La culture fruitière en verger est ancestrale et bon nombre de régions françaises ont d’ailleurs leur propre histoire en la matière. Dans un paysage agricole qui a eu tendance, durant les dernières décennies, à favoriser les énormes champs de monocultures, les vergers sont un lieu où il est encore possible de ramener et de favoriser la biodiversité.
Favoriser la biodiversité au verger en quelques astuces
Il est facile de mettre en place quelques habitudes pour faire de son verger un écrin de biodiversité. On vous dit comment ?
#1 Une fauche sélective
Faucher l’herbe d’un verger est important, notamment pour éviter certaines maladies fongiques qui peuvent se développer sur les arbres fruitiers du fait du trop-plein d’humidité au sol. Mais il faut savoir raison garder !
Il s’agit donc de ne pas couper trop court et trop souvent. En limitant les fauches, vous développerez année après année ce que l’on appelle un cortège floristique bien plus intéressant pour les espèces pollinisatrices dont votre verger a bien besoin.
Quand vous fauchez, ne fauchez pas non plus l’intégralité, laissez une ou plusieurs parties sans aucune fauche. Cela servira de zone refuge pour les insectes et notamment les auxiliaires comme les Cétoines dorées, mais aussi de vivier à graines. En finalisant leur cycle de vie, les plantes que vous n’aurez pas fauchées ensemenceront le reste de votre terrain. Variez donc les zones sans fauche au fur et à mesure !
#2 Faire des tas avec le bois de taille
Tous les vergers doivent être taillés. À la fin de l’automne ou durant l’hiver, vous aurez donc des branchages qui vous seront fort utiles pour favoriser un peu la biodiversité si vous n’en avez pas besoin pour votre poêle à bois ou pour vos barbecues de l’année suivante.
Vous pouvez ainsi choisir de faire un gros tas dans un endroit qui ne vous dérangera pas en partant de l’idée que vous le laisserez longtemps et que, d’années en année, vous y rajouterez le bois que vous produirez. Sans trop s’avancer, vous devriez trouver rapidement des hérissons pour s’y loger et passer un bon hiver.
Vous pouvez également choisir de faire de plus petits tas éparpillés même si c’est moins pratique pour la fauche ensuite. Ces petits tas favoriseront tous les décomposeurs du sol qui vous le rendront bien en le fertilisant et donc en vous permettant de produire plus et mieux.
#3 Faire du bois raméal fragmenté
Le BRF (Bois Raméal Fragmenté) est une excellente manière de recycler les déchets de taille de votre verger. Il s’agit de broyer tous les branchages que vous aurez après votre taille automnale, ni plus, ni moins.
Il faudra alors rapidement étaler votre BRF au pied des arbres ou dans votre haie pour activer la vie des sols de manière impressionnante.
Si vous ne pouvez pas étaler votre tas de BRF dans les 3 jours, il montera rapidement en température ce qui cassera ses potentiels effets positifs.
Comptez une couche de 2 à 5 centimètres pour être le plus efficace possible.
#4 Équipez votre verger de nichoirs et perchoirs
De nombreux oiseaux et rapaces ont un besoin vital d’arbre, surtout en plaine. À force d’entretien trop « efficace », cavités et arbres morts ont disparu du paysage rendant compliquée la découverte de sites de nidification pour des espèces telles que la chouette chevêche.
Vous pouvez ainsi installer des nichoirs de grande taille pour les rapaces qui vous en remercieront en vous débarrassant de tous les rongeurs qui pourraient grignoter les racines de vos arbres ou perturber trop grandement vos sols. Mais c’est également vrai pour les passereaux comme les Mésanges ou les Grives qui sauront vous débarrasser alors de bien des ravageurs du verger !
Avec la raréfaction des arbres dans nos paysages, les rapaces trouvent de moins en moins de perchoirs, c’est d’ailleurs pour cela qu’on voit par exemple de nombreuses buses utiliser les piquets qui servent à grillager les bords de route.
N’hésitez pas à leur planter quelques poteaux de trois mètres de haut, vous aurez sûrement la chance de pouvoir en observer à l’affût d’une proie.
#5 Donnez sa chance au lierre
Le lierre n’est pas ce qu’il y parait… De prime abord on aurait tendance à croire qu’il parasite les arbres en les étouffant. C’est bien plus complexe que ça ne serait-ce que parce qu’en l’observant de plus près vous vous rendrez compte qu’il ne grimpe jamais sur l’intégralité de l’arbre qu’il laisse se développer.
En réalité le lierre a bien des avantages dans un verger, car il crée un milieu à part entière sur le tronc des arbres, rendant la colonisation plus compliquée pour les fourmis qui élèvent les pucerons dans la ramure par exemple.
Le lierre est aussi une plante qui fleurit très tard dans l’année, apportant de la nourriture tardivement aux pollinisateurs qui en ont bien besoin et seront donc plus présents l’année d’après quand il s’agira de polliniser vos fruitiers.
Il en va de même pour les baies du lierre qui, arrivant très tard dans la saison, nourriront bon nombre d’oiseaux qui se régaleront, au printemps, de tous les ravageurs tels que les carpocapses et les pucerons qu’il abrite !
#6 Laissez une place à une haie fruitière
L’organisation habituelle d’un verger veut que l’on y aligne des arbres en les éloignant comme il se doit les uns des autres pour qu’ils ne se gênent pas. On favorise alors une production efficace et une facilité à l’entretien ou à la cueillette.
Mais dans un verger on peut aussi vouloir un peu plus de biodiversité ou un peu plus d’intimité tout simplement ! Une haie composée en grande partie de fruitiers est tout à fait possible, notamment en utilisant des variétés telles que les cognassiers ou les cerisiers.
Vous produirez certainement moins dans cette haie, mais en couplant vos fruitiers avec d’autres essences locales telles que le sureau noir ou l’aubépine, vous profiterez d’autres produits de saison tout en favorisant la présence d’auxiliaires de culture et de la faune sauvage en général.
#7 Réfléchissez l’utilisation de produits chimiques
Toutes les cultures ont leur cortège de traitements pour lutter contre telle ou telle maladie ou tel ou tel ravageur, la culture fruitière ne fait pas exception. En réalité c’est même l’inverse, car, contrairement à la majorité des autres types de culture, le verger est une culture pérenne. On ne peut donc pas changer de culture d’une année sur l’autre pour faire disparaître les ravageurs.
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Dans ce cadre-là, trois choix s’offrent à vous :
- Vous continuez à traiter comme jusqu’à présent et attendez que les produits soient interdits ou que vous tombiez malade pour vous demander ce que vous pourriez faire.
- Vous ne faites plus aucun traitement et assumez que vous puissiez perdre toute votre production de l’année comme cela peut aussi être le cas lors de gelées tardives ou de sécheresse.
- Vous favoriser les auxiliaires de culture et mettez en place toutes les techniques de lutte biologique pour arrêter d’utiliser de tels produits en assumant qu’il vous faudra plusieurs années avant d’obtenir un résultat.
Le jardin naturel de Jean-Marie Lespinasse
Depuis 40 ans, Jean-Marie Lespinasse pratique le jardinage. Il fut toujours désireux de réaliser un jardin d’une conception proche de celle de la nature, sans produits chimiques, loin des contraintes des cultures contemporaines : labour, engrais, traitements phytosanitaires, désherbage…