Vers une interdiction totale des PFAS en France : Enjeux et controverses

Une interdiction unilatérale des PFAS pourrait entraîner une augmentation des importations en provenance de pays où ces restrictions ne s’appliquent pas.

Rédigé par Aurélie Giraud, le 18 Feb 2025, à 11 h 13 min
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Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sont au coeur d’un débat réglementaire opposant impératifs environnementaux et contraintes industrielles. Dotés de propriétés chimiques exceptionnelles, ces composés sont largement utilisés dans des secteurs stratégiques comme l’aéronautique, l’électronique et le biomédical. Toutefois, leur persistance dans l’environnement et leur bioaccumulation suscitent des préoccupations croissantes.

Interdiction des PFAS : un projet de loi à l’Assemblée nationale

Alors que l’Union européenne adopte une approche graduelle pour restreindre les PFAS les plus nocifs, la France prévoit une interdiction généralisée dès 2026. Cette mesure fait suite à la proposition de loi déposée en 2023 par le député Nicolas Thierry, visant à éliminer l’ensemble des PFAS de la production et de l’importation sur le territoire national. Ce texte, qui sera débattu à l’Assemblée nationale en février 2025 avec le soutien du gouvernement, repose sur des études mettant en avant les risques sanitaires et environnementaux associés à ces substances.

Si cette interdiction vise à réduire l’exposition de la population et des écosystèmes aux PFAS, elle pourrait également entraîner des répercussions économiques majeures. En effet, certains PFAS ne présentent pas de toxicité avérée et demeurent indispensables pour des applications industrielles critiques.

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Un impact économique majeur sur les industries françaises

L’absence d’alternatives viables à court terme accentue le problème. Dans l’aéronautique, où les PFAS sont essentiels aux revêtements anticorrosion et aux joints d’étanchéité, leur suppression mettrait en péril la compétitivité des entreprises françaises face à des concurrents étrangers moins contraints. De même, le secteur des semi-conducteurs, qui génère plus de 43 milliards d’euros en Europe, dépend de ces substances pour garantir la qualité des circuits imprimés et des microprocesseurs. L’industrie textile, pesant 4,2 milliards d’euros en France, repose sur ces composés pour assurer l’imperméabilité des vêtements techniques et militaires. Une interdiction unilatérale pourrait ainsi entraîner une augmentation des importations en provenance de pays où ces restrictions ne s’appliquent pas.

Une divergence avec la réglementation européenne

Cette interdiction stricte pourrait également créer des tensions avec la réglementation européenne. Une interdiction nationale pourrait être contestée sur la base du principe de libre circulation des biens au sein du marché unique, fragilisant encore davantage les industriels français. Plusieurs pays membres, dont l’Allemagne et l’Italie, privilégient une approche plus progressive, se basant sur les recommandations de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), qui suggère une interdiction ciblée sur les PFAS les plus dangereux tout en maintenant ceux pour lesquels aucune alternative fiable n’existe encore.

Plutôt qu’une interdiction radicale, une transition progressive vers des alternatives plus sûres, soutenue par des investissements en recherche et développement, offrirait une solution plus équilibrée. En combinant expertise scientifique et dialogue avec les acteurs industriels, il serait possible d’atteindre un compromis ne mettant pas en danger la souveraineté industrielle française.

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