Si vous devez choisir entre arômes naturels et arômes artificiels dans une liste d’ingrédients, il y a fort à parier que vous éviterez plutôt les seconds pour privilégier les premiers. La vérité n’est pourtant pas si simple.
Un arôme naturel est-il vraiment naturel ?
Si tout le monde ne scrute pas les étiquettes de tous ses produits, un nombre croissant de consommateurs cherche pourtant à éviter certaines ingrédients comme les OGM, l’huile de palme, ou encore les arômes artificiels.
Aux états-Unis, le Groupe de travail sur l’environnement (Environmental Working Group, EWG) a publié en 2014 un rapport sur les arômes naturels et les arômes artificiels, renouvelé depuis en 2019(1). Et il s’avère que « quand on parle des arômes naturels et artificiels, il y a peu de différence. »
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Arôme naturel de fraise
Il ne s’agit en effet que d’un mot et que ça soit dans la cosmétique ou l’alimentaire, le « naturel » n’est pas un contrat, il ne s’agit que d’une étiquette, non contrôlée. Quand on choisit un « arôme naturel », le produit est peut-être plus attirant mais pas plus… naturel.
D’un point de vue légal, en France, on ne trouvera de toute façon plus « arôme artificiel » ni même « arôme synthétique ». Dans les produits alimentaires, on ne trouvera pas le mot « parfum » dans les ingrédients, mais bien seulement « arôme ». Pour les produits aromatisés, les termes en vigueur sur les emballages sont les suivants : le simple « arôme » l’expression « arôme naturel » ou encore « arôme naturel de ».
Il y a alors une distinction majeure puisqu’un « arôme naturel de fraise » doit être constitué à 95 % d’ingrédients issus de la fraise : « pour que cette dénomination soit utilisable, au moins 95 % de la partie aromatisante de l’arôme doit provenir du produit »(2) tandis que l’ « arôme fraise » est synthétique.
Du naturel pas naturel ?
Au sens strict, un arôme naturel est dérivé d’un ingrédient naturel, qu’il soit animal ou végétal, mais il reste synthétisé en laboratoire. Cela garantit une « sécurité absolue souvent obtenue par des traitements technologiques »(3), mais s’oppose au mythe de l’aliment naturel.
Si l’on a affaire à un arôme naturel, tous les ingrédients de la formule sont naturels, mais cela n’empêche pas la présence de solvants. Les arômes utilisés peuvent potentiellement contenir des solvants, des émulsifiants et des conservateurs, des substances n’ayant pas à être déclarées dans la liste des ingrédients puisque encapsulés sous l’appellation « arôme ».
La différence est la qualité de l’arôme, et sa perception par nos sens. Si l’arôme naturel a des origines naturelles, l’EWG souligne bien que cela n’empêche pas l’arôme d’avoir une structure chimique complexe, plus complexe que l’arôme synthétique. C’est également ce que met en évidence Hubert Richard, professeur émérite à l’école nationale supérieure des industries agricoles et alimentaires (ENSIA). Un arôme de café est ainsi composé de plus de 800 composés volatils.
Certains produits alimentaires voient leur note aromatique liée à un seul composé, c’est le cas de la menthe poivrée (via le I-menthol). Dans d’autres cas, on va composer une formule pour imiter l’aliment. On utilise ainsi, par exemple, 2-éthyl-butyrate de méthyle, le trans-2-hexènal et l’héxanal pour un arôme de pomme(4).
Arôme naturel : une différence de qualité
Finalement, le seul arôme naturel que vous pourrez trouver est bien celui des ingrédients frais : pourquoi choisir un arôme de fraise quand on peut manger une fraise ?
Eh bien, déjà parce qu’avoir des arômes en cuisine permet de bénéficier des produits hors saison. En outre, le consommateur cherchant à allier sécurité alimentaire et naturel, l’industrie alimentaire trouve des stratégies. Les plantes sont plus ou moins transformées de manière à obtenir des produits finis aux qualités variables(7).
Les extraits naturels bruts de plantes
D’où le choix d’utiliser des extraits de plantes plutôt que des produits. Prenons l’exemple des plantes aromatiques : il sera plus sûr et plus facile d’utiliser les extraits dans la chaîne de production.
Pour les épices et les aromates on parle toutefois d’ « extraits naturels bruts ». Cela pourrait paraître plus sûr, mais, une fois encore, la qualité sera inhérente aux conditions de production. Selon Hubert Richard, « Selon l’origine des plantes (espèce, variété), l’écologie du milieu et le soin apporté par les pays producteurs (modes de récolte, de collecte, de préparation, de séchage, de stockage, de conditionnement), les épices et aromates présentent des variations importantes dans la composition des extraits »(6).
Les oléorésines
Certains arômes correspondent aux oléorésines, extraits à l’aide de solvants sans risque de toxicité. On distingue les concrètes, extraites à partir de substances végétales fraîches, et les résinoïdes, extraits à partir de substances végétales sèches.
D’autres techniques thermiques ou à froid
Parmi les autres techniques, on utilise notamment les réactions de Maillard, les caramélisations, la pyrolyse, l’ébullition, la percolation à froid, l’infusion, la macération à froid. Pour les fruits, on peut utiliser l’infusion, l’alcoolat ou les jus concentrés.
On peut également produire des arômes naturels par voie microbienne. Et ce en attribuant des matières organiques prédéterminées à des champignons, des bactéries ou des levures.
Les extraits naturels affinés
Les extraits naturels bruts sont parfois affinés par fractionnement. Les méthodes divergent et permettent la création de produits différents comme les essences fractionnées et les absolues (par lavage à l’alcool).
Quels arômes utiliser en cuisine ?
Dans bien des cas, il sera toutefois possible d’utiliser des arômes réellement naturels. On préférera également le bâton de vanille à l’arôme de vanille.
On peut également envisager, dans les limites des précautions d’usage évidemment, certaines huiles essentielles utilisables en cuisine, comme la menthe poivrée ou le citron.
Huile Essentielle de citron bio
L’huile essentielle ou essence de Citron est en fait un extrait issu du zeste et non issu de la distillation à la vapeur d’eau.
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Article republié
Illustration bannière : L’arôme naturel est relativement rare en pâtisserie industrielle – © Dean Drobot
- https://perfectketo.com/natural-flavors/
- Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF)
- CROUZET, Jean. Arômes alimentaires. Ed. Techniques Ingénieur, 2004.
- Richard, Hubert. Les arômes alimentaires : http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-aromes-alimentaires-384/
- Arctander, Steffen. Perfume and flavor chemicals (Aroma chemicals). Montclair, N.J. (États-Unis), 1969.
- Richard, op.cit., p. 8.
- Arctander, Steffen. Perfume and flavor chemicals (Aroma chemicals). Montclair, N.J. (états-Unis), 1969.
@YOURI : dans l’article 16 du Règlement CE 1334/2008 il est bien mentionné que si vous indiquez « arôme naturel de » la partie aromatisante est obtenue au minimum à 95% du matériau de base , donc de la fraise dans votre exemple
Je suis étonné que l’article ne parle pas de ce qu’il y a de plus étonnant dans ce domaine : les arômes naturels produits par voie microbienne.
C’est tout une science, qui consiste à produire des arômes en donnant des matières organiques bien choisies à des champignons, levures ou bactéries spécifiques.
Quand on lit par exemple « arôme naturel de fraise », il y a très peu de chance qu’il y ait le moindre pourcentage de fraises dedans (il est entre autres produit à partir de copeaux de bois).
J’ai oublié de préciser que les termes « artificiel » ou « synthétique » n’existaient plus d’un point de vue législatif et donc ne figurent plus sur les emballages . Vous ne trouverez que « arôme » , « arôme naturel » ou « arôme naturel de »
Ce qui me choquait dans votre article c’était le terme « parfum » qui a été corrigé.
En ce qui concerne la désignation des arômes sur les emballages et qui prête vraiment à confusion c’est la chose suivante
par exemple un « arôme naturel de fraise » = arôme dont 95% des constituants sont issus de la fraise en revanche « arôme fraise » = arôme 100% synthétique
Un parfum est utilisé en cosmétique , un arôme dans les produits alimentaires. L’auteur de ce texte mélange les deux et ne maîtrise pas le sujet créant une fois de plus la confusion auprès des consommateurs.
Cependant que l’on utilise un parfum ou un arôme et que le terme naturel est utilisé sur l’emballage , cela veut dire que tous les ingrédients de la formule sont naturels , y compris les solvants!
Le relecteur avait pris quelques libertés, c’est corrigé.
Justement non, c’est un dérivé d’un produit naturel mais il n’y a pas d’obligation en ce qui concerne tous les ingrédients de la formule.
Le Codex alimentarius précise d’ailleurs à ce sujet : « Les arômes naturels et les substances aromatisantes naturelles sont respectivement des préparations et des substances simples, acceptables pour la consommation humaine, obtenues exclusivement par des méthodes physiques, microbiologiques ou enzymatiques à partir de matière première d’origines végétales ou animales, soit telles quelles, soit après transformation en vue d’une consommation humaine par des procédés traditionnels de préparations des aliments. »
Une transformation légère est autorisée. Oui, cela limite la casse, mais tous les ingrédients ne sont pas indiqués sur l’étiquette. L’article n’a pas pour but de crier au loup mais plutôt de sensibiliser sur un terme, « naturel », qui est utilisé à plus ou moins bon escient.
Donc si je comprends bien l’article, mieux vaut ne pas consommer de produits contenant un ou des arômes, qu’ils soient naturels ou artificiels.
Merci pour l’info Alan !
Bien sûr nous avons tout intérêt à choisir les arômes naturels, le problème et je pense surtout aux jeunes et aux enfants,est que leurs papilles ont été très tôt dénaturées par la chimie en général, et en particulier le goût, et bien souvent, ils trouvent fades des arômes fins et subtils, à côté des arômes chimiques qui heurtent le palais.
Il se crée de plus en plus d’associations pour le circuit court de produits bio…direct producteurs.