Quand on parle de biodiversité française on a souvent tendance à oublier combien est vaste notre territoire et donc combien est vaste le travail de protection des espèces qui en relève ! Deuxième surface maritime au monde avec de nombreux territoires d’Outre-mer, que représente notre propre biodiversité et comment mieux la connaître ?
Notre biodiversité française en chiffres
Le besoin de données sur la biodiversité française (et mondiale) est bien connu des professionnels. Ce sont les clés d’entrée d’une connaissance plus approfondie des espèces que nous côtoyons et que nous nous devons de préserver.
Voici les derniers chiffres concernant la biodiversité française et datant de août 2021 (Certaines espèces peuvent être présentes à la fois en métropole et en outre-mer, elles sont donc comptabilisées pour chacun des territoires).
Espèces | Nombre total |
Nombre en métropole |
Nombre Outre-Mer |
— | — | — | — |
Toutes confondues | 194.480 | 100.436 | 91.783 |
— | — | — | — |
Amphibiens | 180 | 44 | 137 |
Araignées | 2.749 | 1.700 | 1.077 |
Champignons | 10.926 | 9.720 | 1.559 |
Coléoptères | 23.469 | 10.969 | 12.780 |
Crustacés | 10.019 | 4.408 | 5.909 |
Libellules et demoiselles | 477 | 97 | 393 |
Lichens | 4.390 | 3.146 | 1.563 |
Mammifères | 435 | 161 | 320 |
Mollusques | 12.180 | 1.978 | 9.977 |
Mousses | 3.621 | 1.279 | 2.632 |
Oiseaux | 1.766 | 599 | 1.440 |
Papillons | 14.056 | 5.577 | 8.632 |
Poissons | 5.777 | 846 | 5.142 |
En France ce sont environ 650 nouvelles espèces qui sont décrites chaque année (dont 84 % Outre-mer) et la plupart du temps par des personnes qui ne sont pas professionnelles du secteur.
L’effort alloué à la découverte et donc la description de nouvelles espèces sur notre territoire mériterait bien plus de fonds, et quoi qu’il en soit, de maintenir l’effort.
Les uniques
Les espèces dites endémiques, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs que sur un territoire précis, sont des espèces à fort enjeu. D’une part parce qu’elles sont de fait plus sensibles aux bouleversements (de leur milieu, aux changements climatiques ou autres catastrophes qu’elles soient naturelles ou non. D’autre part, elles représentent une adaptation et un historique évolutif assez précis pour que la science y trouve un immense intérêt.
La France compte actuellement 21.234 espèces endémiques dont 16 % se trouvent en métropole. Se sont donc en moyenne 84 % des espèces des territoires d’Outre-mer qui sont endémiques, avec un record pour la Nouvelle-Calédonie où 56 % des espèces le sont !
Quid de l’état de santé de notre biodiversité
Afin de mettre les choses en perspective, notamment par rapport au fait que 10 % des espèces au monde sont sur notre territoire, il faut tout d’abord savoir que la France est le 6e pays hébergeant le plus grand nombre connu d’espèces menacées selon la liste rouge de l’UICN.
Plus de 128.000 espèces ont pu faire l’objet d’un travail d’évaluation de leur état de santé dans le monde. Plus de 35.00 sont considérées comme en danger. Rien qu’en France, où plus de 13.800 espèces évaluées, on dénombre plus de 2.400 espèces menacées, et 7.259 espèces protégées sur au moins une partie du territoire.
À titre d’exemple en Métropole, se sont 19 % des poissons d’eau douce qui sont en danger, 13 % des requins, raies et chimères ou encore 11 % des mollusques continentaux.
Qu’en est-il de la répartition de toutes ces espèces ?
Alors que nous sommes un pays qui est censé être à un très bon niveau de connaissance de notre territoire, il y a peu nous n’avions de données sur la répartition des espèces de notre territoire que pour 33 % d’entre elles à peine. En Outre-mer cette proportion tombait à 23 % !
D’après l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN d’où ces chiffres sont tirés), 66 % des groupes d’espèces ont une répartition mal connue en métropole.
Aujourd’hui, on ne dispose de données que pour 55 % des espèces de métropole et seulement 44 % outre-mer !
Ces chiffres sont assez effrayants au regard du besoin que l’on a de savoir où sont présentes les espèces. Car, en effet, avoir un réel état des lieux de la répartition des espèces est un outil indispensable à la mobilisation d’outils pour les préserver.
Réglementation de l’urbanisme, élaboration de réserves naturelles nationales ou régionales, limitation des infrastructures routières et de leur impact sur la faune sauvage, incitation aux pratiques agricoles respectueuses de l’environnement… Les dispositifs pour favoriser et préserver la biodiversité existent, encore faut-il savoir de quelle biodiversité on parle !
Dans le monde nous avons désormais des données scientifiques de description de plus de 2 millions d’espèces. Mais pour ce qui est des espèces encore à découvrir, là, les projections sont réellement très compliquées, il suffit de voir la quantité incroyable de biodiversité que l’on a découvert récemment profondément enfouie sous terre.
À l’heure actuelle on estime le nombre total d’espèces sur terre se situant entre 8 et 12 millions…
Ces chiffres en disent long autant sur le nombre astronomique d’espèces, dans un cas comme dans l’autre, qu’il nous reste à découvrir avant qu’elles ne disparaissent, mais aussi sur l’étendue de notre méconnaissance du monde du vivant.
Mieux connaitre, mieux protéger !
À la lecture de ces chiffres on comprend bien que la tâche est d’ampleur. Si les politiques publiques ne suivent pas forcément en matière de financement, la société civile, notamment travers les sciences participatives, se mobilise avec les moyens qu’on lui donne.
Connaître les espèces qui évoluent sur notre territoire devient d’une urgence cruciale. Sans cette connaissance, il nous est tout simplement impossible de mieux comprendre les milieux et les interactions qui s’y jouent. De fait, il nous est également impossible de protéger ce que nous ne connaissons pas.
À l’heure de la recherche médicale, de l’ingénierie des matériaux ou encore du biomimétisme, le tout dans un monde de plus en plus en proie à la compétitivité, il est presque stupéfiant que nos pouvoirs publics n’investissent pas massivement dans l’acquisition de cette connaissance.
Peut-être ne voient-ils encore que par les mêmes oeillères que leurs prédécesseurs depuis cinquante ans, quand seuls des amoureux des arbres et du LSD faisaient cause commune avec la Nature.
Mais c’est désormais un tout autre jeu qui se joue et il est temps, dès aujourd’hui, de mettre en branle une réelle économie de la connaissance qui parte du postulat que toutes formes de vies sont à respecter et protéger parce que justement, ce sont des formes de vie.
Article mis à jour et republié