The Good Lobby est le nom de cette initiative lancée officiellement à Bruxelles jeudi 22 juin, mais initiée en 2015. Dans la capitale européenne du lobbying, avec plusieurs dizaines de milliers de lobbyistes, The Good Lobby vise à contrebalancer l’influence de groupes d’intérêt disposant de ressources importantes, en donnant accès pour de plus petits défenseurs de l’intérêt général à des bénévoles prêts à partager leur temps et compétences.
Car « typiquement, souligne la brochure de l’association à but non lucratif, à Bruxelles, les ONG manquent de personnel et, du fait qu’elles s’occupent de questions pan-européennes, ont du mal à être connectées aux citoyens ». Il leur est donc très difficile de représenter à armes égales les intérêts de 500 millions de citoyens sur des questions telles que les droits des consommateurs, la lutte contre le changement climatique ou l’égalité des sexes.
« Nous cherchons des juristes, des experts en communication ou en fundraising (lever de fonds) », explique Alberto Alemanno, expert en droit européen et professeur à HEC. Il travaille actuellement avec les grands cabinets d’avocats, qui ont pour règle de consacrer une partie du temps de leur personnel à des tâches « pro bono » (gratuitement et pour le bien commun).
The Good Lobby ambitionne de disrupter le lobbying par la base
L’originalité du modèle tient dans l’application des principes de l’économie collaborative à un domaine d’ordinaire largement opaque pour le regard public, en identifiant d’un côté les besoins des lobbies intéressés – principalement des ONG – et les bénévoles de l’autre qui peuvent y répondre. Ces derniers sont, proclame le site de l’organisation « certains des universitaires, juristes, professionnels du secteur privé et étudiants les plus brillants d’Europe« .
Premières réalisations : des Master class gratuites pour apprendre aux ONG à accéder aux services pro bono des cabinets d’avocats et d’autres professionnels, des formations aux techniques et outils du lobbying, un prix européen du lobbying pro bono, ou encore des audits des besoins juridiques des causes défendues pour leur fournir le meilleur soutien possible.
Des juristes ont ainsi aidé Amnesty International à rédiger des amendements pour empêcher le commerce d’instruments de torture, tandis qu’un universitaire a développé l’argumentaire juridique pour contrer l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste pour le compte d’une coalition d’ONG.
Vous aussi, lobbyiste pour les bonnes causes ?
The Good Lobby intervient à Bruxelles et au-delà. Pour en savoir plus : The Good Lobby.
Plus que les bonnes causes, un enjeu démocratique
La philosophie sous-jacente de The Good Lobby est de permettre aux citoyens soucieux de l’intérêt général et disposant de connaissances utiles, mais ne sachant comment les valoriser, de s’impliquer. Ceci, espère Alberto Alemanno, dans le but ultime de participer à contrer la frustration citoyenne et le sentiment d’impuissance, qui font le lit des démagogues et populistes.
Pourtant, interroge Martin Wittenberg, associé au sein de Euros Agency, l’une des principales agences d’affaires publiques de la place bruxelloise, « peut-on de manière simpliste opposer ‘les bons’ et ‘les méchants’ dans le lobbying ?« . Derrière ce qu’il comprend être une appellation destinée à attirer l’attention, il tient à rappeler que chaque point de vue mérite d’être écouté et que les positions sont bien souvent non pas binaires mais complexes.
Alberto Alemanno en convient : « notre message est que le lobbying est utile, et ne doit pas être diabolisé en soi comme mauvais, comme il l’est souvent en France d’ailleurs, mais qu’au contraire nous en avons besoin. Avec The Good Lobby nous donnons la possibilité à qui le peut d’aider concrètement les causes qui lui importent« . C’est ainsi, rappelle-t-il que la société anti-esclavagiste est née…
Pour en savoir plus sur la philosophie du changement derrière cette organisation, vous pouvez lire le livre d’Alberto Alemanno, Lobbying for Change : Find Your Voice to Create a Better Society, Icon, 2017.