Le phénomène de contamination d’aliments par des substances toxiques migrant depuis leurs emballages est connu depuis longtemps, et cette révélation n’est pas la première de ce genre. Mais les années passent, et les choses ne bougent pas en la matière.
Des concentrations de substances toxiques très supérieures aux niveaux réglementaires
Les dérivés d’hydrocarbures transportés vers les aliments par les huiles minérales qui se dégagent de leurs emballages font une nouvelle fois parler d’eux. En décembre 2021, l’ONG Foodwatch a fait analyser par un laboratoire les bouillons cubes de la marque Knorr, verdict : ces cubes ont été identifiés comme hautement contaminés par des dérivés d’hydrocarbures qui ont migré depuis les emballages via des huiles minérales que ces emballages contiennent. La concentration de ces substances (connues sous les sigles anglais « MOAH » et « MOSH », pour « hydrocarbures aromatiques monocycliques alkylés » et « hydrocarbures aromatiques polycycliques » respectivement) a parfois atteint 52 mg par kg d’aliments… alors même que pour une personne pesant 60 kg, la concentration maximum acceptable est de 0,6 mg par kg d’aliments. Tel est en effet le seuil maximum considéré sans danger par le comité conjoint de la FAO et de l’OMS, sur les additifs alimentaires (JECFA).
Si cela est à tel point inquiétant, c’est parce que les MOAH et MOSH sont susceptibles de provoquer des cancers, altérer notre patrimoine génétique (caractère mutagène) mais aussi perturber notre système hormonal. Et les perturbateurs endocriniens, on le sait, participent à la baisse de la fertilité, au développement de puberté précoce, à des malformations du foetus ou encore au développement de maladies métaboliques telles que le diabète. Les MOAH en particulier sont génotoxiques, ils s’accumulent dans les tissus, notamment le foie, pouvant créer à long terme des dommages sur cet organe.
Les instances européennes se pencheront enfin sur la question des MOAH et MOSH
La question des hydrocarbures aromatiques se repose – © al1962
Ce phénomène de contamination d’aliments aux MOAH et MOSH est connu depuis longtemps. Dès 2010, une étude allemande révélait des concentrations de MOSH 10 à 100 fois supérieures au seuil autorisé. Quant aux MOAH, ils étaient eux aussi trouvés en quantités importantes, soit 1 à 10 mg par kg de produit. Une autre étude, réalisée en Chine en 2020, s’attachait à évaluer l’ampleur de ce phénomène de migration en conditions d’utilisation les moins favorables. Dans 47,9 % des cas, la migration d’huiles minérales résultait en une concertation de MOSH supérieure à 2 mg/kg dans le produit. Et dans 32,3 % des échantillons analysés, la teneur en MOAH était supérieure à 0,5 mg par kg de produit. Les concentrations les plus importantes ont été identifiées dans les aliments longue conservation (durée supérieure à 6 mois) : les concentrations de MOSH y étaient de 91,2 mg/kg en moyenne et les concentrations de MOAH de 1,4 mg/kg en moyenne.
Cette fois-ci, on a néanmoins une petite lueur d’espoir que les choses bougent. Le Comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et de l’alimentation animale (Scopaff), une instance dépendante de la Commission européenne, vient d’inscrire le rapport de Foodwatch à l’ordre du jour de sa prochaine réunion, le 28 février 2022. Et en France, la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) a ordonné un retrait-rappel des bouillons cubes Knorr concernés.
Illustration bannière : Des dérivés d’hydrocarbures dans nos assiettes : les autorités françaises rappellent les bouillons cubes Knorr – © Ildi Papp
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