Seule une décision politique forte peut empêcher les agriculteurs d’utiliser davantage de pesticides.
Trois facteurs inciteraient les agriculteurs à utiliser plus de pesticides
Alors que le gouvernement essaie d’inciter les agriculteurs à diminuer leur usage de pesticides, objectivement, le changement climatique pourrait intensifier cette dépendance aux produits phytosanitaires, alertent Raja Chakir, Derya Keles et François Bareille, tous les trois chercheurs à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE). D’une part, parce que des températures élevées et des précipitations abondantes créent des conditions favorables pour les ravageurs (insectes, champignons et mauvaises herbes). D’autre part, parce qu’une augmentation des températures entraîne une volatilisation accrue des pesticides et que des pluies abondantes entraînent la lixiviation (ou « lessivage », en langage commun) des substances actives dans les cours d’eau. S’y ajoute un facteur psychologique : une année favorable pour la production agricole incite les agriculteurs à protéger davantage leurs cultures, augmentant ainsi l’usage des pesticides.
Les résultats obtenus par les trois chercheurs, qui ont compilé les données de ventes de pesticides issues de la Banque Nationale des Ventes des Distributeurs de produits phytopharmaceutiques (BNVD) et les données météorologiques de Météo France de 2014 à 2019, montrent que si rien ne change dans la politique nationale vis-à-vis des pesticides, leur utilisation pourrait augmenter de 5 à 15 % en moyenne en France d’ici à 2050. Cette augmentation toucherait particulièrement les fongicides et herbicides, et le pourtour méditerranéen serait particulièrement concerné, avec une augmentation de près d’un tiers de l’usage des pesticides.
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L’usage de pesticides a à peine diminué
Les chercheurs font valoir qu’à la lumière de leurs résultats, la diminution du recours aux pesticides devra être d’autant plus appuyée. Ils rappellent aussi que, comme le montrent les bilans des plans Ecophyto, jusqu’ici, les efforts déployés n’ont pas entraîné de forte diminution de recours aux pesticides.
Rappelons que malgré des objectifs ambitieux de réduction de 50 % de l’utilisation des pesticides, entre 2009 et 2022, l’indicateur NODU (Nombre de Doses Unités) a augmenté de 9 %, montrant une tendance à la hausse plutôt qu’à la diminution escomptée. Les ventes de substances actives ont également légèrement augmenté, dépassant les 68.000 tonnes en 2022. Le plan Écophyto II+, lancé en 2015, et son successeur Écophyto 2030, continuent de viser des réductions significatives. Cependant, pour atteindre les objectifs fixés, une transformation plus profonde des pratiques agricoles est nécessaire. Les experts et les acteurs du secteur plaident pour une approche agroécologique plus intégrée, qui rendrait les systèmes de production moins dépendants des pesticides tout en étant plus résilients.
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