Les Amis de la Terre France et ActionAid France-Peuples Solidaires publient un rapport sur le devoir de vigilance des multinationales, un dossier encore peu connu du grand public.
La « loi Rana Plaza » : un arsenal juridique ambitieux
Six mois après la promulgation en France de la loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères et des entreprises donneuses d’ordre, les ONG s’inquiètent du fait que cette dernière puisse rester lettre morte. Deux d’entre elles publient donc un rapport expliquant son contenu, ses points forts et ses points faibles, en donnant des exemples concrets de cas où cette loi peut désormais être invoquée.
La « loi Rana Plaza », comme on l’appelle souvent en souvenir de l’effondrement, en avril 2013 au Bangladesh, de la fabrique de textile du même nom (1.134 victimes), est censée rendre les entreprises françaises responsables des agissements de leurs filiales, sociétés contrôlées, sous-traitants et fournisseurs, en France comme à l’étranger. Désormais, la responsabilité de la société-mère (ou entreprise donneuse d’ordre) peut être engagée pour des actes commis par ses filiales ou sous-traitants.
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Des délits relevant des droits humains et des libertés fondamentales, de la santé et de la sécurité des personnes, ainsi que les dégâts environnementaux qui pourraient être commis par les sociétés liées, peuvent désormais être imputés aux sociétés-mères ou donneuses d’ordre de droit français. Leur responsabilité peut être invoquée auprès d’un tribunal français même si le plaignant réside à l’étranger.
Loi Rana Plaza : les ONG pointent des lacunes et des pressions de lobbies
Si la promulgation de cette loi constitue une avancée majeure, tout n’est pas rose pour autant. À titre d’exemple, cette loi concerne uniquement les entreprises de plus de 5.000 salariés en France, ou plus de 10.000 salariés dans le monde. Ainsi, certaines entreprises relevant de secteurs à risque (extractif ou textile par exemple) ne sont pas concernées. Par ailleurs, la loi est silencieuse sur la question des salariés des franchises, notamment sur le fait qu’ils soient inclus ou non dans les seuils des 5.000 et 10.000 salariés. Lors d’un procès, la charge de la preuve incombe par ailleurs toujours aux plaignants.
Pour lire le rapport, rendez-vous sur le site des Amis de la Terre
Les Amis de la Terre France et ActionAid France-Peuples Solidaires rappellent également que cette loi, dont le projet a été déposé en novembre 2013, n’a pu être promulguée qu’en mars 2017. En cause, les lobbies comme l’AFEP (Association française des entreprises privées) et le MEDEF, qui s’opposaient à toute régulation contraignante des activités des entreprises. « Au travers de pressions sur le gouvernement et sur les parlementaires, ils ont réussi à ralentir à maintes reprises le processus, et à affaiblir le contenu du texte« , font savoir les auteurs du rapport.
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