Parfois, la technologie a du bon : ainsi, nous vivons actuellement un véritable « âge d’or de l’ornithologie », estime le journaliste et ornithologue Scott Weidensaul. La traduction de son ouvrage « Le Monde à tire-d’aile » vient enfin de paraître chez Actes Sud.
Capteurs miniatures et géolocalisation
En effet, la miniaturisation des capteurs embarqués sur les oiseaux et la géolocalisation rendent possibles de nos jours des observations inédites jusque-là en termes de précision. De quoi permettre aux scientifiques qui les suivent, via les réseaux des radars au sol, de révéler les véritables super pouvoirs des oiseaux migrateurs. Des champions du ciel à l’instinct infaillible leur permettant de réaliser des prodiges au cours de leurs migrations annuelles. De quoi réaliser à quel point on avait sous-estimé jusque-là l’immensité des capacités physiques des oiseaux migrateurs.
Tout au long de leur odyssée mondiale, ils peuvent ainsi effectuer l’équivalent de 126 marathons consécutifs sans boire ni manger tel le minuscule bécasseau de l’Anadyr (30 cm et 250 g) qui va d’Australie en Corée. Ou bien ne pas dormir pendant des semaines, voire utiliser la physique quantique pour s’orienter de nuit dans le brouillard… Ainsi, la sterne arctique parcourt la bagatelle de 80 000 km au cours de sa migration annuelle d’un pôle à l’autre.
Lire aussi – Comment les oiseaux migrateurs se protègent du soleil ?
Des exploits incroyables
Celui qui observe les oiseaux depuis l’enfance propose de vivre ces migrations de l’intérieur et d’être littéralement parmi les oiseaux. Car il faut aussi imaginer les capacités physiologiques qui permettent à ces oiseaux d’accomplir de tels vols. Ainsi, pour franchir l’Himalaya en volant à 7200 m d’altitude, les oies à tête barrée ont développé un système respiratoire capable de renouveler l’air à très haute altitude. Certains oiseaux peuvent s’alléger en rétrécissant leurs organes digestifs et reproducteurs le temps du vol.
De même, afin d’effectuer un vol sans escale de sept à neuf jours entre l’Alaska et la Nouvelle-Zélande, les barges rousses accumulent l’équivalent de 17 fois plus de graisse dans leur métabolisme avant de partir. Un surplus de graisse qu’elles brûleront tout au long du vol sans se déshydrater pour autant. On sait aussi que pour s’orienter, ces grands migrateurs possèdent une boussole magnétique dans leurs yeux, leur permettant de se repérer constamment grâce au champ magnétique de la terre, de jour comme de nuit.
Le monde à tire-d’aile : L’odyssée mondiale des oiseaux migrateurs
Scott Weidensaul, l’un des plus grands vulgarisateurs scientifiques américains, propose aux lecteurs de vivre ces migrations de l’intérieur et d’être, enfin, oiseau parmi les oiseaux.
Les oiseaux, résidents du monde
Dans Le Monde à tire-d’aile, Scott Weidensaul alerte également sur l’impact des changements climatiques sur les itinéraires et les performances de ces oiseaux. Demain, pourront-ils continuer de voyager ? En effet, rappelle l’auteur de cet ouvrage, les dommages causés à la planète par l’activité humaine se répercutent sur la connectivité migratoire de ces oiseaux par essence habitants du monde. Ils « ne sont pas les résidents d’un lieu donné, mais bien les habitants du tout. Des créatures dont le cycle de vie complet doit être compris si nous voulons avoir une chance de les préserver contre les assauts qu’elles subissent à chaque instant et à chaque étape de leur voyage migratoire. »
Pour autant, la volonté politique permet d’empêcher le déclin des migrateurs, par ailleurs parmi premières victimes du dérèglement climatique. Que ce soit en Chine, en Inde ou aux États-Unis, des décisions d’interdiction d’urbanisation ou d’abattage ont permis d’inverser le cours des choses. De quoi permettre à de nouvelles générations d’oiseaux de transmettre leurs gènes et leur instinct migrateur.
Lire aussi
5 faits étonnants sur la migration animale