« Lorsqu’on réalise l’isolation thermique par l’extérieur d’un bâtiment, on risque de faire apparaître tous les bruits intérieurs qui étaient masqués auparavant ! D’autre part, certains produits courants en isolation thermique ont l’inconvénient de créer des « peaux vibrantes » qui altèrent l’isolation acoustique d’une façade », révèle Jean-Louis Beaumier, ingénieur, spécialiste des procédés de construction passive, et conseiller en acoustique de l’éco-construction. Avec Franck Janin, également ingénieur mais plus spécialisé sur le versant thermique de l’isolation, il vient de sortir un ouvrage qui fait le tour de la question : « L’isolation thermique-acoustique » (éditions Terre Vivante).
Une double isolation, dès le départ
Lorsqu’on se rend compte des problèmes acoustiques engendrés par l’isolation thermique, c’est souvent trop tard, et très coûteux pour y remédier ! Mieux vaut donc concevoir dès le départ une isolation qui offre des doubles performances, anti-froid et anti-bruit, dans un même geste architectural, en combinant des produits thermiques et des produits acoustiques. C’est l’assurance d’un gain de temps et d’argent ! Mais comment s’y prendre ?
Des solutions naturelles
« Les produits d’isolation dits écologiques, souvent appelés bio-sourcés parce que d’origine végétale ou animale, sont globalement équivalents aux matériaux conventionnels et souvent supérieurs par certains aspects de performance thermique« , assure Jean-Louis Beaumier, qui prône des solutions vertes tout aussi performantes et parfois même plus que les solutions classiques, notamment pour le confort d’été – grand oublié des stratégies habituelles d’isolation.
« J’avoue un petit coup de coeur pour les solutions ‘tout bois’. Ce ne sont pas les plus faciles à mettre en oeuvre car les défauts de mise en oeuvre sont encore plus sensibles qu’en construction maçonnée et demandent une attention de chaque instant. Mais la construction bois s’inscrit parfaitement dans le champ du développement durable, c’est une direction qui devrait gagner en popularité dans les années à venir ! »
Quant aux éventuels problèmes, tels que la sensibilité aux parasites ou le mauvais comportement au feu, il les balaie d’une phrase : « Ils sont surtout générés par des a-priori ! De nombreuses expérimentations réalisées notamment par des organismes officiels comme le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) en font foi. »
Combiner en neuf, mais aussi en rénovation ?
Aujourd’hui, toute construction neuve doit répondre à des prescriptions en matière d’étanchéité à l’air, de ventilation, d’efficacité thermique, qui renchérissent le coût au m², par rapport à la construction des années 1990. Le fait de prévoir à l’avance, dès l’étape du projet, une combinaison thermique – acoustique, peut toutefois permettre de solides économies par rapport à une intervention décalée et tardive. Par contre, en rénovation, combiner les solutions d’isolation s’avère parfois plus difficile et coûteux, en raison de la configuration de certains bâtiment anciens.
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Dans tous les cas, il faut être très attentif à la mise en oeuvre, qui supporte mal les approximations ! « Cette approche combinée nécessite une attention particulière et une étude fine des parties de la construction. La performance, dans chacun des domaines concernés, étanchéité à l’air, efficacité thermique, isolation acoustique, impose à l’applicateur une vigilance particulière ; les gestes ‘néfastes’ peuvent être nombreux », recommande Jean-Louis Beaumier. Attention donc aux entreprises qui travaillent trop vite !
Quel surcoût ?
Si on considère le seul coût au m² d’isolant, les éco-matériaux présentent certes un surcoût par rapport aux produits conventionnels, mais celui-ci se réduit d’année en année. Une évolution encourageante : « On peut penser que d’ici peu, certains isolants bio-sourcés écologiques seront à égalité avec d’autres produits », se félicite Jean-Louis Beaumier.
Déjà, une catégorie de matériaux s’avère même plus économique que son équivalent « classique » : « la paille pour l’isolation des parois est très très bon marché, même si la pose est plus chère », souligne Franck Janin. Mais aussi, « les présentations minces de fibre de bois, de fibre de chanvre ou de feutre de mouton, de 3 à 7 mm d’épaisseur, qui servent de sous-couche ou pour réaliser des bandes résilientes. les présentations minces de fibre de bois, de fibre de chanvre ou de feutre de mouton, de 3 à 7 mm d’épaisseur, qui servent de sous-couche ou pour réaliser des bandes résilientes. »
Selon les deux auteurs de L’isolation thermique-acoustique, ces produits bio-sourcés sont « assez fréquemment moins chers que les sous-couches de plancher flottant couramment employées, et pour des performances équivalentes ».
Mais d’autres évolutions majeures sont à attendre, qui devraient rendre les projets plus rentables mais aussi, toujours plus performants. Notamment, « la présence d’équipes communes, thermiciens et acousticiens, dès les premières étapes d’un projet, afin que le travail de conception soit partagé ; la formation des applicateurs, artisans, ouvriers du bâtiment, qui doivent apprendre de nouvelles ‘manières de faire’ pour être efficients sur le chantier ; et enfin, la réduction du coût des matériaux écologiques, grâce aux volumes de production qui augmentent sans cesse pour répondre à la demande ! »