Une étude menée par des chercheurs de l’Inra et du CNRS pendant quatre années en France a montré des rendements améliorés et des bénéfices plus élevés dans les champs de colza où abondent les insectes pollinisateurs. Les abeilles et autres membres de cette famille pourraient ainsi compenser l’utilisation de produits phytopharmaceutiques et offrir une alternative gratuite, efficace et respectueuse de l’environnement.
Les insectes pollinisateurs très rentables pour la culture de colza
Selon une étude de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), publiée dans The Royal Society Publishing, les cultures dépendantes des pollinisateurs, peuvent produire de bien meilleurs rendements que celles reposant sur l’utilisation de pesticides pour les cultures de colza(1).
#Communiqué ?️ | Des chercheurs viennent de montrer pour la première fois que la #pollinisation par les #abeilles surpassait l’utilisation de produits phytopharmaceutiques dans le rendement et la rentabilité du #colza.
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— Centre National de la Recherche Scientifique ? (@CNRS) October 9, 2019
Alors que les producteurs Français d’oléagineux ont subi une interdiction imposée par l’Union européenne d’utiliser des néonicotinoïdes en 2018, ces produits chimiques incriminés suite à la mort de nombreuses abeilles, cette nouvelle étude encourage les agro-écosystèmes durables.
C’est la première fois qu’une telle étude analyse la pollinisation par les abeilles en comparaison aux produits phytopharmaceutiques. Selon l’Inra, l’intérêt d’utiliser des pesticides est bien plus faible que de faire appel aux abeilles. Les pesticides n’augmentent pas suffisamment la productivité afin de compenser leur coût.
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Des marges 15 % supérieures
Les chercheurs ont observé des rendements plus importants obtenus soit en augmentant les produits agrochimiques, soit en augmentant l’abondance des abeilles, mais les rendements économiques des cultures ont été augmentés uniquement par les pollinisateurs.
Pour démontrer cela, ils ont étudié 294 parcelles agricoles des Deux-Sèvres entre 2013 et 2016. Les scientifiques ont analysé les variétés de colza, les engrais et les pesticides ainsi que les résultats économiques. Ils ont noté que les pesticides (insecticides, herbicides et fongicides) n’augmentaient pas les rendements économiques et que leurs coûts pesaient dans les comptes des agriculteurs.
Les résultats de l’étude ont montré des marges brutes supérieures de 15 % en moyenne pour les champs de colza comportant de nombreuses abeilles. Ils ont noté que les rendements et les marges brutes allaient jusqu’à 40 % là où il y avait une abondance de pollinisateurs.
Vincent Bretagnolle, directeur de recherche aux CNRS de Chizé a expliqué au micro de France3 : « le rendement du colza est déterminé par la quantité de fleurs qui vont devenir des fruits et cette quantité est déterminée par la pollinisation. La pollinisation par les insectes et notamment les abeilles est capable d’augmenter cette transformation de fleurs et de fruits de 40 % donc il y a plus de fruits et de grains sur un même pied ». Cela représente un gain de 119 à 289 euros par hectare en comparaison aux zones qui ne comptent pas d’abeilles.
Développer l’agroécologie
La France est le premier producteur de colza dans l’Union européenne. Cette plante sert à produire de l’huile utilisée pour la cuisson, mais aussi comme matière première pour le biodiesel. À l’avenir, l’étude pourrait amener les agriculteurs à se tourner davantage vers l’agroécologie qui consiste à prendre en compte les milieux naturels dans la conception des systèmes de production. D’autres études du CNRS pourraient désormais porter sur des céréales comme le lin et les féveroles.
En comprenant comment les pratiques agricoles fragilisent les écosystèmes, il est possible de proposer des solutions pour prendre un virage écologique. D’ailleurs, la nouvelle politique agricole commune (PAC), pourrait s’orienter davantage vers l’agroécologie et valoriser les interactions biologiques positives.
Le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, a lancé jeudi 17 octobre, une concertation afin de définir la future PAC. La réforme de la PAC 2021-2027 devra sans aucun doute être à la hauteur des enjeux environnementaux, mais aussi économiques.
Illustration bannière : Abeille butinant une fleur de colza – © thka