Chaque jour pendant la durée des négociations climat de la COP21, consoGlobe.com partage le compte-rendu quotidien du Réseau Action Climat France, que vous pouvez retrouver dans son intégralité, avec d’autres informations, sur le site macop21.fr.
Quoi de neuf du côté des négociations ?
Les négociations avancent lentement. Chaque pays travaille pour l’heure sur chacune des pièces du puzzle, de façon assez cloisonnée.
Des blocages persistent. D’abord, l’argent manque pour l’adaptation des pays les plus vulnérables aux changements climatiques. Les annonces financières de ces derniers jours sont un premier pas. Mais aucun engagement clair n’a été pris pour garantir la prolongation et la montée en puissance des financements après 2020, date à laquelle l’accord de Paris entrera en vigueur.
Deuxièmement, la question des pertes et des dommages économiques et humains irréversibles avance peu.
L’accord est par ailleurs mis en danger par un manque d’ambition des États sur « la différenciation ». Ce concept de différenciation renvoie à l’idée d’une responsabilité commune mais différenciée des pays : tous les pays n’ont pas la même responsablité dans les changements climatiques. Les pays ne peuvent pas prétendre décider par eux-mêmes leur responsabilité et la part de leur effort : cette attitude ne permettra pas de mobiliser les financements à la hauteur de l’enjeu et va entraîner une agrégation des émissions qui nous emmènera vers un réchauffement inacceptable de 3°C.
Que fait l’Union européenne ?
Cette dernière est complètement absente de la négociation. Elle a pourtant, par le passé, joué un rôle essentiel en construisant des ponts entre des groupes antagonistes. L’Union européenne ne s’est par exemple toujours pas positionnée sur la révision des INDC (les contributions nationales des pays à la réduction des émissions de gaz à effet de serre), sujet clé pour un accord fort sur le climat.
Ci-dessous, les images d’une action organisée au Bourget par les militants de 350.org qui ont réclamé la sortie des fossiles. L’action a eu lieu dans le cadre du mouvement de désinvestissement des énergies fossiles.
D’autres actualités ont aussi marqué cette journée en marge des négociations
- Avec un beau signal envoyé pour le désengagement des énergies fossiles, le Climate Vulnerability Forum (coalition de 40 pays vulnérables aux changements climatiques) continue de faire parler. Ces 40 pays ont appelé à fixer un cap de décarbonation et de 100 % d’énergies renouvelables en 2050. Le message envoyé est très fort, puisque ces pays sont aux premières lignes de la crise climatique et ont peu de moyens. Ils montrent pourtant eux-mêmes qu’ils sont prêts à agir.
- Un nouveau rapport d’Oxfam aborde le sujet des inégalités extrêmes et les émissions de CO2. Les 3,5 milliards de personnes appartenant quant à elles à la moitié la plus pauvre de la population mondiale ne sont responsables que de 10 % des émissions de CO2. Or, ce sont les plus concernées par les impacts. L’accord de Paris doit absolument donner la priorité aux populations les plus pauvres, les moins émettrices et les plus vulnérables.
- Un autre rapport des Amis de la Terre sorti aujourd’hui pointe du doigt les plus grandes banques internationales, qui ont alloué 257 milliards de dollars au charbon entre 2009 et 2014. Des banques qui contribuent donc encore et toujours à l’aggravation de la crise climatique. Chacun peut agir pour le climat, simplement en changeant de banque !
- Le géant de l’énergie français EDF vient de confirmer, par la voix de son PDG Jean-Bernard Levy, qu’il ne construirait plus de nouvelles centrales au charbon dans le monde. L’entreprise suit ainsi l’annonce officielle de l’autre grand énergéticien français, Engie (ex GDF Suez). C’est un premier pas important de EDF, mais largement insuffisant. EDF détient toujours 10 centrales au charbon ultra-polluantes dans le monde. C’est le cas en Europe (Royaume-Uni et Pologne) et en Chine. Nous attendons d’EDF qu’il annonce pendant la COP21 un plan de fermeture (et non pas de revente) de ces centrales d’ici à 2020, qui prennent en compte la justice sociale et la situation des travailleurs.
Résilience et adaptation doivent être au coeur de l’accord
Aujourd’hui, le sujet mis à l’ordre du jour par l’Agenda des Solutions était la « résilience ». La résilience désigne la capacité d’un système à absorber une perturbation, pour ensuite se réorganiser et continuer à fonctionner de la même manière qu’avant. Les initiatives d’adaptation aux impacts des changements climatiques améliorent la résilience des sociétés. C’est un sujet central pour la COP21.
Aux Philipines, par exemple, les autorités du pays investissent considérablement dans la prévention des risques de catastrophe naturelle et l’adaptation aux changements climatiques : le budget consacré à la prévention des risques de catastrophes naturelles s’est élevé à 624 millions de dollars en 2011 (soit 2 % du budget national et 0,28 % du PIB). Des systèmes d’alerte aux populations sont par exemple mis en place. Dans d’autres pays, comme au Niger, cette adaptation passe par la mise en place de programmes de semences améliorées.
#COP21 : face à la réalité des changements climatiques, l’obligation de s’adapter https://t.co/mBqsi8M5Mg pic.twitter.com/LmEIRLEJP3
— Réseau Action Climat (@RACFrance) December 2, 2015
L’exemple des femmes au Burkina Faso – et en Afrique en général – reflète bien l’étendue des impacts des changements climatiques et le grand défi que représente la résilience. Les changements climatiques impactent très lourdement les ressources naturelles, dont les femmes sont particulièrement dépendantes pour nourrir leurs familles et générer des revenus. Les parcelles qu’elles cultivent sont aussi plus dégradées et les récoltes compromises. Surtout, les changements climatiques augmentent considérablement la quantité de travail qu’elles doivent fournir. Les conséquences de ces changements sont aussi dévastatrices sur le plan humain.
Et en France ?
La France est aussi concernée par ces impacts. La température y a augmenté en moyenne de 1°C depuis un siècle. De plus, les changements climatiques affectent ses zones montagneuses, dégradent ses nappes phréatiques et menacent sa production de vin dès aujourd’hui. Pour améliorer sa résilience aux changements climatiques, la France doit notamment adapter son agriculture. Il ne faut pas oublier que le secteur de l’agriculture est un fort contributeur aux émissions de gaz à effet de serre, mais qu’il est aussi particulièrement touché par les impacts des changements climatiques. La sécurité alimentaire des Français en dépend également.
À la #COP21, action des ONG pour rappeler l’importance d’un cap vers 100 % d’énergies renouvelables. #zeroby2050. pic.twitter.com/roEhte6Ion
— Réseau Action Climat (@RACFrance) December 2, 2015
En tant que pays développé, la France a également une responsabilité historique quant aux changements climatiques en cours. Pourtant, en 2014, moins de 15 % des financements de l’Agence Française de Développement (principal canal de distribution des financements climat français) ont été dédiés à l’adaptation des pays les plus vulnérables aux impacts des changements climatiques.
Alors que la résilience est au coeur des discussions, il apparaît clairement que la question financière sera au coeur de l’accord de Paris. Tant pour accompagner les pays en développement dans leur transition énergétique que pour les aider à faire face aux impacts des changements climatiques. Les belles initiatives annoncées hier ne peuvent se substituer à un accord à la hauteur des enjeux. L’Union européenne doit prendre position et se mobiliser toute entière pour servir ce but.