Fin septembre 2015 la compagnie pétrolière Shell annonçait qu’elle renonçait à forer en Arctique, au grand soulagement des organisations environnementales qui s’étaient opposées à l’autorisation que Shell avait reçue de Barack Obama. Cependant, l’Arctique ne reste pas vierge de tous forages et d’autres acteurs sont encore présents dans cette région avec les menaces que cela fait peser sur l’environnement.
L’Arctique de nouveaux gisements disponibles avec le réchauffement climatique
La fonte des glaces, qu’entraîne le réchauffement climatique, a ouvert la voie à l’exploration de vastes régions au sein de l’Arctique jusque-là préservées. En effet, la diminution de la couche de glace, la perspective de la fonte totale de la banquise en été d’ici 2040 ont permis aux sociétés pétrolières de lancer des nouveaux gisements en Arctique. Les réserves annoncées sont de 13 % pour le pétrole et 30 % pour le gaz. Les permis d’exploitation offshore se sont multipliés et aujourd’hui la compagnie norvégienne Statoil exploite le gisement gazier Snohvit dans la mer de Brents et Exxon mobil, Eni et Statoil se sont alliés aux Russes Rosneft. Tandis que le Groenland propose maintenant sa zone côtière après avoir proposé celle de l’Ouest. Shell était quant à elle rentrée dans la course en 2012.
Forages arrêtés, forage repris…
Shell avait débuté ses forages en Arctique dés 2012 mais plusieurs incidents techniques l’avait contrainte à stopper ses recherches. Notamment l’endommagement d’un dôme d’endiguement, censé éviter tout risque de marée noire, lors d’un test d’homologation, et l’échouage d’une plate-forme en décembre sur une plage inhabitée d’Alaska. Le remorquage de cette plate-forme vers une baie abritée de l’état américain contenant 530.000 litres de diesel et 450 000 litres de liquides hydrauliques avait nécessité plus de 700 personnes. Mais la campagne d’exploitation avait été relancée en juillet 2015 avec comme condition posée par le département international américain que tous les problèmes soient résolus.
Des résultats décevants et un risque trop fort pour l’image
Cependant, fin septembre, Shell annonce renoncer à l’exploitation de pétrole en Arctique. « C’est clairement un résultat décevant pour cette zone », annonçait M. Odum, le patron de la partie exploitation production du groupe en Amérique du Nord. Au-delà de ces résultats, plusieurs raisons expliquent le choix de Shell. Tout d’abord un risque image extrêmement élevé : « une fuite causerait trop de dommage à l’image de la compagnie », ce qu’avait également compris Total lorsqu’il avait annoncé qu’il ne forerait pas en Arctique.
Le forage, une menace extrêmement forte pour cette région du globe
L’Arctique est en effet un sanctuaire pour de nombreux espèces marines, telles que les baleines, les phoques et les morses, ainsi que pour de nombreux oiseaux et pour les ours polaires. Elle recèle de plus une grande partie de la vie sous-marine invisible, comme le phytoplancton, essentiel à la chaîne alimentaire marine. L’Océan Arctique est l’une des dernières terres vierges. Or l’impact d’un accident en Arctique serait encore plus important que celui de 2010 dans le Golfe du Mexique, où l’explosion de la plateforme pétrolière exploitée par BP avait entraîné la mort de onze personnes, et le déversement de 4,9 millions de barils bruts dans la mer. C’est la conséquence des températures glaciales, et de l’éloignement géographique de toute route, mais également et surtout du fait qu’il n’est possible d’intervenir que pendant la saison estivale, qui ne dure que d’octobre à mai. Le pétrole pourrait rester enfermé sous la glace pendant plus d’un an, entraînant un empoissonnement extrêmement fort pour les écosystèmes présents.
Un signal d’alerte poussé par les différents acteurs sur les dangers d’exploiter l’Arctique
D’ailleurs au-delà des organisations environnementales, dont Greenpeace, qui s’était mobilisée dés 2012 pour montrer son opposition à ce que Shell fore en Arctique et avait accusé le secteur du pétrole et du gaz de faire tout ce qu’il pouvait pour « éviter de discuter de la sécurité des forages, effectués dans des conditions des plus inhospitalières, de surcroît dans un des endroits où un déversement de pétrole dévasterait la faune et serait presque impossible à nettoyer », se sont également des acteurs politiques et économiques qui ont mis en garde et ont désapprouvé ce choix. C’est par exemple le cas d’Hillary Clinton : « L’Arctique est un trésor unique. D’après nos connaissances actuelles cela ne vaut pas la peine de prendre le risque ». Ou de la société d’assurance Lloxd’s of London, qui avait fait part de son inquiétude, soulignant que toute fuite d’hydrocarbure représenterait « un risque unique, s’accompagnant de multiples complications ». Ceci d’autant plus qu’en Arctique, aucun système international de responsabilité et de compensation n’existe en cas de marée noire.
La nécessité de préserver définitivement cette zone
Face aux nouveaux appétits que suscite l’Arctique et malgré la fragilité de cette zone et de l’écosystème présent, il est nécessaire que des accords internationaux soient trouvés, afin de sanctuariser la zone de tout forage. D’une part parce que les quantités présentent dans les sols de l’Arctique ne représentent que 3 ans de notre consommation, ce qui fait un faible butin pour la menace d’une destruction irréversible des écosystèmes présents en Arctique. D’autre parce que si nous souhaitons maintenir le réchauffement climatique à 2°C, il est nécessaire de laisser 80 % des ressources fossiles connues dans le sol. L’heure n’est alors plus aux investissements dans les énergies fossiles.
Les compagnies pétrolières sont pour la plupart très intéressées par les ressources de l’Arctique © Shutterstock
Ils évitent de provoquer de potentiels catastrophes pour l’environnement pour ne pas ternir leur image, c’est un début. Ils commencent donc à prendre conscience de la sensibilisation du public à ces égards.