Le boom maritime mondial… à crédit écologique
Le 1er avril 2025, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié une projection détaillée du futur de l’économie de la mer à l’horizon 2050. Si les courbes de croissance donnent le tournis, les signaux écologiques, eux, virent au rouge.

Dans cette dynamique accélérée, la pêche, l’aquaculture, l’extraction de ressources et même le tourisme s’imposent en champions économiques… mais à quel prix pour les écosystèmes marins ?
La pêche en eaux troubles : pilier nourricier et source de tension
L’un des secteurs historiques de l’économie de la mer, la pêche maritime, est aujourd’hui sous pression. La filière concentre une forte diversité de métiers et une multitude de structures, mais souffre de surexploitation des stocks, de dégradations environnementales et d’incertitudes économiques, met en garde l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son dernier rapport sur le sujet. La pêche, notamment, est une activité soumise à des « tensions écologiques croissantes, en particulier sur les espèces démersales et les crustacés ». En effet, la productivité du secteur halieutique stagne, tandis que l’empreinte environnementale des techniques de pêche industrielles demeure élevée.
Parallèlement, l’aquaculture marine, censée soulager la pression sur les ressources sauvages, ne tient pas toutes ses promesses. Certes en croissance, elle reste vulnérable à la pollution, aux maladies et à la contamination des milieux côtiers, notamment en Asie, qui domine la production mondiale.
Tourisme côtier : moteur économique, facteur d’érosion
Avec près de 789 milliards de dollars générés en 2019, le tourisme marin et côtier est aujourd’hui l’un des poids lourds de l’économie de la mer. Mais son impact environnemental est considérable : artificialisation des littoraux, pression sur les espaces naturels protégés, consommation massive de ressources, pollution plastique et hausse des émissions liées aux transports. L’OCDE met en garde : « La concentration des flux touristiques dans les zones côtières sensibles aggrave les pressions écologiques, notamment sur les récifs, les mangroves et les herbiers marins ».
Énergies marines, minerais et câbles : une nouvelle ruée vers le bleu profond
Sous couvert de transition écologique, les océans attirent désormais les appétits énergétiques. Si l’éolien offshore ou l’hydrolien apparaissent comme des alternatives vertueuses, leur développement soulève déjà des conflits d’usage avec la pêche artisanale et les associations environnementales. En mer du Nord, certaines zones sont devenues ingouvernables, tant les intérêts divergent.
Quant aux projets d’exploitation minière des grands fonds, encore embryonnaires mais soutenus par plusieurs États, ils inquiètent profondément la communauté scientifique. L’OCDE alerte dans son rapport : « L’impact écologique de l’extraction des ressources minérales sous-marines reste largement inconnu, mais pourrait être irréversible sur les écosystèmes abyssaux ».
Le paradoxe est cruel : les océans, en tant que régulateurs climatiques, sont à la fois solution et victime du modèle actuel. L’OCDE affirme qu’« un océan sain est essentiel à la biodiversité mondiale et à la résilience climatique », mais les politiques publiques ne suivent pas toujours cette ligne directrice.
Des mers à bout de souffle : l’économie de la mer, et après ?
La croissance de l’économie de la mer est indéniable. Entre 1995 et 2020, sa valeur réelle a doublé, passant de 1.300 à 2.600 milliards de dollars. Mais cette expansion s’est accompagnée d’un effondrement relatif de la biodiversité, d’une multiplication des zones mortes et d’un épuisement des ressources halieutiques traditionnelles. Dans son rapport, l’OCDE avertit que, sans transition énergétique, planification durable ni collecte de données renforcée, le secteur pourrait être condamné à une impasse structurelle. Il souligne quatre leviers urgents : gouvernance intégrée, inclusion des pays en développement, accélération technologique et données ouvertes.
La France, avec ses 11 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), a un rôle pivot à jouer. Encore faut-il qu’elle passe des intentions aux actes. Les rapports sont clairs. Les échéances, elles, ne le sont plus.
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