La chute du régime : peut-on désirer une perte ?

Rédigé par Catherine Grangeard, le 27 Dec 2012, à 12 h 47 min
La chute du régime : peut-on désirer une perte ?
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La promesse du régime dépasse la raison

La promesse sous-jacente c’est de résoudre tous les problèmes. Perdre ses kilos superflus pour mieux vivre !

Or, la vulnérabilité des personnes qui s’y soumettent rend les régimes dangereux. Ceux qui s’enrichissent sur cette vulnérabilité ne peuvent s’en dédouaner par ailleurs. Nous abordons alors une question éthique. S’il n’y avait pas faille à cet endroit, la raison dominerait et personne n’accorderait sa confiance à des régimes farfelus, aux résultats que l’on connaît.

Par ailleurs, nous savons qu’il n’est pas impossible à un fumeur de fumer raisonnablement, à un buveur de se limiter mais l’abstinence est préférée dans les traitements car elle protège mieux des démons les addicts. Face aux excès de nourriture, il ne saurait être possible de supprimer l’objet, il s’agit de dominer le recours intempestif lorsque cela va mal, lorsque l’ennui fait tourner en rond, … lorsque la sensation de faim, irrépressible se manifeste. C’est pour cela qu’une démarche plus « philosophique » peut s’avérer tout à fait adaptée. Curieusement, le mal du siècle qu’est le fléau de l’obésité, à un niveau planétaire réintroduirait-il la nécessité de quitter l’immédiateté, sommes-nous dans un mouvement de réintroduction de la quête du sens dans une consommation sans bornes ? Quand le retour du religieux fut une prévision attribuée à Malraux pour le 21ème siècle, nous constatons l’effet du balancier, il ne saurait être possible d’être longtemps dans un excès sans qu’un équilibre mène vers la dimension opposée.

La quête du régime miracle révèle la recherche du miracle

Très honnêtement, tenir le discours de la réalité est une position qui n’enthousiasme pas les foules. Néanmoins, quelque part, pour reprendre cette expression qui laisse à chacun la liberté de nommer comme il le souhaite cette part de lui qui approuve malgré tout, chacun reconnait quand même que si ça lui était possible il aimerait ne pas faire n’importe quoi… C’est avec cette part là que le thérapeute fait alliance pour nouer principe de réalité et principe de réalité pour glisser vers les conditions permettant d’adopter un mode de vie qui rende caduque le recours à tout régime totalitaire.

La raison ne suffit pas, le savoir non plus, mais sans eux on ne saurait avancer.

Mettons à l’ordre du jour l’abord des raisons pas raisonnables, inconscientes, qui pèsent lourd dans les actes de tout un chacun, et pas seulement dans les régimes alimentaires…

> La prochaine fois : L’avenir d’une illusion

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Éléments de bibliographie  :

Rapport de l’ANSES, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, groupe de travail présidé par le docteur Jean-Michel LECERF, l’évaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d’amaigrissement, novembre 2010

Sigmund FREUD L’avenir d’une illusion, 1927, PUF
–  Obésités, le poids des mots, les maux du poids, 2007, Calmann-Lévy
Comprendre l’obésité, une question de personne, un problème de société, 2012, Albin Michel

(Illustrations : © CC, Laura Lewis, Jürgen Karneill, Helga Weber, Lydia, Jeff, Jean Marconi, Isa Costa, James Della Valle)

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Catherine est psychologue et psychanalyste, membre de réseaux de prise en charge de personnes obèses, enfants adolescents et par ailleurs est attachée à...

2 commentaires Donnez votre avis
  1. Ou comment porter un poids qui ne nous appartient pas.

  2. Les sources du problème de l’odésité ne s’expliquent pas que par le rapport à soi, la culpabilité et la notion de perte. Elle remonte plus en amont dans lévolution de notre société de consommation, la distention du lien entre les aliments bruts et le plat dans l’assiette, la culture familliale de la mal bouffe qui n’est pas jugée comme telle mais comme normalité alimentaire, la déconnection entre ce que nous fournit la terre en fonction des saisons et ce que l’on trouve dans les supermarchés, la passivité face à des produits contenant des composants non naturels, la perte ou la méconnaisance du goût des choses simples…Selon mon point de vue, un adulte qui a été mal éduqué enfant, pourra rechercher une fois adulte les mêmes sensations alimentaires qu’enfant pour se rassurer… Celui qui aura le souvenir d’une bonne pizza bien grasse achetée toute faite et partagée en famille dans un moment heureux aura plus de mal à s’imaginer un poulet fermiers roti servi avec des haricots vert frais épluchés le matin et cuits à la vapeur avec un peu de sel et de beurre frais. l’obésité est sociétale, culturelle… L’aspect psychlogique est certe bien présent mais les peurs de pertes ont tujours existé, même à l’époque ou l’alimentation disponible rendait les gens moins gros… Il y a donc du boulot pour s’attaquer à la racine du mal !

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