Après la plainte de l’ancien cadre d’EDF, une information judiciaire a donc été ouverte pour « non-déclaration d’incident ou d’accident », « mise en danger d’autrui » et « faux et usage de faux » notamment.
Centrale de Tricastin : la direction voulait obtenir un taux d’accidentologie inférieur au taux réel
Les dissimulations opérées par la direction de la centrale nucléaire de Tricastin (Drôme) se révèlent aujourd’hui au grand jour. Selon Me Vincent Brengarth, avocat de l’ex-cadre d’EDF ayant travaillé au sein de cette centrale et ayant porté plainte, EDF avait une politique de minimisation des accidents de travail pour obtenir un taux d’accidentologie inférieur au taux réel. « La manière dont ces incidents avaient été déclarés s’inscrivait dans une politique plus globale », affirme Me Vincent Brengarth sur RFI le 9 juin 2022. Les faits étant restés non déclarés ou faussement déclarés ont notamment été la surpuissance du réacteur n°1 en juin 2017 et une inondation interne le 29 août 2018 sur la tranche n°3.
Ces faits, survenus entre début 2017 et fin 2021, constituent potentiellement des infractions au Code pénal et au Code de l’environnement. Le pôle Santé du Procureur de la République de Marseille a retenu 12 chefs d’accusation, parmi lesquels « déversement dans l’eau par violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence d’une substance entraînant des effets nuisibles », « mise en danger d’autrui par personne morale avec risque immédiat de mort ou d’infirmité par violation manifestement délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence », « non-déclaration d’incident ou d’accident par l’exploitant d’une installation nucléaire avec risque d’atteinte à la sûreté ou d’exposition significative aux rayonnements ionisants », « non-déclaration à l’autorité de sûreté nucléaire d’événement significatif », « obstacle au contrôle des inspecteurs de la sûreté nucléaire », « harcèlement moral » et « faux et usage de faux ».
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Des incidents passés sous silence par EDF pour obtenir l’autorisation décennale
La centrale nucléaire du Tricastin, mise en service en 1980 et 1981, est l’une des plus anciennes de France. En février 2021, l’ASN lui a octroyé la fameuse « autorisation décennale », l’autorisant à rester en activité même si ses réacteurs ont atteint l’âge 40 ans, qui est en principe la durée de vie maximum pour un réacteur nucléaire. D’après l’ancien cadre et lanceur d’alerte (qui souhaite rester anonyme), c’est précisément pour obtenir cette autorisation décennale que la direction de la centrale de Tricastin a minimisé, au cours des quatre années précédant l’examen de la demande, les différents incidents et accidents survenus.
« L’ouverture d’une information judiciaire pour de telles qualifications, à l’encontre d’un opérateur économique de premier plan, constitue une décision exceptionnelle. Elle ouvre la voie à une reconnaissance par la justice des faits dénoncés et ayant valu à notre client, lanceur d’alerte, de traverser un véritable calvaire depuis plusieurs années », ont fait savoir par communiqué Vincent Brengarth et William Bourdon, les deux avocats de l’ex-cadre d’EDF.
Illustrations : centrale nucléaire EDF de Tricastin – ©Shutterstock.
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