Bien que divisés, 154 chefs d’États souriaient devant les caméras du monde entier au cours de la 21e conférence sur le climat, réunie en 2015 à Paris. Mais deux ans plus tard, la deuxième phase de négociation ne réunissait qu’une vingtaine d’entre-eux à la COP23 de Bonn. Les pays émergents ou en développement ne veulent pas se voir imposer des freins économiques et des chefs d’États de pays développés craignent que de nouvelles règlementations et taxes envers les entreprises et les contribuables affaiblissent leurs pays. Les négociations internationales montrent ainsi leur utilité mais aussi leurs limites.
Une rationalisation du libre-échange et une réflexion économique globale sont-elles à l’agenda ?
Les dernières COP promettent un financement annuel de 100 milliards de dollars en direction des pays en voie de développement, destiné à leur permettre de mener des actions en faveur d’un ralentissement du réchauffement. Lors du One Planet Summit, le commissaire européen Valdis Dombrovskis ajoutait : « Pour limiter le réchauffement climatique bien en dessous de 2 degrés, l’Europe a besoin de 180 milliards d’euros par an d’investissements supplémentaires »(1).
Au programme : de nouvelles mesures fiscales en faveur du climat et des green bonds, ces obligations vertes destinées à financer des actions en faveur de l’environnement. Sera-ce suffisant pour protéger celui-ci ? Peut-on sérieusement vouloir davantage de libre-échange et en même temps, affirmer lutter pour la préservation de l’environnement ?
Illusion de biens produits à bas coût, économique, mais impact écologique et humain élevé ; morts prématurées dues aux émissions nocives du transport maritime : il est clair que le défi qui consiste aujourd’hui à ralentir le tourbillon de la surconsommation peut être relevé en agissant sur les modes de consommation et de production. Aujourd’hui, cargos sillonnent les mers et rejettent 1 milliard de tonnes de CO2 par an(3). Selon une étude de l’Université de Rostock, les plus gros portes-containers pollueraient autant que l’ensemble du parc automobile mondial. Les particules ultrafines de soufre causeraient chaque année dans l’UE quelque 60.000 morts prématurées.
Certes, nous devons réapprendre à consommer mais on peut craindre que la recommandation « consommer moins mais mieux » ne suffise guère. Les consommateurs n’ont pas toujours le choix et doivent le plus souvent se contenter d’une offre low-cost obsolescente et jetable imposée par les marques et les grandes enseignes.
C’est surtout en amont que nous pourrons recréer des équilibres. Aussi nous faut-il concevoir les mécanismes économiques qui, à terme, produiront l’effet recherché. Or, par exemple, si l’OMC affirme que la protection de l’environnement figure parmi ses objectifs fondamentaux, elle a supprimé les quotas d’importation textile en 2005. Depuis, cette industrie est montée sur la deuxième marche des secteurs les plus polluants, juste derrière l’industrie pétrolière.
D’après un rapport publié le 28 novembre 2017 intitulé A new textiles economy : Redesigning fashion’s future, l’équivalent d’un camion poubelle chargé de textiles est incinéré ou jeté chaque seconde. Le gaspillage des vêtements à peine portés avoisinerait 500 milliards de dollars par an et les 500.000 tonnes de microfibres rejetées à la mer chaque année, représenteraient l’équivalent de 50 milliards de bouteilles en plastique.
Plutôt que de nouveaux accords de libre-échange, un salaire minimum mondial ?
Un salaire minimum mondial, s’il était fixé à un niveau suffisant, encouragerait une diminution de la production de produits jetables en revalorisant le coût de la main d’oeuvre des pays producteurs. Celui-ci devrait être spécifique à l’exportation et des pays seraient regroupés par catégories salariales. Les chefs d’États de pays émergents en percevraient la dimension humaine et philosophique mais aussi économique. Les avantages et bénéfices d’un salaire décent, source de nouvelles recettes fiscales et de développement financé par une plus forte contribution des donneurs d’ordres, pourrait les convaincre.
À terme, le salaire minimum mondial générerait un effet macroéconomique positif sur le niveau de vie de populations entières. Cependant, compte tenu d’une part salariale toujours mineure, le nouveau salaire n’affecterait que modérément le prix acquitté par le consommateur. Certes, le salaire minimum mondial n’est pas une idée nouvelle et bien qu’une part importante de la population mondiale s’accorde à juger son instauration souhaitable, l’absence de projet viable n’a pas permis d’avancée significative.
La piste maintenant délaissée mais préconisée pendant plusieurs dizaines d’années par les organismes internationaux et quelques économistes, demeurait celle du salaire minimum selon le revenu médian de chaque pays. Mais un tel processus, infiniment complexe, n’aurait fait progresser les pays que proportionnellement à un niveau de vie de départ souvent très faible.
Dans plusieurs pays, une augmentation de 10 ou 20 euros n’aurait que peu amélioré des conditions de travail indignes. Par ailleurs, un salaire que certains États pauvres n’auraient pu assumer dans leurs administrations ou que les entreprises produisant pour la population locale n’auraient pu payer à leurs salariés, n’avait bien évidemment que peu de chances de voir le jour ou n’aurait guère été pérenne.
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Que l’on arrête déjà l’obsolescence programmée sur de nombreux produits, que les industriels fassent des produits réparables, valable pour tout, aussi bien que les bien hiegtech, que l’habillement et tout autres produits, arrêtons de faire du tout jetable, mais au vue de l’industrie et de tous ces actionnaires assoiffés de rentabilité financière, ce n’est pas demain que cette gabegie organisée va s’arrêter.