Du 16 au 19 septembre, la ville du Havre accueille la quatrième édition du Forum de l’Économie positive. De nombreuses personnalités se sont donné rendez-vous pour l’événement, qui avait réuni en 2014 près de 6000 participants. Les intervenants viennent de tous horizons, allant du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, à la présidente d’Action contre la faim, Stéphanie Rivoal, du fondateur de Sea Sheperd, Paul Watson, du moine bouddhiste Mathieu Ricard, ou encore de Jacques Attali, président du Forum.
En parallèle des nombreuses conférences, le Forum sera aussi l’occasion de réunir des experts de haut-niveau, dans le cadre d’une vingtaine d’ateliers thématiques, pour formuler des propositions concrètes dans le sens de la construction d’un monde positif. Celles-ci seront regroupées dans un document de synthèse, à la veille de la définition des Objectifs du Développement Durable aux Nations Unies à New-York et de la COP 21 à Paris.
Prise en compte de l’autre et du long terme
Le concept d’économie positive s’avère souvent difficile à appréhender par le grand public, car plus abstrait que les chiffres économiques habituellement diffusés. L’économie positive se base en fait sur « la prise en compte de l’autre, passé, présent et à venir, par chacun, plutôt que sur la seule satisfaction de ses intérêts particuliers ». Le long terme est au coeur du concept, aussi bien dans les choix économiques, écologiques, sociaux, politiques ou encore spirituels.
Plus concrètement, l’économie positive voudrait apporter une réponse aux questions que chacun peut se poser après une journée de travail, telles que : suis-je utile à la société d’aujourd’hui et de demain ? A quoi est-ce que je contribue ? Mon travail a-t-il du sens ? Est-ce que je participe à la construction ou au contraire à la destruction du monde de demain ?
L’idée majeure est qu’il est rationnel d’être altruiste, de prendre en compte l’autre d’hier, d’aujourd’hui et surtout de demain.
Un nouvel outil pour évaluer une économie : l’indice de positivité
Même une fois définie, il reste difficile de se représenter ce qu’est l’économie positive. Pour l’évaluer, le groupe de travail mené par Jacques Attali a introduit dans son rapport, remis à François Hollande le 21 septembre 2012 et intitulé « Pour une économie positive »(2), un nouvel outil : l’indice de positivité.
« L’indice de positivité d’une économie ambitionne d’évaluer la capacité d’une économie à intégrer l’altruisme et la prise en compte des générations futures au coeur de la définition de ses priorités. » Il peut être appliqué à un pays, à une ville ou une entreprise, et s’étale sur trois dimensions : l’altruisme entre générations, l’altruisme entre territoires et l’altruisme entre acteurs.
La croissance du PIB, souvent utilisée pour comparer les pays entre eux, n’est plus qu’un indicateur parmi 29 autres. Parmi ces derniers, onze sont des indicateurs économiques (croissance, dette, investissement, emploi,…), onze sont des indicateurs sociaux et culturels, quatre sont des indicateurs de gouvernance, et trois sont des indicateurs environnementaux (émissions de dioxyde de carbone, production de déchets et énergies renouvelables).
Deux tiers des indicateurs sont objectifs, estimés par des institutions internationales, à l’instar de la Banque Mondiale ou de l’OCDE. Le tiers restant regroupe des indicateurs subjectifs, le plus souvent fournis par des ONG telles que Transparency International ou Reporters Sans Frontières.
Avec ces 29 critères, la France, pourtant cinquième puissance économique mondiale, se classe seulement 19e parmi les 34 pays de l’OCDE.
Des propositions concrètes
Le rapport « Pour une économie positive » a mis en avant 45 propositions visant à rendre l’économie plus positive. Le but est de transformer les objectifs sociaux et environnementaux, non pas en contraintes, mais comme des « valeurs en soi ». De nombreuses réformes du droit sont ainsi préconisées afin d’établir l’importance du long terme, plutôt que l’immédiateté aujourd’hui omniprésente.
Par exemple, il est proposé de réécrire l’article du Code civil qui définit le contrat de société, afin de prendre en compte la mission sociale, environnementale et économique de l’entreprise, plutôt que de fonder cette définition seulement sur l’intérêt de ses associés capitalistes. Une autre proposition préconise une refonte des normes comptables afin d’y intégrer la dimension de long terme afin de valoriser les comportements positifs de l’entreprise. Concernant le domaine financier, la création d’un Fonds mondial d’économie positive a été abordée. L’éducation est également valorisée, afin de former des citoyens « altruistes, écoresponsables, sensibles à la prise en compte de l’intérêt des générations futures ».
La quatrième édition du Forum de l’économie positive est ainsi l’occasion d’aborder sur plusieurs jours ces différentes propositions, en faisant participer des personnalités impliquées dans l’économie positive, ainsi que le public.
Le site de l’évènement : http://positiveeconomy.co/