. Méfions-nous de la participation gadget et du bling bling démocratique et prenons cette attente au sérieux, et pas uniquement avec les outils numériques.
je me méfie du bling bling démocratique