Vous décidez de vendre un logement. Doté d’un chauffage fuel et bénéficiant d’une étiquette énergie classe C, vous décidez de profiter de la transaction pour le rénover. Vous apportez quelques améliorations à l’isolation et optez pour un chauffage électrique. Pourtant, suite au Diagnostic de Performance Energétique obligatoire avant la vente, l’étiquette énergie du logement est passée en catégorie D ! Comment est-ce possible ?
Ce déclassement ne signifie pas que la facture sera plus élevée ou que la qualité de l’appartement s’est dégradée, mais résulte d’une incompréhension de la nature de l’indicateur de consommation annuelle porté sur l’étiquette énergie.
Pour comprendre l’explication, bien faire la différence entre énergie primaire et finale
L’indicateur de consommation annuelle est évalué en énergie primaire par m2 et par an (kWhep /(m2.an) mais la mention EP (Energie Primaire) n’apparait hélas pas toujours clairement.
Energie primaire definition courte
L’énergie dite « primaire » est l’énergie prélevée dans l’environnement qui sera ensuite transformée et transportée pour mettre à disposition une certaine quantité d’énergie dite « finale » dans votre logement, celle que vous consommez et qui vous est facturée.
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Dans l’exemple ci-dessus, il s’agit d’énergie primaire électricité. Et comme nous sommes en France, l’énergie primaire utilisée pour produire l’électricité est constituée de combustible nucléaire, de gaz, fuel ou charbon (centrales thermiques), et d’un peu d’énergie renouvelable (majoritairement barrages hydrauliques).
L’énergie se transforme dans de multiples formes
Imaginons alors les transformations nécessaires pour « fabriquer » à partir d’un combustible fossile ou nucléaire 1 kWh d’électricité mis à disposition sur votre tableau électrique :
- Les combustibles sont brulés.
- La chaleur produite sert à faire bouillir de l’eau pour produire de la vapeur.
- La vapeur actionne une turbine.
- La turbine entraine un alternateur qui produit l’électricité.
- L’électricité est transportée depuis la centrale, traverse des transformateurs pour finalement être régulée en 220V 50 Hz puis mise à disposition chez vous.
Au cours de ce périple, l’énergie primaire a subi des transformations qui ont occasionné de nombreuses pertes, essentiellement sous forme de chaleur.
Ce qui se passe derrière votre prise de courant est important
Le facteur de conversion énergie primaire/énergie finale exprime dans ce cas combien de kWh d’énergie sous forme de combustible fossile ou nucléaire ont du être prélevés pour fabriquer 1 kWh d’électricité. Concrètement ce facteur de transformation dépend des moyens de production mis en oeuvre, appelé « mix énergétique ».
Dans les calculs réglementaires, on utilise une valeur moyenne qui reflète le rendement « global » de l’outil de production de l’électricité. Dans l’Hexagone, il est actuellement de 2,58 pour l’électricité et de 1 pour le gaz ou fuel. Ainsi donc, en passant au chauffage électrique, même si votre consommation d’énergie finale a baissé, l’indicateur d’énergie primaire se trouvera multiplié par ce coefficient.
Le choix de la forme d’énergie n’est pas neutre
Pourquoi brûler du gaz avec toutes ces pertes pour produire de l’électricité destinée à votre chauffage, si au final vous auriez pu produire 2,58 fois plus de chaleur pour votre logement en brûlant le gaz directement chez vous ?
Tout simplement pour votre budget : si votre chauffage électrique est plus performant que votre ancienne chaudière et permet une régulation plus fine, cela vous coutera peut-être moins cher en entretien, etc. Concilier préoccupations économiques et environnementales est donc tout sauf simple.
Un paradoxe au coeur d’une bataille juridique
Avec l’avènement d’une nouvelle réglementation (passage de RT 2012 à la RE2020), l’ajustement de ce coefficient est soumis à d’âpres négociations !
L’Union française de l’électricité (UFE) milite pour une baisse du coefficient, considérant que les systèmes de chauffage gaz sont trop avantagés, qu’il faut anticiper l’évolution prévue du mix énergétique et que l’usage de l’électricité est une piste majeure d’évolution vers la neutralité carbone.
La Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) a considéré un ajustement à un facteur de 2,1 puis 2,3.
La filière gaz dénonce cette tentative de retour du chauffage électrique conduisant à augmenter les besoins de puissance électrique en hiver et donc à solliciter des centrales thermiques ou à importer de l’électricité produite par des centrales à charbon.
L’Union européenne et l’association NégaWatt indiquent que le facteur « représentatif de la structure actuelle (2018) de production d’électricité en France » serait plus proche de 2,7.
À ce débat difficile sur le coefficient de conversion EP/EF, s’ajoute celui également très polémique de l’impact carbone réel de l’électricité nucléaire.
Quoiqu’il en soit, pour réduire la consommation d’énergie primaire et la facture, la meilleure stratégie reste de diminuer sa consommation par tous les moyens tout en prenant conscience de la réalité des impacts de la chaine de production. La seule énergie réellement propre est celle qu’on ne consomme pas !
Illustration bannière : Faire la différence entre énergie primaire et énergie finale – © maradon 333
Bonjour,
Si j’ai bien compris l’énergie primaire fossile ou nucléaire, d’une part est toujours sous forme de chaleur, d’autre part vient en totalité en positif dans l’équilibre thermique de notre globe, l’énergie finale étant rejetée sous forme de chaleur après usage. L’effet de serre est lui aussi positif puisque les GES forment en quelque sorte un isolant empèchant le rejet de la chaleur excédendaire (solaire + primaire). On ne parle jamais du 1er poste.
Est-il négligeable par rapport à l’empreinte carbone ?