La protection de l’environnement n’est pas seulement une idée forte pour le géant de la papeterie française : c’est une pratique quotidienne. Et depuis longtemps ! Bien avant la vague verte, les Papeteries Clairefontaine se sont préoccupées de l’environnement. Une démarche globale et historique – exemplaire, même – que nous explique Michel Febvet, le Directeur commercial de la marque.
Consoglobe : Depuis quand, et sous quelle forme, se préoccupe-t-on de l’environnement chez Clairefontaine ?
Michel Febvet : Je suis tenté de dire depuis 150 ans (l’année de la création de l’entreprise, que nous fêtons en 2008) ! Plus sérieusement, il faut distinguer deux responsabilités en matière d’environnement : la globale, à l’échelle de la planète, et la locale. C’est à ce niveau que nous sommes actifs depuis longtemps. Depuis plus de vingt ans. Nous avons souhaité ne plus polluer les rivières alentours et donc ne plus gêner les agriculteurs voisins. Nous avons monté la première station d’épuration, en 1981, bien avant les obligations légales.
Consoglobe : Le fonctionnement de l’usine a-t-il induit d’autres actions locales plus récentes ?
Michel Febvet : Oui. En 1999, nous avons créé une usine qui transforme les boues en compost, sur un site contigu à l’usine ici, à Etival. Ces boues sont issues du traitement par la station d’épuration des eaux rejetées par la fabrication du papier. Naturellement chargées de fibres, de calcaire et de matières organiques, ces boues sont transformées en compost, brun et sans odeur, comme celui que l’on trouve dans les jardineries. Les agriculteurs alentours les utilisent pour fertiliser leurs champs. Nous traitons 3 000 tonnes des boues (soit 2 % des matières perdues) qui produisent à peu près autant de compost.
Avec la station d’épuration et cette usine de compostage, nous sommes donc en harmonie avec notre environnement local.
Consoglobe : Avec une usine propre, avez-vous des actions en matière d’économie d’énergie, toujours au niveau local ?
Michel Febvet : Oui, tout à fait. Le séchage du papier demandant une grande production vapeur, et donc d’énergie, nous avons mis en place une centrale thermique de cogénération en 1995. Son principe est de réutiliser le gaz deux fois de suite. Cela permet des économies d’énergie notables. Et de participer à la protection plus générale de la planète en polluant moins.
Consoglobe : Etes-vous fabricant de pâtes à papiers ?
Michel Febvet : Non, pas du tout. Nous ne sommes ce qu’on appelle des « pâteux ». Ce n’est pas notre métier. Nous l’achetons toute faite. Avec une obligation : être 100 % sans chlore (il était utilisé pour blanchir le papier, avant que le risque de dioxyne ne soit avéré en 1985). Il faut souligner que cette volonté est partagée par la plupart des fabricants de papier. Sur ce point, je reconnais que nous n’avons pas été pionniers.
Consoglobe : Mais quel bois ces fabricants utilisent-ils pour faire leur pâte ? Avez-vous mis en place des mesures en matière de protection des forêts ?
Michel Febvet : Absolument, et c’est là certainement le plus important. Nous avons mis en place avec nos fournisseurs une politique de gestion forestière durable, certifiée par les labels FSC (Forest Stewardship Council) dès les années 90 et PESC ( Pan European Forest Certification). 95 % de nos fournisseurs sont certifiés, les 5 % restant correspondant à un fournisseur canadien qui ne fabrique pas ses pâtes directement avec des arbres, mais avec de la sciure. C’est un chiffre très important.
Consoglobe : Que répondez-vous à ceux qui accusent les fabricants de papier d’être des destructeurs de forêts ?
Michel Febvet : C’est un raccourci abominable ! Et qui est faux ! Les nombreuses publicités, pour certaines banques notamment, affirmant qu’elles font un geste pour l’environnement en n’imprimant plus leurs documents administratifs sont un leurre : il ne s’agit pas là de préserver l’environnement, mais de réduire leurs coûts ! Ce raccourci nous cause un vrai problème d’image. Car au contraire, nous préservons et assurons la pérennité de la forêt par nos méthodes de gestion durable. Il faut absolument le faire savoir.
Consoglobe : Effectivement, cela paraît logique de ne pas scier la branche sur laquelle on est assis ! Qu’en est-il de vos cahiers Clairefontaine ? Vous avez lancé des produits écologiques récemment ?
Michel Febvet : Oui, nous en proposons deux sortes : il y a d’abord le papier recyclé, avec la toute récente gamme Forever, lancée en 2007 ; et il y a aussi le papier moins épais, qui est aussi un autre geste écologique, avec la gamme Clairmail, dont le papier est à 60g au lieu de 80g (il est moins rigide, mais l’impression resto-verso est de toute aussi bonne qualité). Quant au papier Forever, il est 100 % recyclé. Il est issu de la collecte de vieux papiers dans le Nord, la Belgique et l’Allemagne, et n’est pas désancré avant d’être remis en cuve. Avec 95 % de rendement intégral, et très peu de boues de résidus, c’est le papier le plus écologique.
Consoglobe : Il y a un vrai boum du papier recyclé en ce moment. Mais tous les papiers recyclés sont-il écologiques, comme le vôtre ?
Michel Febvet : C’est vrai qu’en ce moment, la demande est supérieure à l’offre. On voit apparaître sur le marché des papiers en provenance des pays asiatiques à des prix très bas. Le problème est double : rien ne prouve qu’ils sont fabriqués de manière écologique, et leur prix associe leur fabrication à un produit bas de gamme. Or le papier recyclé n’est pas un produit bas de gamme ! Des usines ferment en ce moment en France et en Espagne à cause de cette mauvaise compréhension du public. Il ne faut pas acheter du papier recyclé parce qu’il moins cher, mais parce que c’est un acte militant, en faveur de l’environnement, comme pour tout achat de produits bio.
Consoglobe : Si le papier recyclé n’est pas encore la panacée, le papier moins blanc est-il quand même l’avenir ?
Michel Febvet : D’une manière générale, le papier n’est jamais blanc à 100 % ! Il l’est au maximum à 80 %. Vous avez raison : ce critère du blanc n’est plus en progression… car il n’y a plus de progression possible ! La course au blanc a atteint ses limites.
Nos recherches nous ont menés vers ce qu’on appelle le papier « nature », plus simple, plus proche de la couleur de la cellulose, c’est-à-dire du jaune, la couleur de la fibre de bois vierge. Le touché de ce papier est un peu plus rugueux, mais cela ne veut pas dire qu’il n’est pas élaboré ! Pour l’instant, ce produit n’existe pas pour le grand public, mais seulement en ramettes pour les imprimeurs et en enveloppe pour la bureautique. C’est une toute nouvelle gamme qui porte le nom de Dune.
Notre coup de coeur
La gamme de cahier et blocs-notes Forever. A peine plus foncée que le papier « normal ». On adore particulièrement les blocs-notes de tous les formats. Et pour la rentrée, le prix des cahiers est très intéressant.
Le plus
Quand un grand groupe se donne les moyens d’être exemplaire non seulement en matière d’écologie, mais aussi en matière d’actions humanitaires, il faut le souligner. Clairefontaine-Rhodia et les Papeteries Sill soutiennent financièrement des projets éducatifs de l’Unicef pour des enfants déscolarisés au Maroc. Une démarche cohérente qui n’oublie pas l’humain.
Voir aussi le site de Clairefontaine
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Propos recueillis par Emmanuelle, juillet 2008