En 17 années, la journée sans voiture, qui s’inscrit désormais dans le cadre d’une semaine européenne de la mobilité et qui aura lieu cette année entre les 16 et 22 septembre, est devenue un rendez-vous incontournable des campagnes de sensibilisation environnementale. Entre lutte contre la pollution et le bruit urbain, amélioration de la qualité de vie en ville, prise de conscience collective, et changement de comportements d’un côté, et restrictions de quartiers appliquées par certaines villes d’autre part, quel rôle joue cette journée – une sur 365… -sans voiture.
Petite histoire de la journée sans voiture : une vraie prise de conscience
Les premières expériences de « journée sans voiture », plus exactement « dimanches sans voiture » ont vu le jour en Belgique, aux Pays-Bas et en Suisse au moment de la crise de Suez en 1956-57. Elles ont refleuri en 1973 au moment de la crise pétrolière, mais c’est l’Islande, pionnière en matière d’énergie renouvelable, qui a officialisé l’initiative en 1996 à Reykjavik pour encourager les citoyens à une mobilité plus propre, et moins dangereuse.
Depuis 1998, l’initiative s’est étendue à l’échelle européenne avec la semaine de la mobilité et avec « ma ville sans voiture », un projet européen initié par la commissaire européenne à l’environnement, Margot Wällström en 2000.
Depuis le mouvement a connu des développements et des reculs, a suscité débats et controverses, mais il a surtout servi d’émulateur en inspirant d’autres projets urbanistiques, préparant leur acceptation, comme le péage urbain de Londres (mis en place en 2003), le réseau vert de Hambourg (en réflexion depuis 2012), de manière indirecte le vélib de Paris (début 2009) ou d’autres villes européennes, l’autolib ou bien encore le projet de transports urbains contrôlés par smartphone et imaginé par la ville d’Helsinki à l’horizon 2025.
Une nouvelle manière de vivre la ville
La journée sans voiture incite les citoyens à trouver, ou à créer, des solutions de substitution à la voiture qui leur permettent à la fois de contribuer à l’effort général de protection de l’environnement et de découvrir et tester de nouveaux moyens de mobilité auxquels ils n’auraient pas forcément pensé pour se rendre d’un point A à un point B : le vélo, la marche, les transports en commun etc..
Grâce à la journée sans voiture, le statut indétronable de la voiture est remis en question, et les citoyens réalisent qu’ils peuvent s’en passer, avec moins de difficulté qu’ils ne l’anticipaient.
Cette journée a donc surtout un caractère incitatif, mais elle permet aussi aux habitants des villes, en rompant avec leurs habitudes, de découvrir leur ville sous un autre angle et d’en profiter différemment : moins de bruit, un air plus respirable et des dangers en moins, ce qui ne gâche rien au plaisir.
L’habitude est souvent l’ennemi du progrès, c’est bien connu, car la routine annihile la volonté de changer et cette journée permet de s’interroger et de remettre en question ses habitudes.
Par ailleurs, le fait que cette journée sans voiture soit fixée sur le calendrier à une échelle européenne permet une communication plus forte et des résultats probants sur l’amélioration de la qualité de l’air, sur la réduction du bruit et de convaincre les plus réfractaires. On pourra regretter, sur ce point, et quelles qu’en soient les raisons, la licence que s’est accordée la ville de Paris en reportant d’une semaine cette journée sans voiture par rapport à l’ensemble du mouvement qui a fixé la date au samedi 19 septembre ou au dimanche 20 septembre, dans le cadre de la semaine de la mobilité du 16 au 22 septembre cette année.
Chaque année, la semaine de la mobilité propose un thème de réflexion autour duquel des activités sont organisées par les autorités locales des villes participantes, thème qui doit impulser une dynamique de changement et des mesures destinées à encourager une mobilité propre.
Cette année, le thème “Choose. Change. Combine” invite les participants à réfléchir sur les différentes options de transport et de mobilité mises à leur disposition dans les villes pour choisir consciemment une solution adaptée à leur mode de vie et respectueuse de l’environnement.
Un bilan mitigé selon les villes malgré des résultats plutôt encourageants
La liste des villes participant à l’opération est disponible sur le site européen de la semaine de la mobilité, qui dresse un tableau assez complet du nombre de villes participantes par pays et par année.
Si le nombre de villes participantes a baissé entre 2002 et 2015 passant de 1737 à 1191, le nombre de pays participants est assez stable (36 en 2015 contre 37 en 2002).
Le mouvement a connu un développement important jusqu’en 2011 et subit depuis 2011 une désaffection qui se confirme cette année, où le nombre d’inscrits chute de près de 50 % en passant de 2011 à 1191.
Si des pays très impliqués dans le mouvement comme l’Autriche et la Hongrie ont quadruplé leur nombre d’inscrits entre 2002 et 2015, ou comme l’Espagne, très active, qui a également progressé entre 2002 et 2015, d’autres pays bien engagés au départ ont considérablement chuté dans les statistiques, allant parfois jusqu’à diviser par 10 le nombre de participants : Allemagne, France, Royaume uni, Belgique.
Certains pays ne participent même quasi plus : le Danemark avait 67 villes participantes en 2002, il n’en a plus aucune aujourd’hui.
Il existe cependant quelques pays à l’engagement plus modeste, comme la Suède, l’Italie, la Finlande, ou le Portugal, qui continuent de soutenir le mouvement chaque année et sans défaillir.
Les mesures effectuées par les autorités montrent pourtant clairement des incidences favorables sur les niveaux de concentration de polluants dans l’air ainsi que sur les niveaux de bruit ambiant.
La ville de Bruxelles, dans un rapport de 2014, faisait apparaître que la journée sans voiture permettait de diviser par 20 la présence de polluants dans l’air et une réduction des bruits variant de 1 à 10 db de moins selon les stations de relevés.
Utopie d’un jour qui permet de vrais changements : même si le bilan d’une telle opération reste insuffisant, la journée sans voiture apporte des éléments de progrès incontestables.
Illustration bannière : La journée sans voiture est-elle efficace ? © Shutterstock