En attendant le vrai décollage de « l’Airbus de l’Energie », l’Europe continentale développe son réseau électrique et les différents Etats membres investissent dans le pilotage de la consommation électrique et l’interconnexion des réseaux. Les « smart grids », ces réseaux électriques intelligents qui marquent l’arrivée du numérique dans les réseaux électriques pour permettre l’optimisation entre production et consommation, sont cruciaux pour le succès de la transition énergétique.
Mais il manque encore à l’Europe une stratégie industrielle concertée sur ce secteur générateur d’emplois.
2015 : l’Europe avance-t-elle enfin sur les « smart grids » ?
Beaucoup, tel le professeur allemand d’ingénierie Benjamin Schäfer de l’institut Max Planck, appellent de leurs voeux un système de « smart grid » décentralisé. Ce réseau électrique intelligent, permettrait en effet non seulement d’envoyer sur le circuit des flux électriques mieux maîtrisés, mais aussi des informations permettant de mieux synchroniser production et consommation.
Parallèlement, différents pays européens tentent déjà de mettre en place des systèmes de pilotage de la consommation électrique.
En France, la dimension locale du réseau électrique n’a pas été écartée comme en témoignent les 100 millions d’euros consacrés à la consolidation du réseau dans le Grand Ouest par ERDF. Selon France 3 Finistère, cette opération créera l’équivalent de 120 emplois. Par ailleurs, au niveau national, un appel à projet a été lancé le 15 avril dernier par Ségolène Royal et Emmanuel Macron dans le cadre des 34 plans de la Nouvelle France Industrielle. La feuille de route de ce plan a été attribuée au Président du Directoire de RTE, Dominique Maillard.
En Italie, l’électricien Enel a déployé 32 millions de boitiers sur toute la péninsule transalpine. Avec ces compteurs intelligents, d’importants gains sur la facture d’électricité des ménages sont escomptés.
En Belgique, le groupe ABB va consacrer plus de 35 millions d’euros à son réseau électrique afin d’intégrer davantage d’énergies renouvelables.
« Smart grid » : 25.000 emplois directs en France
Et ce n’est pas fini : de nombreux projets sont en cours de déploiement. Le directeur de l’alliance CPL G3, Marc Boillot, estime même qu’à l’échelle de la planète, « le marché des smart grids [devrait se porter] à environ 30 à 40 milliards de dollars par an avec un taux de croissance de 5 à 10 % par an ». Dans le Plan pour la Nouvelle France Industrielle imaginé par Bercy, le marché des smart grids est évalué à 3 milliards d’euros et représenteraient 25.000 emplois directs ; il pourrait qui plus est doubler en l’espace de quelques années seulement. De quoi appâter les pouvoirs publics, est-on en droit d’espérer…
De son côté, Pierre Bornard, vice-président de RTE et président du conseil d’administration de l’ENTSO-E (European Network of Transmission System Operators for Electricity), qui regroupe plus de 30 gestionnaires européens de réseaux de transport d’électricité considère bien naturellement que « l’Europe de l’énergie existe déjà » ! D’après l’ENTSO-E, 150 milliards d’euros seraient nécessaires au développement des réseaux d’ici à 2030. A en croire la formule un peu provoquante du Vice-Président de la commission européenne, Maroš Šefčovič, « les smart grids pourraient [alors] devenir les gaz de schiste de l’Europe » par le gain de compétitivité qu’ils offriront(1)…