Dans la famille biodiversité ordinaire, protégeons le blaireau

On se demande parfois comment agir pour la biodiversité… Et si on commençait par celle qui s’épanouit (tant bien que mal) autour de chez nous sans qu’on y prête trop attention : à nous de jouer pour protéger le blaireau en devenant son porte-drapeau !

Rédigé par Julien Hoffmann, le 15 Oct 2021, à 17 h 52 min
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L’effondrement de la biodiversité est un phénomène désormais largement connu même s’il est encore difficile d’en comprendre les conséquences autant écologiques, économiques que sociale. Une chose est cependant certaine, il est plus que temps de mettre la main à la pâte pour limiter le phénomène et inverser la vapeur dès aujourd’hui avec une autre espèce à protéger : le blaireau de nos campagnes.

Connaitre l’espèce pour mieux protéger les blaireaux

Mieux comprendre et connaître la biodiversité c’est se donner les moyens de mieux la protéger. La chose est vraie pour toutes les espèces, même pour la biodiversité ordinaire, pour laquelle on ne doit pas attendre qu’elle soit en danger pour agir.

Le Blaireau (Meles meles) est un mustélidé de la même famille que la martre des pins, la fouine ou encore l’hermine, plutôt nocturne et omnivore (qui mange de tout) avec une préférence très marquée pour les vers de terre…

Le blaireau est un animal trapu et puissant dont la morphologie est tournée vers le fouissement, il sait creuser et en tirer profit. De ses griffes antérieures (de devant) en passant par ses pattes courtes et puissantes ou la musculature impressionnante de son cou, le blaireau a de quoi faire pour exploiter le terrain afin de trouver refuge.

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Croiser un blaireau en forêt reste un moment magique ! © lukaszemanphoto

En règle générale, les terriers de blaireaux se trouveront dans des zones avec une dense couverture végétale comme en forêt par exemple, sur des terrains en pente qui leur facilitent la tâche pour déblayer la terre afin de creuser leur terrier dans un sol bien drainé.

Principalement nocturne pour ce qui est de ses déplacements et de sa recherche alimentaire, le blaireau peut cependant être en activité de jour mais dans son terrier. À la mauvaise saison il commence à ralentir son activité jusqu’en hiver où ses sorties journalières ne dépasseront pas les 3 heures… quand encore il sort !

La particularité du blaireau : Une espèce hautement sociale

Le blaireau est une espèce socialement étonnante dans la mesure où ses relations avec ses congénères dépendent pour beaucoup de l’habitat colonisé et/ou de la densité de ses populations. Cet animal peut ainsi vivre seul, en couple ou même en groupe, le tout évoluant avec le temps.

Quand la population et donc la densité d’individus augmente, les blaireaux peuvent se réunir pour éviter l’anarchie et passer d’un mode de concurrence alimentaire et de territoire, à une organisation sociale coordonnée avec un lieu de vie collectif.
Les terriers peuvent alors réunir de 2 à 10 individus, avec un record en Angleterre de plus de 100 spécimens dans le même terrier !

Jeux en tous genres, communication élaborée entre les individus, longues séances d’épouillage pour conforter les liens existants et alloparentalité – les blairelles sans progéniture s’occupent d’autres jeunes quand leurs parents partent chercher de la nourriture – sont autant de comportements complexes qui sont encore à l’étude.

Statut actuel de l’espèce : le blaireau nuisible ou protégé ?

L’espèce est classée dans l’annexe III de la Convention de Berne (1979) ce qui revient à dire qu’elle est « partiellement protégée ». Le blaireau reste cependant chassable car classé sur la liste des gibiers même si les choses évoluent en la matière, le Bas-Rhin ayant par exemple interdit sa chasse. Reste que la plupart du temps, la chasse du blaireau par déterrage est cruelle !

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À l’occasion, le blaireau ne rechigne pas à mettre un peu de viande à son menu d’omnivore © Michal Ninger

Les menaces qui planent sur le blaireau

S’il est difficile d’avoir une estimation juste des populations de ces animaux en France, on sait cependant que l’augmentation avérée des surfaces forestières lui est favorable. Pourtant tout n’est pas encore joué pour ce qui est de la pérennité de l’espèce.

Une dynamique de population lente

Les blaireaux colonisent lentement les territoires et se reproduisent également avec parcimonie. Cela revient à dire que, quand ils disparaissent d’un territoire pour quelque raison que ce soit, leur retour prendra beaucoup de temps et nécessitera de bonnes conditions.
Maintenir les population présentes et participer au retour des blaireaux dans les régions où il a disparu sur les 15 dernières années sont donc primordiaux.

Collisions routières

Comme tous les animaux nocturnes, le blaireau n’est pas équipé pour lutter contre les voitures. Il est très sensible à leur bruit et à la lumière, ce qui lui fait parfois prendre des décisions fatales quand il croise un véhicule.

Pour exemple, on estime à 50.000 le nombre de blaireaux tués chaque année sur les routes de Grande-Bretagne.

La chasse

Le blaireau a été chassé depuis la période préhistorique avec des indices de la pratique autant en Suisse qu’en Belgique ou encore en Angleterre. Si les modes de chasses ont évolué, on pratique encore : le tir au fusil, le piégeage, l’embuscade et le déterrage.

Le blaireau n’est plus considéré comme « animal nuisible », il cause peu de dégâts au regard de biens d’autres animaux, ne joue pas de rôle particulier en matière de transmissions de maladies que ce soit aux humains ou aux animaux domestiques… Sa chaire ne semble pas présenter d’intérêt gastronomique.
Alors pourquoi donc chasser le blaireau ?

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Loin de la chasse cruelle et sans intérêt, les images de soins à la faune sauvage font toujours un bien fou © Martin Mecnarowski

Il semblerait que seule la tradition s’impose comme réponse… avec une très forte préférence de la part des chasseurs pour le déterrage ou « vénerie sous terre », pratique barbare s’il en est.
Les animaux sont bloqués au fond de leur terrier par des chiens et attendent dans la panique que les chasseurs creusent jusqu’à eux pour les attraper avec des pinces, les tuent et les donnent à manger à leurs chiens.

Prédation naturelle et maladies

En Europe, seul le lynx est connu pour être le prédateur du blaireau qui pourrait aussi, selon certains mais rien n’est encore scientifiquement acté, faire face au loup et à l’ours.

Le blaireau est aussi naturellement sujet à plusieurs maladies et parasites comme la tuberculose bovine (qui lui vaut son injustifiée réputation de porteur de maladies), la coccidiose ou encore la trichinose.

La population globale de blaireaux aurait ainsi un taux de croissance de 70 % compensé par une mortalité naturelle de 50 %, ce qui lui laisse 20 % de taux de croissance. On comprendra aisément que collisions routières et chasse sans intérêt ne sont pas sans poser de problèmes dans un contexte de ce genre.

Comment aider et protéger le blaireau ?

Comme pour le reste de la biodiversité ordinaire, son observation, la transmission aux jeunes publics et le soutien aux associations de protection de la faune sauvage sont essentiels.

Dans le cas du Blaireau, vous pouvez ainsi vous rapprocher de structures telles que l’association Agir pour le Vivant et les Espèces Sauvages (AVES)  ou l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) qui sont pro-actives dans sa protection et dans la lutte contre sa chasse.

Concernant plus particulièrement la chasse par déterrage, vous pouvez, comme nous, signer la pétition pour son interdiction.

Dans cette série « Protégeons notre biodiversité ordinaire », nous vous donnerons au fil des prochaines semaines, des pistes concrètes pour comprendre, observer et aider à la protection des animaux sauvages qui peuplent nos campagnes, forêts, littoraux, montagnes…
Après le putois et le blaireau, viendront le castor ou encore le chevalier cul-blanc, la punaise gendarme,  le crapaud calamite ! Et bien d’autres à suivre…

Illustration bannière : Petit Blaireau curieux prêt à explorer le monde © Coatesy
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