Ce rapport, élaboré par Yves Ville, à la tête du service de gynécologie obstétrique de l’hôpital Necker de Paris, a été mené avec 14 autres spécialistes de ce domaine. Tous pointent du doigt les maternités de type 1, à savoir les plus petites. Ces maternités reçoivent les femmes enceintes pour lesquelles aucun risque lié à la grossesse ou l’accouchement n’ont été détectés. L’accouchement doit toutefois avoir lieu à au moins à 37 semaines de grossesse, sinon le nouveau-né doit être transféré vers une autre maternité.
Manque de personnel, de moyens et d’expérience : les maternités de type 1 dans le viseur d’un rapport alarmant
Selon Yves Ville, principal auteur du rapport, ces maternités de plus petite taille effectuent moins d’accouchements, ce qui entraîne une perte d’expérience de leur personnel. Résultat : en choisissant d’y accoucher, les futures mères et leurs nouveau-nés seraient en danger si une complication survenait.
Autres problématiques auxquelles sont confrontées ces 111 maternités : le manque de personnel comme de moyens qui là aussi, font courir un danger aux femmes venues accoucher, d’autant plus que ces structures se retrouvent souvent fermées plusieurs jours d’affilée. Une situation face à laquelle Yves Ville ne mâche pas ses mots : pour le spécialiste, la seule solution pour garantir la sécurité de la mère comme de l’enfant à naître est de regrouper ces petites maternités avec de plus grosses structures. « Si on ne le fait pas, on court à la catastrophe ».
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— Le Parisien (@le_Parisien) March 1, 2023
À l’inverse, les grandes maternités sont confrontées à un tout autre problème. Totalement « saturées », ces « usines à bébés » souffrent de conditions de travail dégradées, mais aussi d’un manque cruel de personnel. Les experts insistent sur le fait qu’il est impératif de les soutenir pour éviter qu’elles ne s’effondrent.
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Les petites maternités bientôt simples soutient des plus grandes ?
Toujours selon les conclusions de ce rapport alarmant, les petites maternités devraient plutôt se réorienter pour fournir un soutien aux établissements plus importants. Pour Yves Ville « le suivi avant et après la grossesse y serait toujours assuré, mais les femmes n’y accoucheraient plus ». Une réorganisation qui ne règle toutefois pas un problème majeur pour les futurs parents : les conséquences de ces changements sur le temps de trajet domicile-maternité.
Une crainte tempéré par le rapport, qui affirme qu’en cas de fermeture des 111 maternités de type 1 existantes sur le territoire, 89 % des naissances auraient lieu à trente minutes ou moins de la maternité la plus proche. Les naissances à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité ne représenteraient que 3 %, et seulement 0,9 % pour celles à plus d’une heure. Les changements de ces pourcentages par rapport au modèle actuel seraient donc a priori relativement faibles, le regroupement ne se faisant donc pas au détriment de la proximité des maternités avec les futures mères.
Le rapport suggère également la création d’« hôtels hospitaliers » pour les futures mères habitant trop loin de la maternité où elles doivent accoucher. Des établissements qui seraient situés à proximité des maternités et accueilleraient les femmes enceintes plusieurs jours avant la date d’accouchement prévu si elles habitent dans des communes trop éloignées.
Les petites maternités en colère après le rapport du Pr Yves Ville
Les conclusions du rapport mené par le professeur Yves Ville et remis à l’Académie de médecine ont provoqué un tollé parmi les petites maternités remises en cause. A Lannion, commune française des Côtes-d’Armor, syndicalistes, comité de défense et maire de la ville sont montés au créneau pour défendre une maternité à taille humaine disposant d’un personnel présent et compétent. « Nous travaillons déjà dans un environnement de santé fragile et nous lisons cela ! Nous n’avons jamais été favorables aux ‘usines à bébés’, qui sont source de dysfonctionnements et où les femmes partagent souvent une chambre avec plusieurs autres », dénonce auprès du Télégramme Pascal Lasbleiz, délégué CGT de l’établissement.
En ce qui concerne l’incapacité à prendre en charge les grossesses à risque, comme l’estime le rapport, Françoise Lostys, auxiliaire puéricultrice, s’insurge : « Ces grossesses sont déjà prises en charge à Saint-Brieuc. Nous avons des gynécologues et tout le personnel médical ici ». La puéricultrice ne voit pas comment « quelqu’un de l’hôpital Necker, à Paris, peut statuer sur 111 maternités de France ».