En ces temps de pandémie, pas question de se faire encore la bise. Et après ? Pas sûr que l’habitude, au demeurant très française, ne revienne jamais…
Avec la crise, plus de contacts physiques
On se croirait dans un ancien roman d’Isaac Asimov, Face au feu du soleil, dont l’action se déroule sur une planète lointaine dont les habitants humains ont perdu l’habitude de tout contact physique, ne se rencontrant plus que par hologramme interposé.
En un an, la Terre est un peu devenue une autre planète elle aussi, avec des frontières fermées, des distances à la fois plus ou moins effacées, c’est selon, entre fermeture des frontières et télétravail. Et des habitudes parfois séculaires, bonnes ou mauvaises, se sont arrêtées du jour au lendemain.
Tant mieux pour la lutte contre les épidémies de grippe et de gastro-entérite : entre port du masque et lavage régulier des mains, la contagion est en chute libre. Une conséquence positive, au moins une, de la pandémie actuelle. Mais que va devenir la bise ? Port du masque et épidémie obligent, en l’absence hautement recommandée de contacts physiques, gestes barrière et distanciation physique obligent, les embrassades ont littéralement disparu du jour au lendemain.
Salut du coude et sourire du regard
Que ce soit en famille, au bureau entre collègues ou avec de parfaits inconnus, adieu la bise à jamais ? Désormais, il faut jouer des coudes, au figuré bien sûr. Tout comme la poignée de mains, la bise a disparu. Pas facile en France comme dans tous les pays de culture méditerranéenne, adeptes du contact, de la convivialité et de la proximité, où la bise faisait jusque-là partie des rituels sociaux. Avec ses spécificités régionales, le nombre de bises variant parfois d’un département à l’autre. Une, deux, trois à Montpellier, voire quatre en Bretagne ? Zéro, désormais.
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Du coup, le sourire du regard par-delà un masque dissimulant la plupart des expressions du visage vient en complément d’un salut du coude. Ces non-bises, comme les non-poignées de main doivent cependant encore faire leurs preuves pour s’imposer durablement en société. Vont-ils s’imposer dans un « monde d’après » dont on n’a in fine guère constaté l’arrivée au lendemain du premier confinement quasi planétaire ? Rien n’est moins sûr.
Vers une interdiction de la bise ?
Dans un cadre professionnel hors télétravail, la disparition de la bise, perçue comme une pratique aussi sexiste que rétrograde peut en tout cas apparaître comme une excellente nouvelle.
En sus du côté santé, la bise forcée pour les femmes, alors que les hommes peuvent simplement se serrer la main, le rituel de la bise n’est pas forcément bien vécu par les unes et les autres au quotidien.
Au-delà d’une vision de parité sur le sujet, le voyage des germes de joue en joue pourrait bel et bien sonner le glas de la bise. Et ce même si au fond elle remonte, au moins à l’osculum, la petite bouche, du temps des Romains, baiser social pratiqué lèvres fermées entre membres d’un même statut ou corporation.
De façon générale, la pandémie aura en partie inversé les rapports humains : des proches peuvent désormais être perçus comme un danger, un risque de contamination, et le corps de l’autre comme une menace.
Demain, se contentera-t-on de s’incliner à la japonaise, plus ou moins selon l’interlocuteur, éventuellement en souriant du regard ? Reste à voir par ailleurs si, de fortement déconseillée, la bise pourrait tout simplement, demain, se voir interdite, car considérée comme un comportement potentiellement à risque, dans une société hygiéniste, où la sécurité sanitaire primerait durablement sur toute autre considération.