Du côté des ONGs : « l’utilisation de l’argument écologique est un problème essentiel »
Nous avons aussi interrogé Jacques-Olivier Barthes, directeur de la communication du WWF France, pour lui demander son analyse d’expert de la communication environnementale quant à cette campagne.
consoGlobe.com – Le greenwashing est une réalité : comment le WWF le combat-il ? Quelles stratégies de communication vous semblent les plus efficaces pour faire bouger les pratiques et les réglementations ?
Jacques-Olivier Barthes – L’utilisation abusive de l’argument écologique dans la communication commerciale ou institutionnelle des entreprises est en effet un problème essentiel d’une part, parce qu’il sape la confiance globale de l’opinion publique dans la capacité du monde économique à entamer la nécessaire métamorphose de sa vision stratégique et de ses pratiques opérationnelles afin de mieux inclure l’impératif écologique et d’autre part, il nuit aux entreprises qui se sont engagées sincèrement dans une démarche de progrès environnemental, qui en supportent les contraintes et qui se trouvent en compétition avec des entreprises qui s’en prévalent sans en supporter les contraintes.
De 2005 à 2012, le WWF France s’est beaucoup impliqué dans la sensibilisation des consommateurs-citoyens, des pouvoirs publics et des entreprises au risque « d’éco-blanchiment ». Dans le cadre du Grenelle de l’environnement (2007) le WWF a fortement porté la nécessité d’une révision du cadre de régulation des allégations environnementales. Cette action, soutenue dans le cadre de la coalition inter-associative Alliance Pour la Planète, a été à l’origine de la création de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité en place du Bureau de Vérification de la Publicité. Trois améliorations notables sont à mettre en avant :
- La création d’un Jury de Déontologie Publicitaire qui permet de sanctionner un annonceur qui ne respecte les codes de déontologie ;
- La création d’un organe ouvert au monde associatif ;
- Une recommandation sur l’utilisation de l’argument écologique plus contraignante.
Cela étant, cette évolution n’a pas été jugée suffisante, car n’intégrant pas assez la société civile. C’est la raison pour laquelle le WWF France a été à l’origine de l’Observatoire Indépendant de la Publicité, site qui vise à la fois à permettre aux internautes de dénoncer les annonceurs qui abusent encore de l’argument écologique.
En l’état, la question doit être traitée par plusieurs approches :
- Alerter l’opinion publique et les médias dans le cas d’abus constatés ;
- Éduquer les citoyens afin qu’ils soient en capacité de décrypter les situations d’utilisation abusive ;
- Accompagner les annonceurs et les agences de communication qui souffrent souvent d’un problème de formation ;
- Pousser à l’intégration d’enseignements de déontologie dans les écoles de commerce et les écoles de communication ;
- Proposer des pistes d’amélioration du cadre de régulation (normes et codes de conduite) ;
- Faire sanctionner par les juridictions quand c’est nécessaire.
consoGlobe.com – Différentes ONGs ciblent des entreprises particulières, emblématiques de problèmes à résoudre. Est-ce que vous estimez que dénoncer des entreprises pour des pratiques inacceptables est une manière efficace de faire évoluer leurs comportements ?
Le naming et shaming est une stratégie relativement efficace de construction d’un rapport de force. Pointer du doigt des attitudes insupportables et mettre un terme à un certain sentiment d’impunité est souvent une nécessité, en particulier pour mettre sous pression certaines entreprises qui opèrent dans des pays en développement d’une façon très éloignée des valeurs qu’elles prônent dans les pays du Nord. Cette approche a donné de très bons résultats et amené des changements significatifs.
consoGlobe.com – Soutenez-vous donc l’initiative du Prix Pinnochio ?
Nous avons soutenu l’initiative lors des trois premières éditions. Depuis, nous le faisons plus.
consoGlobe.com – Pourquoi ?
C’est simple. Nous ne travaillons plus sur la thématique du greenwashing.
Pétition humoristique
Sur une mode humoristique, vous pouvez signer l’appel « laissez-nous polluer ! » qui demande aux « amis pollueurs » de soutenir la fracturation hydraulique, les OGMs, la déforestation ou encore le nucléaire. « L’heure est grave de plus en plus de personnes s’occupent de l’intérêt général et de la planète, nous devons nous unir pour nos intérêts particuliers », dénoncent, de manière ironique, les organisateurs.