Consommation de masse, fin de partie
Pourtant, l’agence internationale de l’énergie (IAE) a sifflé le début de la fin de la partie en décembre 2010. Son avertissement est resté assez peu commenté car en pleine crise financière mondiale, on parlait plus de banques, de dettes publiques ou de cours de bourse que des fondamentaux de notre économie. Pourtant, en expliquant que, selon elle, le Peak oil est atteint à cette date, au niveau de 70 millions de barils par jour, l’agence a lâché une vraie bombe. La production de pétrole, socle incontournable de l’économie mondiale, représentait alors 83.5 % de l’énergie consommée dans le monde en 2008. Mais cette proportion va dorénavant baisser prévient l’agence. L’enjeu est de 2000 milliards de dollars, soit la dépense que le monde fait chaque année pour le pétrole.
L’incertitude sur le peak oil
Le fameux Peak Oil ou pic de production de pétrole, date à laquelle l’humanité aura extrait plus de la moitié du pétrole présent sur Terre, est située selon les uns ou les autres à plus ou moins courte échéance (4).
- Le Peak oil technique, quand le pétrole produit sera inférieur à la demande de pétrole, est pour très bientôt. Il confèrera immédiatement aux grandes puissances du pétrole, Moyen-Orient, Russie, …
- Le Peak Oil absolu, quand commencera l’épuisement des réserves physiques, aura une conséquence inéluctable : la diminution absolue de la production ; de 4 % par an selon les experts.
Le Peak Oil absolu, que certains prévoient en 2030, suppose que d’ici là on trouve l’équivalent de 4 fois les réserves de l’Arabie Saoudite et pour répondre à la demande croissante en énergie, l’équivalent de 6 fois les réserves arabes ! Fort peu probable. Pour l’Association of the Peak Oil study, le Peak Oil absolu est pour 2014-2018. Pour d’autres, il pourrait se situer à 2060.
Premier signe d’alerte en juillet 2008 quand le prix du baril atteint 140 $ : l’économie a alors frôlé l’asphyxie car c’est toute la chaîne de production mondialisée qui en a subit l’impact. Aujourd’hui 80 % de la consommation énergétique mondiale proviennent encore du pétrole, du gaz ou du charbon. Et ainsi, tout se renchérit avec le pétrole plus cher : le plastique, les médicaments, les engrais, les biens industriels, le chauffage domestique, le prix des transports. Comme le souligne Jacques Attali dans Survivre aux crises, « quelles que soient la date et la forme du Peak Oil, […], il faudra alors diviser par quatre sur 20 ans la quantité d’énergie fossile utilisée par personne, et réorienter massivement l’économie et le mode de vie de chacun pour n’employer le pétrole que là où il est provisoirement irremplaçable, c’est-à-dire dans les transports individuels par l’automobile et l’avion. »
Or, on a déjà extrait plus de la moitié de nos réserves les plus accessibles et les moins chères à atteindre. L’IAE estime qu’extraire le pétrole restant va coûter 8 000 000 000 000 000 000, soit 8 milliards de milliards de dollars dans les 20 prochaines années. Impossible ? La raison pourrait donc laisser penser qu’on n’attendra pas le Peak oil (puis le pic de production du gaz naturel). Il ne se produira pas car on se mettra à diversifier massivement nos sources d’énergie avant de l’avoir atteint ?
Et bien, il n’est pas du tout certain que l’on emprunte cette voie que la raison souffle.
Mettre fin à la dépendance énergétique : on n’en prend pas la voie
Comme le met en lumière l’étude Heat Roadmap Europe 2050 – Euroheat & Power, malgré l’inflexion en cours des politiques énergétiques nationales un peu partout dans le monde, cela ne suffira pas à nous mettre sur la cible de l’indépendance énergétique. «Il apparaît que leur maintien devrait permettre d’atteindre l’objectif des 3×20** et aura pour conséquence d’ici 2050 :
- une baisse progressive du nucléaire jusqu’en 2030 puis un retour au niveau de 2010 en 2050,- une amélioration de la performance du réseau électrique, notamment grâce à la co-génération (production simultanée de chaleur et d’électricité),
- une baisse de la demande de chaleur des bâtiments due à une meilleure isolation du bâti.
- En revanche, il ne permettra pas l’accès équitable et universel aux énergies renouvelables, que le Président de la République s’est fixé comme étant l’un de ses objectifs pour la conférence de Rio. »
Les investissements dans le pétrole battent des records
Le total des investissements consentis dans l’industrie pétrolière et gazière a franchi un niveau record en 20123 avec un total de 1.039 milliards de dollars : ce sont les dépenses d’exploration qui poussent cette dépense, qui au total aura cru de 13,4 % par rapport au 916 milliards de 2011. Ce sont les forages off shore du Golfe du Mexique, du Brésil et du cercle arctique qui se distinguent soulignant la confiance des investisseurs dans l’amont de la filière pétrolière.
Le contexte est favorable : nouvelles technologies, prix du pétrole qui reste élevé, tensions géopolitiques, … Ce sont 242 découvertes de gaz et de pétrole qui ont été faites sur la seule année passée, notamment dans des environnements autrefois trop coûteux à exploiter, comme les grands fonds. C’est en Amérique du Nord que les investissements ont été les plus élevés (254,3 Mds $ pour 24,5 % du total mondial) et avec la plus forte croissance (+ 15,7 %). Les gaz et pétrole non conventionnels (schiste, sables bitumineux) en sont les principaux bénéficiaires. Selon l’institut GlobalData, l’Asie a investi $253.1 milliards, contre $229.6 milliards pour l’Afrique et le Moyen-Orient(5).
C’est d’ailleurs l’Europe globalement qui n’est d’ailleurs pas un exemple en la matière : aujourd’hui plus de deux tiers des énergies utilisées pour chauffer les bâtiments sont des énergies fossiles (19 % sont du pétrole et 45 % du gaz naturel). Des chiffres qui témoignent également de la dépendance énergétique globale de l’Europe qui importe dans sa grande majorité le gaz naturel et le pétrole qu’elle utilise. Dommage, car comme le dit Norbert Röttgen, le ministre de l’environnement allemand, « plus les gens vont consommer de pétrole et de charbon, plus les prix vont grimper ; mais plus les gens vont consommer d’énergies renouvelables, plus les prix vont baisser ».
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(4) Le Peak oil est-il une fiction ? On s’est toujours trompé sur la date du Peak Oil. L’article « Big oil in a blue suit’ de Newsweek, oct 2010
(5) Ce sont les companies nationals (NOCs) qui sont les plus actives et représentent environ la moitié des investissements mondiaux. Les Compagnies pétrolières intégrées Integrated Oil Companies – (IOCs) et independentes investissent le reste. Les NOCs accroisent fortement leurs dépenses, notamment Petroliam Nasional Berhad, China Petroleum & Chemical Corporation et Petroleo Brasileiro S.A. Sur la période 2012-2016 period, Petroleo Brasileiro S.A. se place au premier rang des compagnies nationales tandis que c’est ExxonMobil Corporation le plus gros investisseur privé. Au total, les dépenses d’investissement en gaz et pétrole devraient représenter $409 milliards d’ici à 2016.
Bonjour, je voudrai savoir, s’il vous plait, si les poêles à pellet bénéficient aussi du crédit d’impôts ? Merci de me répondre.
Oui tout à fait, les poeles à bois (et à pellets) bénéficient du Crédit d’impot qui vient d’ailleurs de changer de nom (voir notre arcticle sur le crédit impôt Transition énergétique)
La Terre étant un système fermé (enfin, pas tout à fait, puisqu’il y a le Soleil !), les ressources en pétrole, en gaz, en charbon, en uranium, …, en minerais de toutes sortes, sont nécessairement limitées ! Ça me paraît évident ! D’autre part, je ne vois pas de quel droit, on interdirait à un Indien ou un Chinois, ou n’importe quel autre habitant de la planète, d’avoir le même niveau de vie, que nous. D’ailleurs, notre seul objectif, n’est-il pas d’avoir le niveau de vie des USA ? 4 voitures par famille, dont 1 4×4, 1 SUV, et 2 petites voitures pour les enfants ! Dans le même ordre d’idée, je ne comprends toujours pas pourquoi, on interdit à l’Iran ou la Corée du Nord, d’avoir la bombe atomique, alors qu’on l’autorise à l’Israël, ou le Pakistan ! Je ne parle pas des grands pays, dont nous faisons partie : les USA, la Russie, la Chine, le Japon, la Grande-Bretagne, la France, …
Conclusion : le prix du pétrole, du gaz, du charbon, de l’électricité, …, ne peut qu’augmenter, inexorablement. Qu’on rêve un jour, de remplacer des grandes centrales électriques, comme celle de Gravelines, par des petites centrales (qui marcheraient à quoi, au fait ?) domestiques, pourquoi pas, mais il y aura toujours de grandes usines, qui nécessiteront la construction de gros générateurs, pour les alimenter. Non ?
Il me paraît avoir un part de rêve dans tout ça. Si les Allemands se décident à abandonner le nucléaire, c’est pour le remplacer par des centrales au charbon, essentiellement importé, ou pire par le lignite, dont le pays est très riche, où est l’avantage ? J’avoue, que je ne comprends pas très bien. De plus, il faut savoir que la puissance de la plus grosse éolienne est de 5 MW, et qu’elle ne tourne que 50% du temps : quand le vent est assez fort, ou quand il ne l’est pas trop ! Il faut savoir également que le rendement d’un panneau solaire est de l’ordre de 10 à 15%, au mieux (celui d’une locomotive à vapeur !), quand il y a du soleil, qu’il est bien orienté, qu’il est bien propre, … Et que la fabrication du silicium, à partir de la silice, est une industrie très polluante !
Bref, je ne suis pas très optimiste pour ce qui est de l’avenir énergétique de l’humanité !