« Des Jeux avec les Parisiens, avec les Français, avec le Monde (…) Des Jeux ouverts à tous, des Jeux qui contribuent à protéger les gens et la planète, des Jeux qui rayonnent et permettent à chacun de partager ses émotions. Les Jeux parce qu’ils aident à construire mieux le monde de demain » promet le projet Paris 2024 pour les Jeux Olympiques dont le choix de la ville candidate sera officiellement révélé le 13 septembre prochain. Ce dessein peut paraître idéaliste au vu du flot d’affaires ayant fait la une des journaux et terni l’image du sport pendant de nombreuses années.
Sans compter, corruption, paris truqués, dopage, prostitution, racisme… Peut-on vraiment parler d’innovation sociale et de sport dans la même phrase ? C’est ce qu’ont exploré des spécialistes mercredi 3 mai, réunis Up Campus, Play International et l’Enquête Sport à Paris : David Blough, Directeur exécutif PLAY International, Virgile Caillet, Délégué général UNION sport & cycle, Marie-Christine Lanne, Directrice de la communication et des engagements sociétaux Generali, Lola Virolle, Startup Program Manager chez Paris Pionnières et Vincent Edin, journaliste.
29 millions de Français ont une pratique sportive régulière
« Plus de 29 millions de Français ont une pratique régulière du sport et près de 17 millions sont licenciés, dont 12 millions d’adultes. Le sport est aujourd’hui le loisir favori des Français« , soulignait Virgile Caillet en introduction de ce débat. Ancré dans leur quotidien, 67 % des Français se disent intéressés par le sport, seuls 10 % sont totalement réfractaires. La preuve en est sur nos écrans de télévision : « Le sport est le seul sujet présent dans tous les JT quelle que soit l’heure de passage« .
En plein essor, il représente une manne financière considérable. Le poids économique du sport en France est estimé à 38,1 milliards d’euros, soit 2 points du PIB(1). Les premiers contributeurs économiques sont les foyers, les collectivités territoires, suivi du « sport business« .
Une législation favorable
Il faut dire que les récentes évolutions législatives encouragent le développement de la pratique sportive. Depuis le 1er mars 2017, les médecins généralistes peuvent prescrire des séances de sport à leurs patients. Pour l’instant, seuls les patients souffrant d’une Affection Longue Durée (ADL) sont concernés, ce qui représente quand même 10 à 11 millions de personnes en France. À travers cette mesure, c’est la bascule durable d’un public vers une activité sportive suivie et régulière qui est recherchée.
Quels sont les grands chantiers d’avenir dans le monde du sport ?
Symbole du vivre-ensemble, facteur de socialisation et de l’échange intergénérationnel, le sport voit son influence s’étendre dans notre vie quotidienne. Aujourd’hui, la pratique sportive et la façon de l’appréhender sont en profonde mutation. De nouveaux domaines d’activités émergent que les entreprises françaises ne doivent pas manquer.
Parmi les secteurs encore peu développés en matière de sport, la silver économie apparaît comme un domaine porteur dans un contexte de vieillissement de la population.
Les seniors bénéficient de revenus et de temps pour profiter de cette nouvelle vie. Pourtant, seul un Français de 55 à 64 ans pratique une activité sportive pour la simple raison que l’offre ne semble pas suffisamment adaptée à leurs besoins. Les activités sportives les plus pratiquées par ces derniers sont la marche, la chasse, le tir, la pétanque et la gymnastique. Lieu de socialisation, le sport peut également permettre de lutter contre l’isolement.
Le sport s’attache à combattre les problèmes d’absentéisme au travail, de confiance en soi, et de hausse de la productivité. Un sondage réalisé de 2015 par le Medef, le Comité national olympique et sportif français et AG2R La Mondiale révélait qu’une pratique modérée du sport augmenterait de 5,7 % la productivité d’un salarié et jusqu’à 8,6 % pour une activité physique et sportive très intense.
S’il est déjà mis en place dans les firmes multinationales comme Google, le sport en entreprise continue de faire débat en France. « À mi-chemin entre la sphère privée et publique, beaucoup d’entreprises rechignent à le mettre en place« , explique la Directrice de la communication de Generali. Pourtant, de plus en plus d’employés sont favorables à cette pratique. 78 % d’entre eux seraient prêts à faire du sport si les conditions étaient réunies. En plus, l’étude indique qu’une activité sportive permettrait à la société civile d’économiser entre 300 et 350 euros par salarié par an, celui-ci diminuant ses dépenses de santé.
Le sport encourage une nouvelle pédagogie et véhiculer certaines valeurs. L’éducation par le sport est un concept qui commence à s’implanter dans l’Éducation nationale à travers la mise en place des activités périscolaires ou de la lutte contre l’obésité infantile. C’est également utilisé par certaines ONG qui promeuvent la solidarité internationale ou encore les actions éducatives et thérapeutiques par le sport.
Au Burundi, les plus jeunes apprennent à compter grâce au sport
« À Haïti, les humanitaires ont créé des activités sportives pour les enfants afin de leur apprendre les dangers du choléra. Au Burundi, les plus jeunes ont appris à compter grâce au sport« , s’enthousiasme David Blough. Marie-Christine Lanne illustre cela avec l’association Lames de joie : rendues célèbres par Oscar Pistorius, le sprinter sud-africain amputé des deux jambes, elles permettent aux amputés tibiaux et transféromaux de courir avec une ou deux lames, quelle que soit la hauteur de l’amputation.
La pratique sportive est également de plus en plus utilisée par les mairies et les écoles, comme une solution de santé publique, notamment face à l’accroissement de l’obésité infantile en France, ainsi que pour favoriser l’intégration des enfants.
Plus qu’un loisir, le sport est un art de vivre-ensemble
Encore trop souvent considéré comme un simple loisir, le sport est un fabuleux outil pour le vivre-ensemble et aborder les problèmes sociaux différemment. « S’il est évident qu’il est un facteur d’innovation sociale, des combats sont encore à mener pour que le sport puisse atteindre toutes les catégories de population telles que les femmes qui sont encore largement sous-représentées dans les instances dirigeantes et dans certains sports« , insiste Lola Virolle. Cela se fera progressivement par une prise de conscience des pratiquants. « Si le mouvement sportif n’est pas en capacité d’être pro-actif, alors les acteurs du privé répondront à cette demande, et cela se fera au détriment de l’innovation sociale« , alerte Virgile Caillet.
Comme le disait Pierre de Coubertin : « Si les Français savaient le rôle de l’intelligence et la volonté, la part de l’esprit et de caractère dans la plupart des sports, avec quel entrain ils y pousseraient leurs enfants » !