Alors que les abeilles domestiques servent de modèle dans les évaluations de risques environnementaux, ces tests ignorent les spécificités biologiques des abeilles sauvages, notamment leur exposition au sol contaminé. Une nouvelle étude révèle des risques alarmants pour des espèces comme les bourdons et les abeilles solitaires, essentielles à l’agriculture.
Impacts combinés des pesticides, mécanismes sociaux de détoxification… : la science connaît encore mal les abeilles
Autant s’efforce-t-on de protéger les abeilles de l’exposition aux pesticides, autant la science connaît encore mal les abeilles sauvages. En effet, d’après une étude de Sabrina Rondeau, doctorante à la Faculté de Biologie à l’Université d’Ottawa, les réglementations actuelles reposent principalement sur des études faites sur des abeilles domestiques, négligeant les différences fondamentales entre ces dernières et les espèces sauvages. Contrairement aux abeilles domestiques, les abeilles sauvages, souvent solitaires, n’ont pas accès aux mécanismes sociaux de détoxification. De plus, l’évaluation des risques ne tient pas compte des effets à long terme ni des impacts combinés des pesticides.
Un exemple frappant est celui des abeilles qui nichent dans le sol. Plus de 80 % des espèces d’abeilles sauvages sont en contact direct avec des sols contaminés, un facteur ignoré par les tests actuels, car les abeilles domestiques ne creusent pas le sol. Une étude menée au Canada a démontré que les reines de bourdons exposées à ces sols pendant leur hibernation sont confrontées à des mélanges complexes de pesticides. Ces expositions augmentent leur mortalité et compromettent leur capacité à établir des colonies viables.
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Pour une révision urgente des pratiques agricoles
Les abeilles solitaires, comme l’abeille des courges, subissent également les effets de ces pesticides. Une étude expérimentale a révélé que l’exposition simultanée à des insecticides et fongicides a un impact sur leur comportement et réduit leur capacité à produire une descendance. Pour les bourdons, certains pesticides, tels que le cyantraniliprole, augmentent la mortalité des reines les plus grandes, perturbent leur cycle de reproduction et altèrent la taille de leur progéniture.
Ces conclusions appellent à une révision urgente des pratiques agricoles. Les alternatives chimiques « plus sûres », comme les diamides, ne sont pas exemptes de risques et pourraient aggraver la situation. Protéger les abeilles sauvages nécessite une approche globale qui prenne en compte les spécificités biologiques et les interactions complexes entre pesticides. Car il ne faut pas l’oublier : en garantissant la survie des pollinisateurs, nous préservons non seulement notre biodiversité, mais aussi la sécurité alimentaire mondiale.
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