À l’occasion de la Up Conférence « Parlez-vous blockchain », organisée par le réseau Up Campus le 13 septembre, Claire Balva, co-fondatrice de Blockchain France, Romain Rouphael, co-fondateur de BELEM, Rieul Techer, fondateur de la Paillasse Saône et porteur du projet DAISEE proposaient un éclairage sur cette technologie, qui ne concernera bientôt plus uniquement les geeks ou les amateurs de la finance.
Up Campus ?
La communauté Up, c’est un tissu de citoyens actifs, un réseau social Up Campus et un magazine, qui veulent penser le monde autrement. Outre des publications, ils organisent et participent à des Up Conférences et des Up Cafés dans toute la France.
Qu’est ce que la blockchain ?
Popularisée par la monnaie virtuelle, le bitcoin, une blockchain (littéralement, « chaîne de blocs ») est une technologie de stockage et de transmission d’informations, transparente, sécurisée et fonctionnant sans organe central de contrôle. Elle constitue une base de données qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Elle est partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, ce qui permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne.
« C’est une sorte de Google doc, sauf qu’elle est appliquée à des transactions monétaires en se passant des tiers de confiance » simplifie Romain Rouphael. Hormis l’absence de tiers de confiance, la blockchain est qualifiée d’infalsifiable. Elle fonctionne comme un registre qui consigne de façon infalsifiable la liste des échanges effectués entre les utilisateurs.
Claire Balva explique qu’une blockchain est « répliquée sur tous les ordinateurs qui veulent participer au réseau et qu’il est très difficile de modifier ce qui a été écrit, sauf si tout le monde ou une grande partie du groupe décide de la modifier », permettant ainsi l’instauration d’un cadre totalement sécurisé.
La blockchain dans notre quotidien : monnaie virtuelle, échange d’énergie entre voisins et économie collaborative
Aujourd’hui, le seul système décentralisé qui fonctionne est le bitcoin. Celui-ci est particulièrement utilisé dans les pays en voie de développement. Claire Balva rappelle qu’aujourd’hui, « 90 % de la valeur du bitcoin se situe dans les pays développés et 90 % du volume du bitcoin est présent dans les pays en voie de développement ».
Dans la finance, la blockchain permettrait de décloisonner le système des prêts accordés aux PME. Les entreprises pourraient investir plus facilement. « La technologie blockchain peut accélérer le financement des sociétés non cotées ; d’ailleurs, on en voit des prémices dans la loi Macron avec la possibilité d’avoir des ‘minibons‘ (les bons de caisse(1)) pour les entreprises en développement » ajoute Romain Rouphael. Avec ce système, les banques n’auraient plus le monopole des prêts accordés aux PME.
La blockchain se développe également en faveur de l’économie collaborative. « Il est possible de faire des transactions d’énergie avec son voisin si on a une éolienne chez soi, par exemple, sans passer par EDF dans le cadre d’un smart contrat » illustre Rueil Techer. Des contrats « smart » sont des programmes autonomes qui exécutent automatiquement les conditions et termes du contrat, sans nécessiter d’intervention humaine une fois démarrés. La blockchain permettrait donc de valoriser les circuits courts dans divers secteurs.
La blockchain pour la démocratie ?
Au quotidien, la blockchain peut également changer nos comportements citoyens, notamment par la modification des caractéristiques du vote. Le parti politique Nous Citoyens a testé cette cyber-structure lors des élections régionales et départementales conduites du 4 au 7 avril 2016.
« Grâce à la blockchain, Nous Citoyens, qui défend un exercice éthique et démocratique du vote, donne la possibilité à chaque citoyen de participer directement au débat public sans s’en remettre à un tiers : voter devient un acte absolument démocratique » prône Romain Rouphael. Alors que le vote en ligne traditionnel, conduit de façon centralisé, peut être corrompu, la blockchain promet un vote sécurisé, dont le résultat est transparent, fiable et vérifiable par tous.
À la suite de ce test, les résultats ont été positifs puisque 9.000 votes supplémentaires ont été notifiés. Néanmoins, pour le moment, le vote via la blockchain ne peut se substituer au vote physique lors d’élections majeures comme les présidentielles, permettant de certifier l’identité du votant et de garantir le secret de l’isoloir. Par ailleurs, un vote à grande échelle saturerait la blockchain et prendrait alors plusieurs jours.
La blockchain : vous n’avez pas fini d’en entendre parler
La blockchain se développe à grande vitesse dans divers domaines : données médicales, élections et référendums en ligne, brevets industriels, titres fonciers ou encore objets connectés. Parallèlement, des projets innovants voient le jour. En matière d’éducation, une start-up, Bitproof, s’est emparée de la problématique des faux diplômes et des CV truqués en assignant à chaque diplôme une clé unique dont le numéro est crypté dans une blockchain, empêchant les fraudes.
La blockchain serait avant tout un moyen de lutter contre la cybercriminalité et les fraudes, mais aussi un enjeu de souveraineté en offrant la possibilité aux citoyens de reprendre le contrôle dans des domaines qui les dépassent.
Nos spécialistes rappellent qu’aujourd’hui, des entreprises comme Google ou Facebook ont nos données personnelles, mais leurs serveurs sont vulnérables aux attaques informatiques et dépendent souvent des choix du gouvernement américain. La blockchain permettrait de reprendre le pouvoir sur ces données en assurant l’inviolabilité du stockage des informations personnelles de chacun par un système de cryptage.
Mais, pour autant, sera-t-on prêt à faire confiance à une machine plutôt qu’à un tiers de confiance comme vous et moi pour tous les usages ? Débat à suivre.