Plus écologiques que le neuf, moins aussi plus économiques et pourvoyeurs d’emplois, les smartphones reconditionnés présentent de nombreux avantages. Ils ont pourtant un défaut : non taxés, ils privent la culture de revenus. Au gouvernement, certains s’en félicitent, d’autres non.
Les avantages du smartphone reconditionné et pourquoi une nouvelle taxe ?
Vivre sans smartphone est quasiment devenu impossible tant cet objet est entré dans notre quotidien. Il est certes très utile mais aussi très polluant.
Selon l’Ademe, sa fabrication, qui nécessite l’extraction de minerais très polluants comme l’or ou l’étain, constituerait 3/4 de l’impact environnemental de ce produit. C’est pourquoi, pour réduire cet impact, une des astuces écolo consiste à acheter un smartphone reconditionné.
Écologique et économique ! L’achat d’un smartphone remis en état puis reconditionné présente de nombreux avantages. Mais pour le ministère de la Culture, il présente un inconvénient de taille : il n’est pas taxé. Sachant qu’il s’en vend environ deux millions par an, cela fait un sacré manque-à-gagner pour Copie France, la société qui perçoit la rémunération pour copie privée auprès des redevables.
Écologiques, économique et pourvoyeurs d’emploi
À raison de « 14 euros pour 64 Go de mémoire, le calcul est rapide : 28 millions d’euros sont à portée de main » détaillent nos confrères du Figaro(1).
Mais cette manne financière qui consiste à taxer deux fois le smartphone, une fois quand il est vendu neuf et une seconde fois lorsqu’il est vendu reconditionné, n’est pas du goût de tout le monde, notamment du ministère de l’Écologie et du secrétariat d’État du Numérique.
Un smartphone reconditionné est un mobile usagé, qui a été contrôlé et réparé si nécessaire, avant d’être remis en vente © Preechar Bowonkitwanchai
En plus de leurs avantages écologiques et économiques, les smartphones reconditionnés ont un avantage de taille : ils créent de l’emploi « qui plus est, il s’agit souvent d’emplois avec une mission d’insertion » estime le secrétariat d’État au Numérique.
Par ailleurs, Bercy affirme que « les marges du secteur sont très faibles, ajouter 14 euros par appareil risque de tuer un secteur en croissance » lit-on toujours dans Le Figaro.
Une exonération qui prive la Culture de revenus
Pourtant, dans un communiqué de presse datant du 3 février 2020, Copie France affirme que la rémunération pour copie privée n’est pas une taxe : « L’exonération des appareils reconditionnés apparaîtrait d’autant plus injustifiée que l’usage, en matière de stockage et de duplication d’oeuvres, est similaire sur un appareil neuf et reconditionné. Il est donc légitime que cette rémunération compensatoire s’applique à chaque utilisateur d’un appareil, qu’il soit neuf ou reconditionné ». Cette « taxe » ne représenterait que 3 à 4 % du prix du téléphone reconditionné.
« Priver la culture des revenus provenant du secteur très florissant des appareils numériques reconditionnés porterait un grave préjudice aux artistes, aux auteurs et aux entreprises du secteur, estimé aujourd’hui à 30 millions d’euros ».
Comment fonctionne Copie France ?
Qu’est-ce que Copie France ? © Copie France
Ainsi, l’on voit s’affronter deux camps : d’un côté l’écologie et l’économie et de l’autre côté la culture. Et vous, auquel appartenez-vous ?
Madame,
En ma qualité de Gérant de Copie France, organisme chargé de collecter la rémunération pour copie privée, j’ai pris connaissance avec surprise de votre article sur l’assujettissement des smartphones reconditionnés à la rémunération pour copie privée.
Bien des approximations et contre-vérités doivent être rétablies et notre point de vue est difficilement audible.
Pour votre information, la copie privée n’est pas une taxe, c’est la compensation d’un préjudice versé au monde de la culture en contrepartie du droit pour chacun de copier librement des œuvres protégées. La loi est claire : elle assujettit indifféremment les appareils neufs et reconditionnés car la rémunération est due par chaque utilisateur et non pas par appareil.
Ce n’est donc pas une tentative d’étendre nos collectes à ce secteur puisque celui-ci est concerné par la copie privée depuis qu’il existe.
Comme souligné dans notre communiqué de presse dont vous avez effectivement repris un extrait, le prix de vente moyen d’un téléphone reconditionné ( essentiellement des smartphones haut de gamme) , de 332 €, permet parfaitement d’absorber le montant de la rémunération pour copie privée qui se situe entre 3% et 4% de ce prix de vente moyen.
Nous ne sommes pas des adversaires de la transition écologique obsédés par leurs propres profits mais soucieux de faire valoir que la transition écologique ne peut se faire au détriment du détricotage d’un mécanisme vertueux vieux de plus de 35 ans, établi dans presque toute l’Europe qui vise à soutenir les artistes et les créateurs et la filière de la culture face aux possibilités infinies de copie que permettent ces appareils.
Cordialement
Charles LONJON