Lunettes, audioprothèses : les mutuelles sabrent dans les remboursements

Le 11 avril 2025, la Mutualité française a annoncé vouloir modifier les modalités de remboursement des frais relatifs aux lunettes et prothèses auditives.

Rédigé par Anton Kunin , le 14 Apr 2025, à 11 h 22 min

En invoquant la nécessité de contenir les dépenses galopantes et de préserver la viabilité du système, les mutuelles entendent réduire la prise en charge de certains équipements, quitte à alourdir considérablement la note pour les assurés.

Réformer le contrat responsable : quand les mutuelles dictent la norme

Dès les prochains mois, les assurés pourraient devoir patienter trois ans pour obtenir le remboursement d’une nouvelle paire de lunettes, contre deux actuellement. Côté audition, le délai passerait à cinq ans pour le renouvellement remboursé d’un appareil, contre quatre ans aujourd’hui. Le coeur de la manoeuvre ? Une refonte du contrat « responsable et solidaire », ce pilier des complémentaires santé soutenu fiscalement par l’État, plébiscité à la fois par les mutuelles et les assurés. L’objectif affiché : recentrer les garanties sur un « socle de soins essentiels ». Le projet est limpide : « ne rembourser que 30 euros pour des montures de lunettes, contre 100 actuellement », mais aussi supprimer le remboursement des culottes menstruelles, dont l’intégration récente dans la nomenclature avait été saluée comme une avancée en santé publique.

Dans cette logique, les soins dentaires et les audioprothèses seraient également impactés. La Mutualité française évoque une baisse des cotisations de 20 à 25 %, en contrepartie d’une couverture revue à la baisse. Moins de dépenses, certes, mais aussi moins de prestations.

Montée en puissance d’un discours économique… au détriment des assurés ?

La rhétorique de maîtrise budgétaire s’appuie sur des données incontestables. Selon la DREES, le service des statistiques des ministères sociaux, les dépenses courantes de santé ont bondi de 20 % entre 2019 et 2023, passant de 11,2 à 11,5 % du PIB. Cette orientation n’est donc pas seulement une posture. Elle s’inscrit dans une offensive coordonnée avec les assureurs privés, qui représentent environ un tiers du marché de la complémentaire santé. Des propositions concrètes devraient être faites à l’exécutif dans les prochains jours.

La mesure des impacts réels de ces annonces reste à faire. Mais en désignant lunettes et audioprothèses comme cibles prioritaires, les mutuelles signent un tournant. Celui d’une couverture santé moins solidaire, plus sélective et résolument dictée par la logique comptable.