La Colombie, pays réputé pour produire le meilleur café du monde, en exporte plus de 12 millions de sacs de 60 kg en moyenne (14,5 millions cette année d’après Vincente Ramirez) dans le monde. Un secteur d’activité qui fait vivre 580.000 familles, tandis que le gouvernement incite de plus en plus les producteurs à remplacer la coca par le café.
Coopératives de café : témoignage d’un producteur de café colombien – Vincente Ramirez
Vincente Ramirez représente la 3e génération de producteurs de café. Lui-même passionné par la culture de cette plante, il a fait le choix de perpétuer la tradition sur les terres de la finca familiale située en plein coeur de l’axe du café colombien, El Eje Cafetero : les régions de Quindio, Risaralda et Caldas où se concentre la majeure partie de la production colombienne.
ConsoGlobe.com a tenu à lui poser quelques questions lors de son récent passage en France sur l’invitation de Max Havelaar.
ConsoGlobe.com – Pouvez-vous nous parler de votre parcours pour devenir producteur de café indépendant
Vincente Ramirez : Ma famille est une famille de cafeteros (producteurs de café). Nous cultivons le café depuis plus de 50 ans, et très jeune, j’ai souhaité m’inscrire dans cette continuité par vocation. J’ai donc suivi une formation en gestion et production de café puis travaillé quelques temps comme technicien en caféiculture… Avant de revenir m’installer sur mes terres, et comme 90 % de la population de cette cordillère, vivre du café.
ConsoGlobe.com – Quelle sorte de café cultivez-vous ?
Vincente Ramirez : La Finca Guadualito produit plusieurs variétés douces d’arabica, qui ne sont pas typiques de la région. Nous récoltons 130 sacs de 60 kg de café annuellement et sommes producteurs Fairtrade depuis 2004.
Dominés par trois sommets s’élevant à 3.300 m, Belalcázar notre village, se situe dans la zone où l’on produit le meilleur café de Colombie (pour ne pas dire du monde !), sur les sols volcaniques des cordillères basses entre 1.400 et 2.000 m altitude.
ConsoGlobe.com – Les changements climatiques impactent fortement les producteurs de café en Éthiopie par exemple. Qu’en est-il en Colombie ?
Nous constatons que les hivers sont plus longs. Or traditionnellement, une fois récoltés, les grains de café vert sont mis séchés sur les toits des maisons. Mais à présent, pour obtenir un résultat concluant, nous devons avoir recours à des silos mécaniques pour faire ce travail qui se faisait naturellement auparavant.
Lire aussi : Café : les grands crus éthiopiens menacés par le réchauffement climatique
ConsoGlobe.com – Comment écoulez-vous votre production ?
Vincente Ramirez : Les producteurs de café de la région se sont regroupés en 1967 en une coopérative, Caficultores de Anserma (caféiculteurs d’Anserma), dont je suis membre producteur depuis plus de 35 ans maintenant. Je préside également le conseil d’administration.
Notre coopérative réunit les producteurs de cinq municipalités : Anserma, Risaralda, San José, Viterbo et Belalcázar. Nous comptons aujourd’hui 2239 associés.
Lors de des Assemblées générales, les priorités de la communauté de producteurs sont décidées ensemble, et chaque membre donne sa voix pour nommer les délégués qui vont représenter ses intérêts. Chacun est aussi libre de faire partie de la coopérative ou de la quitter à tout moment.
Nous écoulons une partie de notre production auprès d’une grande marque, c’est un client important. Chaque producteur fixe le prix de sa production, la planification des ventes se fait avec 6 mois d’avance : c’est plus facile et rassurant pour nous, puisque l’écoulement est garanti, et le revenu également.Caficultores de Anserma donne ainsi à ses principaux acteurs, les producteurs de café, plus de stabilité et de sécurité, en toute autonomie. Une telle association permet de progresser vers une meilleure production de café en terme de volume et de qualité.
ConsoGlobe.com – Le café des Caficultores de Anserma est certifié commerce équitable. Concrètement, quels en sont les bénéfices ?
Vincente Ramirez : Outre le paiement d’un prix minimum juste et garanti pour la production et le respect des conditions sociales de base, adhérer aux principes du commerce équitable implique aussi de reverser un pourcentage du prix des ventes dans un fonds spécial.
Selon la priorité des membres de la coopérative, cette dernière décide du ou des projet(s) dans lequel cet argent sera investi. La coopérative Caficultores de Anserma a souhaité le développement de 4 programmes :
- VIVE (pour vie) : un programme de santé (comme la Sécurité sociale pour les frais médicaux) dont les familles des producteurs peuvent également profiter. De son côté, Sonrisa Cafetera couvre les soins dentaires.
- Assurance décès afin de payer les frais d’obsèques.
- Aide à l’acquisition de silos mécaniques, souvent répartis entre les producteurs.
- Programme d’éducation avec l’aide des universités environnantes (le département est celui qui compte le plus d’universités en Colombie, grâce au développement de la filière café), dans le but de sensibiliser à de meilleures techniques de culture et former la relève générationnelle.
Caficultores de Anserma soutient l’initiative d’un groupe de 50 femmes visant lancer une marque de café bio appelée « Aroma mujer », à destination des consommateurs colombiens.
Le Fairtarde/Max Havelaar en quelques chiffres
Plus de 3.400 produits vendus en France labellisés Fairtrade/Max Havelaar, par 219 entreprises, dont 75 % en bio.
Le consommateur français dépense en moyenne seulement 7,98 euros pour les produits labellisés Fairtrade/Max Havelaar par an.
ConsoGlobe.com – Votre production n’est-elle pas bio ?
Vincente Ramirez : 75 % du café Fairtrade est aussi biologique. Dans notre coopérative, seules certaines productions sont en bio, mais les intrants chimiques sont réduits au maximum partout ailleurs. La coopérative oeuvre à sensibiliser et éduquer les producteurs à une culture du café qui respecte la nature et l’environnement.
Nos cafeteros sont également formés à la gestion des sols et de l’eau, et le laboratoire de la coopérative est équipé pour contrôler la qualité des sols, de l’eau et des grains.
ConsoGlobe.com – Avez-vous un message à faire passer au consommateur européen ?
Vincente Ramirez : Si la Colombie est un grand pays du café, traditionnellement la majeure partie de la production de grains de café bruts de qualité supérieur va à l’exportation. Reste le café de plus basse qualité pour le marché national. Caficultores de Anserma souhaite donc participer à l’éducation du goût des colombiens pour le café de qualité, afin de développer une production plus qualitative pour sur le marché local. L’engagement des Cafe Mujeres dont je parlais plus tôt, va d’ailleurs dans ce sens.
Savez-vous combien de tasses de cafés sont bues chaque seconde dans le monde ? La réponse est sur le Planetoscope
Si toute la population mondiale, qui consomme donc notre meilleur café, se mettait à préférer les produits équitables et bio, les producteurs se convertiraient en masse. C’est donc aux consommateurs de changer les habitudes d’achat.
Certaines fincas de la coopérative accueillent également les visiteurs en écotourisme : il est donc possible de venir découvrir notre magnifique région, classée par l’UNESCO patrimoine mondiale de l’humanité, au plus près des producteurs.
Les producteurs d’Anselma souhaiteront la bienvenue à tous les Français !
Merci à Élodie, de Fair[e] un monde équitable, le mouvement national de consommateurs engagés en faveur d’un commerce plus équitable et d’une consommation juste et durable, pour son aide précieuse.