C’est à l’occasion de ses voeux à la presse que Pierre-Franck Chevet, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), a émis un constat qui fait froid dans le dos : les anomalies sur les centrales nucléaires françaises ont certes été nombreuses en 2016, mais globalement, la situation ne s’améliore pas.
Un grand nombre d’irrégularités
Un grand dossier est tombé entre les mains de l’ASN en 2016 et il concerne une dizaine de réacteurs nucléaires. Il s’agit de concentrations de carbone trop élevées dans les fonds de certains générateurs de vapeur. À l’époque, les réacteurs touchés sont arrêtés, mais maintenant, « ça se passe plutôt bien », a déclaré Pierre-Franck Chevet. Mais les malheurs du nucléaire français ne s’arrêtent pas là : en mai 2016, Areva a été prise en flagrant délit. L’entreprise mettait de côté dans des dossiers barrés les résultats qui n’étaient pas conformes aux exigences de sûreté. Ces dossiers seraient au nombre de 10.000.
Le truquage a été découvert lorsqu’une anomalie est constatée sur la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche). Les pièces de celle-ci ont été fabriquées à l’usine de Creusot Forge (Manche) : une perquisition a alors permis de mettre au jour ces pratiques, courantes au sein de l’usine. Résultat de l’enquête : des irrégularités dans le contrôle de fabrication d’environ 400 pièces produites depuis 1965 ont été découvertes. Une cinquantaine de ces pièces seraient en service sur le parc électronucléaire français. Lors de ses voeux à la presse, Pierre-Franck Chevet a répété que la justice était saisie sur ce sujet.
Les lobbys n’épargnent pas l’ASN
L’ASN déplore qu’EDF ne possède pas de plan B : l’Autorité lui avait pourtant fait part de la situation, le prévenant que lors de son installation dans le réacteur nucléaire, la cuve pourrait ne pas être homologuée. Dans son discours, Pierre-Franck Chevet s’est également attaqué à ceux qui font pression sur l’ASN. D’anciens employés d’EDF ont critiqué le rapport sur les défauts constatés à l’EPR de Flamanville. Les industriels ne restent pas non plus muets, de même que les associations anti-nucléaire. Pierre-Franck Chevet a tenu à assurer que même si l’ASN prête une oreille à ce qui « se passe autour », elle conserve son indépendance.
Sur le prolongement de la durée de vie des réacteurs, l’ASN devrait remettre des rapports en 2019. Pierre-Franck Chevet a d’ores et déjà déclaré que ce sujet était « tout sauf un sujet évident ». Une cinquantaine de réacteurs qui n’y étaient pas soumis jusqu’à présent passeront un examen de sûreté. Par ailleurs, 25 dossiers sont en cours d’instruction et l’ASN s’attend à en examiner encore une trentaine dans le courant de l’année 2017.
Illustration bannière © Martin Lisner – Shutterstock
A lire absolument
Pas de plan B, ca veut dire beaucoup, personne ne réfléchi sur le sujet?