Canicules à répétition, sécheresses, incendies, disparition des espèces animales… Le doute n’est plus possible, on se dirige à grands pas vers l’effondrement écologique. À l’échelle d’une génération, le monde tel qu’on le connaît pourra s’écrouler… Alors quid des enfants dans cette équation ? Certains décident de ne plus en avoir par conviction écologique, d’autres choisissent d’élever leurs enfants pour qu’ils vivent avec la perspective de l’effondrement. Et vous ?
Est-il raisonnable de faire des enfants dans un monde qui s’écroule ?
La collapsologie, le mouvement de pensée créé par Pablo Servigne et Gautier Chappelle, a connu un réel succès ces derniers mois. Leur théorie de l’effondrement secoue le grand public, qui se retrouve parfois en proie à l’éco-anxiété : pourquoi vivre lorsque le monde s’écroule ? Pourquoi faire des enfants dans un monde en crise ? Les collapsologues nuancent : on peut faire des enfants et continuer à être optimistes à l’heure de l’effondrement écologique. Mais on peut choisir aussi de ne pas en avoir.
Ces couples qui ne font pas d’enfants par conviction écologique
On les appelle les ginks, « green inclinated no kids » (pas d’enfants par inclination écologique), ils sont en âge de procréer mais ne le souhaitent pas par souci écologique. « Laisser à un enfant un avenir complètement incertain, avec des risques de pénurie d’eau, de nourriture… c’est ce choix qui est pour moi égoïste », témoigne Clémentine, 23 ans, dans le journal Les Inrocks.
Faire un enfant possède en effet un impact écologique non négligeable. La très sérieuse Agence France Presse a publié en 2018 une infographie très commentée qui montre que « avoir un enfant en moins » est le geste le plus efficace pour réduire son empreinte carbone.
L’économiste Yves Cochet va aussi dans ce sens et souhaite, par souci écologique, la mise en place de mesures pour inciter à faire moins d’enfants(1).
On peut élever nos enfants dans une perspective écologique
Oui, mais… Et nos enfants ? Si l’on en a déjà ? Si l’on en veut, malgré tout ? Bonne nouvelle : tout n’est pas perdu ! Le collapsologue Pablo Servigne a lui-même des enfants et a réalisé des choix de vie, aller vivre à la campagne par exemple, par conviction pour ses enfants. Il précise, dans le magazine We Demain : « Il ne s’agissait pas de fuir la ville mais d’offrir à nos enfants la possibilité de tisser un lien fort avec la nature, de sentir notre interdépendance, et ainsi de multiplier les chances qu’ils en prennent soin à leur tour »(2). Ainsi, de façon générale, il ne s’agit pas de céder à la dépression ou à la panique. On peut bien vivre – et même mieux vivre – dans la perspective d’un monde fini.
C’est aussi le point de vue de la philosophe Marianne Durano, dans un excellent article paru cet été dans Le Monde, « À quoi bon des enfants en temps d’effondrement ? »(3). Pour elle, enceinte de son troisième enfant, il s’agit de donner un sens à la finitude de sa vie et du monde, et un objectif : vivre la meilleure vie possible.
« Si j’éduque mes enfants à la tempérance, ce n’est pas pour les préparer au chaos, mais parce que c’est bon pour eux. Et si, de leur vivant, la fin du monde doit venir, ils auront bien vécu. »
Un autre témoignage de mère vient finalement souligner cette position : Geneviève écrit à son fils Léon, un an, une lettre intitulée « un enfant sur fond de fin du monde ». En proie à l’éco-anxiété, Geneviève se demande si elle a fait le bon choix de mettre au monde Léon. Elle conclut ainsi : « je me fais la promesse d’être pour toi le meilleur exemple possible de courage, de militantisme, de foi en l’humanité et de respect pour l’ensemble du vivant »(4).
L’effondrement écologique et les enfants ne sont donc pas inconciliables ! Enfants ou non, il s’agit donc de vivre sobrement et joyeusement, et de tenter de laisser un monde plus propre et plus solidaire à la prochaine génération. Au travail !
Illustration bannière : Un enfant dans un environnement sinistré – © Soloviova Liudmyla
- https://www.ouest-france.fr/environnement/yves-cochet-pour-sauver-la-planete-il-faut-limiter-nos-naissances-et-mieux-accueillir-les-migrants-6161206
- https://www.wedemain.fr/Collapsologie-Et-si-on-s-organisait-pour-la-fin-du-monde%E2%80%89_a3691.html
- https://www.lemonde.fr/festival/article/2019/07/24/marianne-durano-l-idee-de-fin-du-monde-est-un-remede-necessaire-a-l-absence-de-sens-de-la-civilisation-industrielle_5492684_4415198.html
- http://plus.lapresse.ca/screens/8c78fc35-b0b6-46ea-a095-72d494a08365__7C___0.html