Zones à Faibles Émissions : le gouvernement taille dans la liste des villes concernées

Les Zones à Faibles Émissions (ZFE) ne devraient finalement s’appliquer qu’à deux villes : Paris et Lyon.

Rédigé par , le 4 Apr 2025, à 10 h 00 min
Zones à Faibles Émissions : le gouvernement taille dans la liste des villes concernées
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La limitation des ZFE à Paris et Lyon uniquement découle d’un amendement gouvernemental déposé dans le cadre du projet de loi « simplification de la vie économique ».

Paris et Lyon, derniers bastions des Zones à Faibles Émissions

La nouvelle est tombée sans tambour ni trompette. Selon le ministère de la Transition écologique, seules les agglomérations « ayant dépassé les seuils réglementaires de pollution de l’air trois années sur les cinq dernières » seraient soumises à l’obligation de mettre en place une Zone à Faibles Émissions (ZFE). En clair : Paris et Lyon. Dans toutes les autres villes, l’instauration de telles zones redeviendrait purement facultative.

Cette reconfiguration réglementaire bouleverse le cadre fixé par la loi « climat et résilience » de 2021, qui imposait jusqu’ici aux 43 agglomérations françaises de plus de 150.000 habitants de créer une ZFE avant le 1er janvier 2025. Dans les faits, 25 zones sont actuellement en place, couvrant des métropoles comme Marseille, Lille, Strasbourg, Bordeaux, Toulouse ou encore Grenoble. Mais avec l’amendement déposé le 3 avril 2025, « le gouvernement veut se concentrer sur les zones les plus touchées », a déclaré Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de la Transition écologique.

Une marche arrière politique à peine maquillée

Derrière l’argument sanitaire, le virage gouvernemental semble d’abord dicté par un impératif électoral. Depuis plusieurs mois, les ZFE sont devenues le cheval de bataille de l’opposition de droite et de l’extrême droite, qui dénoncent un dispositif « punitif » pour les classes populaires. La commission spéciale de l’Assemblée nationale a même adopté un amendement visant à supprimer totalement les ZFE.

La crainte d’une grogne sociale est palpable. Un document de la Direction générale du Trésor, révélé par Les Échos, estime que « la suppression des ZFE pourrait faire perdre à la France jusqu’à 9,4 milliards d’euros de financements européens dans le cadre du plan de relance ». Un montant qui ferait frémir n’importe quel comptable à Bercy, mais qui semble désormais peser moins que les craintes d’un rejet électoral.

Zones à Faibles Émissions : des ambitions européennes en suspension

Dans l’Union européenne, les ZFE sont un pilier des politiques locales de santé publique. En France, leur légitimité reposait sur une alerte sanitaire dramatique : selon le ministère de la Transition écologique, « plus de 40.000 décès prématurés sont imputables chaque année aux particules fines, et 7.000 aux oxydes d’azote ». C’est ce constat qui avait justifié la mise en place de vignettes Crit’Air, le classement des véhicules et des interdictions progressives à l’intérieur des zones.

Mais désormais, le nouveau critère gouvernemental n’inclut que les villes en dépassement régulier de seuils sur cinq ans, fixés à 40 µg/m³ de NO2 en moyenne annuelle. Or, grâce aux efforts de dépollution, seules Paris et Lyon dépassent encore ces limites.

Vignette, amende, dérogation : un cadre désormais incertain

Les usagers, eux, nagent en eaux troubles. Depuis le 1er janvier 2025, la vignette Crit’Air est obligatoire pour circuler dans une ZFE, et en cas d’infraction, l’amende est de 68 euros pour les véhicules légers. Mais quelles seront les règles demain, dans une ville comme Marseille ou Toulouse ? Et quelles collectivités oseront maintenir des restrictions devenues optionnelles ?

Si la suppression de l’obligation se confirme, chaque agglomération devra trancher : maintenir sa ZFE au risque de l’impopularité, ou la supprimer en renonçant à l’engagement écologique. Les collectivités resteront néanmoins libres de créer une ZFE si elles le souhaitent.

Des zones déclassées malgré des enjeux sanitaires persistants

Faut-il rappeler que la pollution atmosphérique ne connaît pas les frontières administratives ? Même si Paris et Lyon sont aujourd’hui les seules à dépasser les seuils annuels de pollution, de nombreuses autres métropoles restent bien au-dessus des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui fixe des valeurs bien plus basses.

Le décret du 23 décembre 2022 permet déjà des dérogations si les concentrations en NO2 descendent sous les 10 µg/m³. Or, la plupart des villes françaises sont encore loin de cette cible. L’objectif sanitaire initial semble relégué au second plan, derrière une lecture opportuniste des chiffres.

Un changement de cap risqué pour l’image de la France

Sur le plan européen, cette régression fait tache. La mise en place des ZFE conditionnait une partie des fonds du plan de relance. La France risque non seulement de devoir rembourser des sommes déjà perçues, mais aussi de voir sa crédibilité environnementale entamée.

Difficile de concilier ce revirement avec l’ambition affichée de devenir « la première grande nation écologique », proclamée par Emmanuel Macron. En restreignant les ZFE à deux grandes agglomérations, la France fait un pas de côté au moment où d’autres pays européens accélèrent.

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Journaliste de formation, Anton écrit des articles sur le changement climatique, la pollution, les énergies, les transports, ainsi que sur les animaux et la...

2 commentaires Donnez votre avis
  1. Proverbe japonais :
    « On ne fait pas pousser des légumes en tirant dessus. »

  2. ZFE UNE HONTEV!

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