Manger local est une tendance qui croît au Canada et aux Etats-Unis, bien que cela relève parfois d’un véritable casse tête. En France, le mouvement se développe lentement. consoGlobe a interrogé Stéphane Linou, créateur de la première Amap dans l’Aude, qui a tenté l’expérience de manger uniquement des produits locaux pendant 1 an…
Dans quel contexte avez-vous décidé d’être locavore ?
S.L : Tout à commencé quand j’ai décidé de créer la première Amap du Département de l’Aude en 2004. A l’époque, tout le monde en rigolait. J’ai mis en place le premier groupe de consommateurs, mais pour cela, il a quand même fallu attendre deux ans pour trouver un maraicher, car il en manque beaucoup en France. Et je me suis dit : « tiens, si il y a une rupture d’approvisionnement un jour, comment cela se passerait-il avec ce manque de maraichers ? »
Puis, plus tard, j’ai entendu parler d’un journaliste canadien qui avait tenté l’expérience de se nourrir exclusivement de produits locaux. J’ai donc décidé de tenter l’expérience à mon tour pour tester la vulnérabilité de l’Amap en termes d’approvisionnement.
J’entendais les gens autour de moi qui trouvaient l’idée farfelue et me disaient « tu vas te ruiner, c’est beaucoup plus cher« , » « manger local, ça entraine des carences »…etc. Lors de mon expérience, je me suis fait suivre médicalement.
Les gens se demandaient comment je faisais ! Je me suis beaucoup débrouillé, je voulais me nourrir uniquement avec des produits locaux pendant un an, et cela a marché. L’histoire a beaucoup intéressé les collectivités locales, les écoles et les associations, d’où la mise en place de plusieurs programmes. Depuis la fin de mon expérience dans la peau d’un locavore, je le suis aujourd’hui à 70 % environ.
Consommer des produits locaux, est-ce possible pour tout le monde ?
S.L : Cela dépend où on est ! Même en milieu rural c’est compliqué car dans certaines zones, il peut très bien il y avoir la terre, l’eau, le soleil…mais pas de légumes. Même lorsque toutes les conditions sont réunies, des territoires sont si spécialisés dans un produit en particulier qu’ils sont obligés de faire venir de loin certaines productions.
Manger réellement local n’est pas facile. Je le vois au niveau de la restauration collective et des écoles : de plus en plus de parents d’élèves demandent aux mairies et au Conseil Régional d’intégrer des produits bio et/ou locaux dans les menus. Mais concrètement, l’offre ne suit pas car nous sommes trop spécialisés. Lors de mon expérience, j’ai pu constater qu’il y avait assez de produits locaux pour me nourrir, mais pour toute une population, ce n’est pas encore le cas.
Comment peut-on valoriser davantage les produits locaux ?
S.L : Il n’y a pas que les Amap pour mettre en avant les produits locaux, il y a également les marchés de plein air ! Il y a une certaine prise de conscience des consommateurs, ce qui est bien, mais pour valoriser les produits locaux il y a toujours ce manque de maraichers sur le plan national, qui est un vrai problème, notamment pour les consommateurs en Amap.
D’un point de vue médical, votre médecin a-t-il constaté des changements chez vous ?
S.L : C’est drôle car lorsque je suis allé la voir, elle m’a dit » que veux-tu que je te dise ? Rien n’a changé ! ». J’ai eu une santé tout à fait normale lors de cette expérience. J’ai pu continuer à travailler, à être pompier volontaire, à faire la fête… Je n’ai jamais eu de malaise, seulement un gros rhume pendant deux semaines. C’est tout !